Au Maroc, j’ai pas à choisir. Là-bas, je suis juste « le belge »

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Amir Bachrouri*

Ni blanc ni noir : juste un gris délicieux. Après avoir assisté à une représentation du livre avec un bon ami, nous sommes allés à la cantine pour une discussion après la projection. Nous étions debout à une table, sirotant du thé, quand un homme s’est approché de nous. Il voulait savoir ce qui nous avait poussés à venir ici. L’amie lui a répondu sans détour : « Parce que le thème de l’identité est fascinant pour des Flamands comme nous. Et pour nourrir notre esprit culturel.

L’homme était visiblement impressionné et a immédiatement rebondi : « Ho, mais, attendez, comment, Flamands ? Vous avez une couleur, n’est-ce pas ? Vous venez du Maroc, n’est-ce pas ? Comme s’il s’agissait d’une scène répétée, nous sommes immédiatement passés à l’action. Des Flamands avec des racines marocaines, oui. En fait, j’aimerais toujours répéter la même réponse : ce n’est pas parce que les racines de vos parents sont dans un pays étranger que les fruits de vos enfants y sont aussi.

Au Maroc, je n’ai pas à choisir. Là-bas, je suis simplement « le Belge ».

Nous avons continué à discuter, elle et moi, de la sensation de malaise que l’on ressent lorsqu’on est acculé dans un coin. Être obligé de choisir entre deux chaises. Soit flamand, soit marocain. Si vous vous asseyez sur la chaise flamande, vous risquez d’être traité de prime par les biculturalistes. Et si vous vous asseyez sur le siège marocain, votre intégration a échoué. Ce n’est jamais bon.

L’ironie est qu’au Maroc, ce jeu de chaises musicales ne joue aucun rôle. Voilà, vous êtes juste le belge. Les gens gâtés du monde qui viennent en été pour montrer leurs plumes. C’est précisément la raison pour laquelle ma compagne et moi avons voulu préciser que nous ne renions pas nos racines, mais qu’il s’agissait d’un hommage à notre identité à multiples facettes. Parce que nous ne sommes pas une chose ou l’autre. Parce que cinquante nuances de gris peuvent aussi être sexy.

Pour moi, le Maroc reste le pays des vacances de plage ensoleillées. Le pays où l’on trébuche sur ses mots pour former une phrase en arabe, après quoi on la termine en français. Emmenez-nous les yeux bandés au Maroc, déposez-nous dans un village quelque part et personne ne nous reverra probablement jamais. La seule route que nous connaissons est celle qui va des quais de l’Escaut à travers le Meir jusqu’à l’étalage de smoutebollen sur le Sinksenfoor. C’est notre ville, notre pays. Notre pays aussi.

*Amir Bachrouri est président du Conseil flamand de la jeunesse. Sa chronique paraît toutes les deux semaines.

Knack.be, 18 juin 2022

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