Par Kamel M. – «Il existe entre le Maroc et l’Algérie des accords judiciaires qui font qu’Amar Saïdani devra être remis aux autorités algériennes s’il est condamné par la justice dans des affaires liées au crime économique», indiquent des sources marocaines qui précisent que «le Maroc ne pourra pas se soustraire à cette obligation». Ces sources ajoutent que «Rabat ne peut pas jouer la carte de l’opposition algérienne en accueillant sur son sol des activistes, au risque d’aggraver les divergences profondes qui caractérisent les relations en dents de scie entre les deux voisins».
Ces sources marocaines ont, par ailleurs, démenti l’information relayée par de nombreuses sources médiatiques selon laquelle l’ancien président de l’APN aurait obtenu l’asile politique. «Pour le moment, en tout cas, il ne s’agit que de supputations et d’articles de presse, mais il n’y a rien de concret à ce sujet», explique-t-on. Mais les Marocains ne cachent toutefois pas leur soutien à l’ex-secrétaire général du FLN pour avoir pris fait et cause, dans un entretien à un site algérien proche des centres de décision en France, pour le Makhzen en s’en prenant de façon inédite à l’Algérie qui «a dépensé son argent inutilement pour les Sahraouis».
A Rabat, on justifie la présence d’Amar Saïdani, impliqué dans de nombreuses affaires de corruption et de détournement de fonds, par le fait qu’il ne fait l’objet d’aucune condamnation jusqu’à présent. Ce qui implique une extradition de fait une fois le procès le concernant sera ouvert et que le verdict sera prononcé à son encontre. Il en est donc de même – si on prend les autorités marocaines au mot – de l’ex-officier radié des services, Hicham Aboud, qui s’est également envolé pour Casablanca dès la publication par le gouvernement français du décret autorisant l’extradition de ressortissants algériens concernés par des mandats d’arrêt internationaux. Ce qui est le cas de l’ancien protégé du colonel Fawzi, alors directeur du Centre de diffusion et de documentation, relevant du DRS à l’époque, lui aussi limogé.
Amar Saïdani apparaît dans l’affaire du détournement de fonds à l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC). L’instruction est remontée jusqu’à 2007, date à laquelle l’ancien secrétaire général du FLN a été cité dans le scandale du blé à Djelfa. Des sources judiciaires proches du dossier ont révélé qu’il «est impliqué au même titre qu’un ancien ministre de l’Agriculture». La décision d’Amar Saïdani de se réfugier au Maroc coïncide avec l’emprisonnement du directeur de l’OAIC et de l’inspecteur général dont le procureur de la République vient de révéler la fortune amassée en Algérie et à l’étranger en dinars, en dollars et en euros, ainsi que les nombreux biens immobiliers acquis avec l’argent de la corruption.
Si l’innommable Amar Saïdani avait été épargné par la justice grâce à sa position à la tête du FLN et à sa proximité avec les centres de décision politique influents sous Bouteflika, il n’en demeure pas moins qu’il devra être jugé pour plusieurs délits. Il est notamment accusé d’avoir participé au détournement de 4 000 milliards dans l’affaire de la Générale des concessions agricoles (GCA). En 2008, alors qu’il s’apprêtait à quitter Alger à destination de Paris, Amar Saïdani avait été refoulé de l’aéroport car il était frappé d’une interdiction de sortie du territoire national ordonnée par la justice. En juin 2007, il fut convoqué par le tribunal de Djelfa mais n’a jamais répondu à cette convocation. Cette affaire, qui a éclaté vers la fin de l’année 2006, et qui avait fait la Une des journaux, porte sur des délits de passation de marchés contraires à la législation, contrats fictifs, faux et usage de faux et paiement par anticipation à la réception d’ouvrages. Amar Saïdani y était mêlé à travers sa société-écran Al-Karama.
Algeriepatriotique avait mis la main, en novembre 2014, sur un document qui confirmait les acquisitions immobilières d’Amar Saïdani dans la capitale française. Il s’agit du contrat d’achat de l’un des deux appartements que nous avions pu «recenser» en avril 2014. D’une superficie de 101,61 m2, cet appartement a été acheté auprès d’un couple mexicain en novembre 2009. Il est situé au 9/15 boulevard Victor-Hugo, à Neuilly-sur-Seine. L’acquisition a été effectuée au nom de la société civile immobilière L’Olivier, créée en juillet 2009 – soit quelques mois auparavant – et gérée par l’une des filles d’Amar Saïdani, Kenza. Le siège social de la SCI L’Olivier, spécialisée dans l’acquisition et l’exploitation de tous biens et droits immobiliers, est sis au 48, rue de la Bienfaisance, dans le très chic VIIIe arrondissement de Paris. Outre Amar Saïdani, sont actionnaires dans cette société tous ses enfants et son épouse.
Pour acquérir l’appartement en question, Amar Saïdani a pris ses dispositions en évitant de payer cash la totalité du prix. En effet, comme le souligne le contrat, à travers la société L’Olivier, il a versé 317 500 euros et contracté un crédit immobilier de 347 500 euros auprès du Crédit du Nord, avec un taux d’intérêt annuel de 3,55%. Le coût de ce crédit est fixé à 147 745 euros, avec possibilité de réévaluation. Il le remboursera en 180 mensualités de 2 700 euros. Pour conclure cette transaction, le concerné a également déboursé plus de 33 000 euros en frais.
Algérie Patriotique, 9 avr 2021
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