Pourquoi le Maroc rappelle ses troupes du Yémen

Le Maroc a rappelé ses forces militaires impliquées dans le conflit au Yémen, selon plusieurs quotidiens arabes, citant des sources marocaines et considérant que cette décision de Rabat intervient sur fond de craintes d’une escalade au sein des territoires occupés et même d’affrontement militaire avec les forces du Front Polisario qui ont menacé de recourir une nouvelle fois aux armes si les négociations échouent au sujet du référendum d’autodétermination du Sahara occidental.
Par Amine Bensafi
Le Maroc comptait quelques 1 500 soldats dits d’élite parmi la coalition amassée autour de l’armée saoudienne pour mater la rébellion houtie appuyée par les troupes du pré- sident déchu, Abdallah Salah. Certaines sources citées évoquent aussi la célérité avec laquelle les autorités marocaines en l’expliquant par la proximité de la fin du conflit au Yémen, ce qui serait de nature à arranger les calculs de Rabat. 
Selon certains quotidiens arabes, ces forces qui intervenaient au Yémen sous commandement ou la coordination des Emirats arabes unis, auraient perdu un avion de chasse de construction américaine, de type F16, ciblé par les houties, divisant encore plus l’opinion marocaine sur la participation du pays dans ce conflit lointain. 
Des analystes n’excluent pas que le soutien apporté par les pays du Golfe, emmenés par Riyadh, à la «marocanité» du Sahara occidental, serait à la fois le salaire de cette contribution militaire et un soutien face à la contestation interne montante vis-à-vis de l’intervention des forces armées royales. Alors que les autorités marocaines multiplient le travail diplomatique dans les coulisses de l’ONU pour éviter des sanctions du Conseil de sécurité en conséquence du feuilleton de la Minurso, le Front polisario donne de nouveaux signes d’impatience en appelant l’ONU à tenir le fameux référendum sans plus tarder. 
Signe inquiétant, traduisant que les menaces du Front Polisario sont à prendre au sérieux, le ministre sahraoui de la défense nationale, Abdelahi Lehbib, a supervisé dimanche dernier l’inauguration d’un nouveau siège de forces spéciales sahraouies qui porte le nom du martyr président Mohamed Abdelaziz. 
Le commandant de ces forces a affirmé que les forces spéciales sahraouies qui sont une partie de l’armée sahraouie «vont poursuivre la même voie tracée par le martyr président Mohamed Abdelaziz jusqu’à la libération de toutes les parties de la République arabe sahraouie démocratique». Ainsi, comme écrit de nombreuses fois par notre quotidien, c’est bien l’attitude de blocage à la décolonisation du Sahara occidental, bloque également les perspectives du Maghreb. 
A long terme, s’entend, on se rendra vite compte que le statu quo du Sahara occidental ne pourra plus se poursuivre, surtout que les crises régionales (Tunisie, Libye, Mali), sont appelées à s’estomper, en attendant de se résoudre entièrement. Il y a une année ou deux, c’était le Mali qui constituait le problème régional n°1, avec simultanément un coup d’état à Bamako, une rébellion séparatiste au Nord et l’explosion de l’activité terroriste et criminelle, accompagnée par une déclaration de guerre d’Aqmi et du Mujao à l’Etat algérien dont une représentation diplomatique avait été attaquée et des diplomates enlevés. 
Dans le même contexte, on venait à peine de constater une stabilisation de la situation en Libye où deux factions rivales, le Parlement de Tripoli et le gouvernement de Tobrouk, bien que le chaos libyen et celui qui est advenu à son écho au Mali mobilisent une grande partie du potentiel militaire de l’Algérie afin de sécuriser ses frontières. 
Aujourd’hui, alors que la paix au Mali s’impose de plus en plus jusqu’à susciter les félicitations du très exigeant FMI qui relève le retour de la croissance, tandis qu’en Libye, un gouvernement a été finalement «imposé» par la communauté internationale et Daech n’en a plus que pour quelques mois.
Les Débats, 26 juin 2016
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