Appréhension et fuite en avant marocaines

Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon ne présentera son rapport sur le Sahara Occidental devant le Conseil de sécurité que le 22 avril. Mais ce qui a déjà filtré du contenu de son rapport a mis en émoi les autorités marocaines qui s’attendent à ce que le royaume sera sérieusement épinglé par lui sur la question de son non respect des droits de l’homme au Sahara Occidental, et surtout qu’il propose au Conseil de sécurité pour y mettre un terme l’instauration d’un mécanisme de surveillance de la situation des droits de l’homme dans ce territoire sous occupation marocaine. Leur appréhension que cette fois cette proposition a de fortes chances d’être approuvée par le Conseil de sécurité est si grande que le roi Mohamed VI a convoqué lundi dernier un conseil des ministres auquel il a fait approuver le «rejet catégorique» des «initiatives visant à dénaturer le mandat de la Minurso», idée avancée par les organisations internationales des droits de l’homme mais aussi par le Front Polisario et les nombreux amis de la cause du peuple sahraoui. 
Le rejet exprimé par le roi et son gouvernement de cette perspective s’est exprimé dans la foulée de la satisfaction qu’ils ont eu à entendre le président français leur réitérer le soutien de Paris à leur plan «d’autonomie» pour le Sahara Occidental en faisant silence sur les accusations de violations des droits de l’homme dont le Maroc fait l’objet internationalement. Sauf qu’ils ont depuis motif à craindre que l’appui français à leur fuite en avant risque de s’avérer inopérant. Cela en raison de l’attitude américaine qui a consisté à laisser entendre à quelques jours de la présentation par Ban Ki-moon de son rapport devant le Conseil de sécurité que les Etats-Unis veulent désormais que l’ONU puisse enquêter sur les atteintes aux droits de l’homme dans le Sahara Occidental, qu’ils présenteront pour cela avant la fin du mois d’avril un projet de résolution dans ce sens aux quinze membres du Conseil de sécurité préconisant d’étendre le mandat de la Minurso à la supervision de la situation de ces droits de l’homme dans le territoire sahraoui sous occupation marocaine. 
Paris regardera à deux fois avant de s’aventurer à contrer l’initiative américaine au cas où elle sera effectivement soumise au Conseil de sécurité. La France de Hollande n’est pas en situation de se permettre une brouille avec l’Amérique et surtout pas sur la question des droits de l’homme dont Hollande et le gouvernement socialiste réitèrent à satiété qu’ils ne transigeront pas internationalement sur leur respect. Raison qui peut faire que la France sans renoncer à son soutien à la thèse marocaine de «l’autonomie» pour le Sahara Occidental pourrait approuver le principe de la mise en place au Sahara Occidental d’un «mécanisme indépendant, global et permanent» de surveillance des droits de l’homme. 
Les autorités marocaines se doutent que Paris avec Hollande n’est plus ce protecteur inconditionnel qui a systématiquement approuvé et défendu les atermoiements du royaume dans l’affaire sahraouie et a fermé les yeux sur ses violations des droits de l’homme dans la répression du mouvement indépendantiste sahraoui. L’on comprend que le rapport de Ban Ki- moon axé sur ces questions leur a déjà fait perdre leur sérénité. Dans cette mauvaise passe qu’elles redoutent, il n’y a rien d’étonnant que les autorités de Rabat se cherchent un dérivatif qu’elles ont la constance dans des moments pareils de tenter de trouver dans la diabolisation du voisin algérien. 
Kharroubi Habib
Le Quotidien d’Oran, 17 avril 2013

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