La pression migratoire aux frontières de l’Espagne augmente
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Au nord, à l’est, au sud et à l’ouest, des réfugiés tentent de traverser l’Espagne pour atteindre le sol européen. Même les contrôles stricts aux frontières et les manœuvres de dissuasion ne les arrêtent guère. Mais en attendant, le Maroc apporte à nouveau son aide.
En voiture, le trajet entre la ville d’Irún, à la frontière nord de l’Espagne, et la ville française d’Hendaye ne prend que quelques minutes. Mais cette route est risquée pour les migrants en provenance d’Afrique, car la police des frontières française effectue des contrôles sélectifs aux frontières pour attraper les immigrants illégaux potentiels. Ceux qui sont détectés sont immédiatement reconduits à la frontière espagnole. Il existe un accord de rapatriement entre les deux pays depuis 2002.
Pour éviter ce sort, de plus en plus de migrants tentent maintenant de traverser à la nage la large rivière frontalière Bidassoa, qui est pleine de rapides. Deux migrants sont déjà morts dans cette entreprise cette année. Un homme est mort dimanche dernier. Il venait de Guinée. « La mort d’une personne qui cherche désespérément une vie meilleure ne peut nous laisser indifférents », a tweeté le maire d’Irún, José Antonio Santano.
Avec ses homologues de la ville basque de Hondarribia et de la municipalité française d’Hendaye, il a écrit une lettre aux gouvernements des deux pays pour critiquer les contrôles stricts aux frontières. Des représentants d’organisations non gouvernementales soutiennent la lettre : « Nous ne sommes qu’un point de transit. Il n’est pas normal que les gens soient arrêtés lorsqu’ils passent une frontière dans l’espace Schengen », a déclaré Mikel Mazkiaran, un avocat qui travaille notamment pour l’organisation SOS Racisme.
Selon le réseau local Irungo Harrea Sarea, dont les aides nourrissent et hébergent les arrivants au Pays basque, 4100 immigrants sont arrivés depuis le début de l’année. C’est autant que l’organisation en a compté sur l’ensemble de l’année dernière.
Les îles Canaries, tremplin vers l’Europe
Beaucoup d’entre eux ont posé le pied sur le sol européen pour la première fois aux îles Canaries. L’année dernière, 22000 migrants y ont débarqué. Cette année, les autorités ont fait état de 7500 réfugiés jusqu’à présent. Dans tout le pays, près de 27 000 demandes d’asile avaient déjà été déposées au 30 juin. Environ 17 000 personnes étaient entrées illégalement en Espagne au 1er août. Cela représente environ 50 % d’immigrants illégaux de plus qu’à la même époque l’année dernière. Pendant longtemps, le ministère espagnol de l’intérieur a essayé de garder les arrivants sur les îles aussi longtemps que possible et de ne pas les faire partir en avion vers le continent espagnol.
Cette mesure visait à dissuader d’autres boat people de faire la dangereuse traversée de l’Atlantique. Cette pratique a entraîné à plusieurs reprises des troubles et des protestations parmi les réfugiés, dont la plupart étaient hébergés dans un centre d’accueil central à Tenerife. Toutefois, après qu’un tribunal ait décidé que les migrants munis de papiers en règle pouvaient continuer à se rendre sur le continent espagnol, la situation s’est détendue. Actuellement, selon le ministère de l’intérieur, il ne reste qu’environ 2000 migrants sur les îles Canaries.
La France, en revanche, n’a aucun intérêt à ce que l’immigration en provenance du pays voisin se poursuive. « Depuis les attentats terroristes de Paris en 2015, il est beaucoup plus difficile pour les migrants en provenance d’Espagne de franchir la frontière », explique M. Mazkiaran. En novembre 2020, le président français Emmanuel Macron a donc annoncé un doublement du nombre de policiers aux frontières, qui passerait à 4800, lors d’une visite au poste frontière franco-espagnol de La Jonquera.
Selon les recherches du quotidien français Le Figaro, la police française a refoulé près de 16 000 réfugiés d’Espagne entre novembre 2020 et mars 2021. 12 282 ont été arrêtés directement à la frontière, 3469 personnes se trouvaient déjà en France et ont été expulsées. Il n’y a toujours pas de chiffres officiels de la part de la partie espagnole pour cette période.
Une nouvelle vague de réfugiés se profile à l’automne
Toutefois, pour atténuer la pression de la migration vers l’Espagne, le Premier ministre Pedro Sánchez souhaite avant tout mettre fin à la crise diplomatique avec le Maroc. À la mi-mai, l’État maghrébin avait laissé plus de 11 000 réfugiés prendre d’assaut l’exclave espagnole de Ceuta, en raison de l’amertume suscitée par ce qu’il considérait comme un manque de soutien de l’Espagne dans le dossier du Sahara occidental.
Ce n’est qu’après la nomination par Sánchez d’un nouveau ministre des affaires étrangères en juillet, qui a ostensiblement loué le Maroc comme un grand « ami et voisin », que le conflit s’est désamorcé. Depuis le début du mois d’août, les forces de sécurité marocaines ont de nouveau empêché quatre attaques contre la clôture frontalière de Melilla.
Mais surtout dans les mois à venir, les Espagnols seront encore plus dépendants de la coopération des Marocains. En automne, lorsque les eaux de l’Atlantique seront plus calmes et que le vent se calmera, des milliers de migrants pourraient à nouveau se rendre de la côte ouest du Maroc aux îles Canaries.
Neue Zurcher Zeitung, 11/08/2021