Relations algéro-marocaines, Sahara Occidental et narcotrafic

Les ministres de neuf pays des deux rives de la Méditerranée ont adopté hier à Alger la déclaration de la 15e Conférence des ministres de l’Intérieur des 5+5.
Les travaux de cette 15e Conférence, ont été sanctionnés notamment par des accords portant sur le renforcement de la coopération en matière de sécurité en général et de lutte contre le terrorisme et le crime organisé en particulier. Au terme de la rencontre de deux jours, une conférence de presse a été animée par le Dahou Ould Kablia et ses homologues du Maroc, la Tunisie, la Libye, la Mauritanie, l’Espagne, l’Italie, le Portugal, Malte et l’ambassadeur de France à Alger en remplacement de Manuel Valse, l’absent des 5+5. Une conférence de presse durant laquelle quatre ministres ont été principalement destinataires de questions liées notamment à la sécurité et à la politique. 
A commencer par le ministre marocain Mohand Elenser qui avait à répondre à trois questions qui reviennent sans cesse et concernant la lutte contre le narcotrafic, les frontières avec l’Algérie et la question du Sahara Occidental. Pour ce qui est du premier sujet et en dépit des 244 tonnes de cannabis saisies en Algérie au cours des trois dernières années et la conviction des membres des 5+5 que le narcotrafic est source de financement au terrorisme, le représentant du royaume a affirmé que son pays «utilise tous les moyens nécessaires pour la lutte contre le trafic de cannabis et que la production de cette drogue a été réduite à 70%». Le ministre rassure et promet de consacrer plus d’efforts en matière de lutte contre la culture de cannabis et la surveillance des frontières. La réouverture de ces dernières fermées officiellement depuis plusieurs années n’est pas prévue pour les jours à venir. D’ailleurs, le ministre marocain de l’Intérieur rassure que «si la cause de leurs fernetures est due au trafic de drogue, elles ne seront pas ouvertes incessamment», a-t-il répondu aux journalistes reconnaissant que les relations algéro-marocaines «rencontrent des difficultés en dépit d’une volonté affichée pour leur amélioration et leur renforcement». 
M. Mohand Elenser ne passe pas par mille chemins pour lier la dégradation de ces relations à la question du Sahara Occidental pour laquelle il appelle à «laisser les Nations unies faire leur travail», sans donner d’amples précisions et en considérant que le Maroc n’est pas «un colonisateur» et qu’il «ne traite pas mal les détenus sahraouis» mettant en cause toutes les informations faisant état de dépassements dans les prisons marocaines et sur les territoires occupés su Sahara Occidentale. 
Pour ce qui est du double discours de la partie marocaine concernant les relations avec l’Algérie, le ministre s’est contenté de dire qu’il s’agit de simples «ripostes à certaines accusations qui traitent son pays de colonisateur». La Tunisie face à des réseaux de recrutement de djihadistes Si la sécurité de la région exige du Maroc la lutte contre la production et le trafic de cannabis, la Tunisie a, quant à elle sur les bras, la lutte contre le mouvement salafiste qui gagne du terrain et le phénomène de recrutement de djihadistes pour la région du Sahel et la Syrie. Une situation qui n’a pas été démentie par Lotfi Ben Djeddou, le ministre de l’Intérieur tunisien intervenant hier à la même conférence de presse. Le ministre a reconnu l’identification et l’existence de quelques réseaux de recruteurs de djihadistes, une montée du courant salafiste et l’existence d’un groupe de 11 terroristes à chasser en zones montagneuses aux frontières avec l’Algérie. 
Pour sa part, le ministre libyen a tenu à souligner que son pays ne constitue plus une source de menaces pour la région notamment avec le développement des moyens de lutte contre le trafic d’armes issu de la crise et le développement de la coopération avec les pays voisins dans le cadre de la sécurité des frontières et la lutte contre le crime transfrontalier. En dépit de ces propos indiquant une amélioration sur le plan de coopération, la situation sécuritaire n’est pas encore rassurante notamment avec l’avènement de nouveaux défis en matière de lutte notamment à l’issue de la guerre au Mali et l’intervention militaire française dans la région. Une question à laquelle devait répondre Manuel Valse lors de la Conférence d’Alger par une crise sur la scène politique française. Cette situation d’instabilité et d’insécurité dans la région a engendré, également, l’intensification du phénomène de l’immigration clandestine vers le Nord du continent et vers l’Europe dont l’Italie. La ministre de l’Intérieur Mme Anna Maria Cancellieri a affirmé que les autorités concernées ont recensé au cours des deux dernières années plus de 60 000 immigrants clandestins dont très peu d’Algériens. 
Au même sujet, M. Ould Kablia a tenu à préciser que l’émigration clandestine était à son avènement motivée par la pauvreté et la recherche d’emploi mais est devenue une activité organisée par des réseaux de criminels qui font objet de lutte de la part de plusieurs Etats. Revenant à la 15e Conférence des ministres de l’Iintérieur des 5+5, l’intervenant a indiqué que les participants optent pour une approche commune dans la lutte contre toutes les formes d’insécurité. Ils ont de même décidé le renforcement de leurs coopérations bilatérales et multilatérales en matière de sécurité et de collectivités locales ainsi que dans les échanges de renseignements, de formations et d’expériences dans multiples domaines afin d’atteindre des solutions appropriées au nouveaux défis à relever au niveau des deux rives de la Méditerranée.
Radia Zerrouki
La Nouvelle République, 10 avril 2013

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