La nationalité française aux juifs d’Algérie : Un outrage

Pendant 132 ans, le peuple algérien a été outragé, brisé et martyrisé

Par Kamel Cheriti

La France a conquis l’Algérie par les armes et non par l’esprit, par la sauvagerie et non pas par le civisme, par la spoliation et non par la persuasion pacifique. C’est l’une des déclarations de Messali Hadj, adepte intransigeant de l’indépendance. Une constatation confirmée par toutes les atrocités qu’a dû subir le peuple algérien pour accéder à sa souveraineté .

Le peuple algérien a été bafoué pendant 132 ans de colonisation. Ses terres ne lui appartenaient plus. L’arrogance des colonisateurs était la règle. Pis encore, le décret de 1881 punissait sévèrement les Algériens musulmans pour tout acte répréhensible envers les Européens. Un outrage innommable leur a été administré à travers le fait de donner la nationalité française aux juifs d’Algérie. Pourtant, ils n’étaient pas aimés par les colonisateurs.

Le général Bugeaud, qui appréciait les valeurs nobles des Algériens musulmans, les détestait personnellement. Grâce à des juifs français, les juifs d’Algérie ont acquis en 1771, par le sinistre décret Crémieux, le statut de citoyen français. Ainsi, ils se sont rangés du côté du colonisateur en dépit d’une coexistence légendaire avec leurs frères algériens autochtones.

Cette ignoble séparation entre juifs et musulmans, qui ont vécu pendant des siècles comme une paisible communauté après que les juifs eurent été accueillis à bras ouverts en 1692 par l’Algérie après avoir été chassés impitoyablement lors de la Reconquista espagnole et n’ayant trouvé refuge nulle part, fut un grand outrage pour les Algériens musulmans. Mais l’outrage le plus inacceptable et impardonnable, c’est celui d’exposer les corps des martyrs à la population algérienne après qu’ils furent tombés au champ d’honneur.

L’exemple le plus odieux fut celui du valeureux colonel Amirouche , ce noble héros, exposé dans un espace public après avoir été mortellement touché dans un combat armé et cela contre toute valeur et contre toute morale.

Brisé, le peuple algérien l’a été pendant 132 ans. Il n’avait plus de passé, plus d’identité, ses ancêtres étaient les Gaulois. Sa vie sociale était brisée. Il avait perdu ses valeurs ancestrales, comme la solidarité, l’entraide, la fraternité. Des principes qui avaient permis de vivre dans une communauté paisible et saine où tous étaient égaux. Il n’y avait plus de pauvres ni de malades, la communauté se prêtait entièrement à soulager cette pauvreté. Avec la colonisation, la misère était devenue générale chez les Algériens musulmans.

Le célèbre écrivain Albert Camus a d’ailleurs décrit, dans des reportages, la vie misérable, pitoyable et intolérable des habitants des montagnes de Kabylie. C’était en 1949. L’Algérie était martyrisée. Avec l’agression de 1830, férocement menée, la population algérienne a diminué pendant 30 ans jusqu’à 1860. Après Alger, toutes les villes ont été conquises par les armes, à l’instar de Blida, Mostaganem, Ténès, Oran, Béjaïa, Jijel et Batna.

La plus grande tuerie a été perpétrée à Constantine. L’armée coloniale a essayé, à deux reprises, d’envahir la ville. Elle n’a réussi qu’à la deuxième, après de durs combats. Cette armée a jeté impitoyablement les défenseurs de Constantine dans le ravin profond de 140 mètres séparant les quartiers urbains. En 1871, le soulèvement de Cheikh Mokrani en Kabylie fut sauvagement réprimé, causant des centaines de martyrs ainsi que des déportations. Pour exterminer davantage la population, celle-ci était dépossédée de ses biens et contrainte à payer huit fois le montant de l’impôt. Le sommet de cette politique de génocide haineuse a été atteint durant la guerre de libération nationale, avec un million et demi de martyrs. Le peuple algérien n’a cessé de résister à l’invasion française depuis ce funeste jour du 14 juin 1830. Sa résistance armée n’a malheureusement pas obtenu de résultats. C’est seulement en 1925 que Messali Hadj a fondé le Parti du peuple algérien avec pour finalité première

l’indépendance de l’Algérie. Cette option a été farouchement maintenue par ce héros de la résistance, et ce malgré la prison, les déportations et la séquestration des biens. En 1945, pour Messali Hadj c’était déjà la déclaration finale de l’indépendance de l’Algérie, avec récupération de sa souveraineté et la mise en place d’une Constituante. Cette prise de position a été le déclic de la révolution armée du 1er novembre 1954.

Ce ne fut enfin que le 5 juillet 1962 que l’Algérie accéda réellement à son indépendance . Ce fut une euphorie générale sur tout le territoire national. Une célébration qui dura des semaines, nuit et jour. C’était la réponse donnée à 132 ans d’occupation par une population qui a été brisée, outragée et martyrisée.

Le Jeune Indépendant, 07/07/2021

Etiquettes : Algérie, France, colonisation, colonialisme, Guerre d’Algérie, guerre de libération,

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