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Dans la Libye divisée post-Kadhafi d’aujourd’hui, la cheffe de la diplomatie d’une des deux entités dont elle se compose est chargée d’une mission casse-cou à l’étranger, dangereuse à la fois pour elle personnellement et pour sa carrière. Mais quand la chose vient à se savoir, elle est aussitôt suspendue de ses fonctions, renvoyée sur-le-champ devant une commission d’enquête, un peu comme si elle était déjà convaincue de trahison. La rencontre à Rome, évidemment à des fins de normalisation, entre les deux ministres des Affaires étrangères israélien et libyenne, Najla Mangoush pour nommer cette dernière, n’était pas destinée à être portée à la connaissance du public. Or elle vient de l’être, ce qui s’est traduit par un double scandale. L’un en Libye bien sûr – à l’ouest plus précisément, mais aussi à l’est où l’événement, il est vrai, n’a pas provoqué que de l’indignation – où le gouvernement Dbeibah démasqué se défend comme il peut, c’est-à-dire mal. Mais également en Israël, où la réaction libyenne, qui ne ressemble en rien à celui d’un pays disposé à normaliser avec lui, a fait l’effet d’un affront.
Le chef de l’opposition, Yair Lapid, n’a pas eu de mots assez durs envers le ministre Eli Cohen, qu’il accuse d’avoir par incompétence manqué à tout dans cette affaire, en livrant aux médias une information qui ne devait pas l’être. Lapid a eu une pensée pour Mangoush, semblant craindre pour sa vie, dans un pays et une société où la normalisation avec Israël continue d’être considérée comme la trahison suprême. Une Libye divisée est une Libye dangereuse, à la fois pour elle-même, pour ses voisins, et pour la cause palestinienne.
Pour avoir le dessus l’une sur l’autre, ses deux composantes sont prêtes à s’allier avec le diable s’il le faut. Aujourd’hui, c’est l’ouest qui est sur la sellette, mais il y a quelque temps, c’était l’est dont les médias israéliens révélaient les tentations normalisatrices. En fait, dès qu’un pays arabe est plongé dans les affres d’une crise existentielle, les Américains viennent susurrer à l’oreille de ses dirigeants de circonstance qu’ils auraient bien une solution pour eux, si de leur côté ils envisageaient de normaliser avec Israël. Puis ils s’arrangent pour mettre en contact les deux pays. Et si ce n’est pas dans une crise mortelle que se trouve ce pays, il pourrait vouloir quelque chose avec une telle intensité qu’il devient abordable par les Américains sous cet angle précis.
Ainsi en est-il de l’Arabie saoudite, très désireuse de se doter de capacités nucléaires, ce qui est légitime, mais qui soient de fabrication américaine. L’une des conditions américaines est qu’elle doit normaliser avec Israël, ce à quoi elle répugne encore. Les pays ayant normalisé avec Israël ont en fait cédé aux pressions américaines, autant impérieuses qu’amicales. Le Maroc, bien qu’étant le pays arabe le plus proche par le cœur d’Israël, n’aurait pas normalisé avec lui sans la reconnaissance par les Etats-Unis de la «marocanité» du Sahara occidental. Ce n’est pas directement avec Israël que l’on négocie l’établissement des relations avec lui mais avec les Etats-Unis. Ces négociations sont secrètes. Elles ne sont révélées que lorsqu’elles aboutissent. Celles qui avaient lieu entre le gouvernement libyen à Tripoli devaient être assez avancées pour que les Italiens aient pris la relève. Ce ne sont pas ces derniers qui ont quelque chose à offrir en échange mais les Américains.
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