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Divine surprise
Par Mohamed Habili
Quand on s’attend à subir une défaite d’enfer et qu’à la fin elle ne se produise pas, on peut être débordé par sa joie alors qu’on devrait plus sagement se contenter d’un grand ouf de soulagement. En effet, avoir évité le pire ce n’est quand même pas la même chose que remporter un triomphe.
Le deuxième tour des législatives anticipées françaises, dimanche dernier, n’a d’ailleurs fait que des gagnants, puisque même l’extrême droite, qui certes a échoué à obtenir ce qu’elle voulait, la majorité absolue et partant le droit de former le gouvernement et de diriger pour la première fois la France après Vichy, a quand même réussi à renforcer sa présence au sein l’Assemblée, voyant le nombre de ses députés augmenter de plusieurs dizaines, preuve pour le moins probante que sa marche ascendante ne s’est pas inversée à cette occasion.
Les deux autres blocs, le Nouveau front populaire, et le camp présidentiel, ont pour leur part fait mieux qu’échapper au pire, ils sont arrivés devant le Rassemblement national et ses alliés. Cet exploit commun est en réalité plus surprenant de la part de l’ex-majorité présidentielle que de la gauche rassemblée, arrivée en tête lors de ce deuxième tour, et qui elle de toute façon croyait à sa victoire.
Soit, dirait-on, mais si les blocs ont des raisons quoique différentes d’être satisfaits de leurs résultats, admettez du moins qu’il s’en trouve quelqu’un qui lui par contre n’a aucun motif de parader, ayant perdu sur toute la ligne : Emmanuel Macron, le président de la République, le seul initiateur de la dissolution, une manœuvre à laquelle il a recouru en vue de se renforcer non de s’affaiblir plus qu’on ne l’est déjà. Pour dire cela de lui, il faudrait être sûr qu’il attendait de la dissolution qu’elle convertisse la relative mais néanmoins consistante relative absolue dont lui et les siens jouissaient en majorité absolue devant laquelle nulle opposition ne serait sérieusement tenable.
Il semble bien au contraire qu’il savait d’avance que son camp perdrait ces élections, que c’est même cette certitude qui l’avait poussé à les organiser, sans en rien révéler à personne dans son camp, sinon peut-être à ses intimes. Mais si son but était de perdre, alors on peut dire que lui aussi y a gagné quelque chose. Qu’est-ce cela pourrait bien être ? On rapporte qu’il aurait dit à des proches au vu des résultats de dimanche que les électeurs avaient bien répondu à certaines questions mais pas à celle de savoir «qui va gouverner», c’est-à-dire à la plus importante.
Il n’y avait pas de majorité absolue avant la dissolution, il y en a encore moins après elle. Cela n’a d’ailleurs pas empêché le leader de la France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon, d’affirmer de façon péremptoire qu’il revenait de droit désormais au NFP de former le gouvernement et d’appliquer tout son programme.
La réalité, c’est que si la France était ingouvernable antérieurement, ce qui avait peut-être déterminé son président à dissoudre, les conditions sont réunies pour qu’elle le soit davantage à partir de maintenant.
Dans une année, si aucune révolution ne s’est produite dans l’intervalle, ni une de droite ni une de gauche, Macron pourra encore à nouveau sortir de sa poche une deuxième grenade dégoupillée et la jeter dans les jambes de son public. Et même après cela, il lui en restera encore une autre, avant qu’il ne soit forcé de quitter la salle de concert. A moins évidemment qu’il ne parvienne d’ici là à changer le régime.
Le Jour d’Algérie, 08/07/2024
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