Iran
I Background et enjeux :
1/ Les sanctions onusiennes
Depuis 2006, le Conseil de sécurité des Nations Unies a imposé une série de sanctions à l’Iran en relation avec son programme nucléaire. Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, le Conseil de sécurité a adopté les résolutions 1737 (2006), 1747 (2007), 1803 (2008) et 1929 (2010) imposant des sanctions de plus en plus rigoureuses contre l’Iran en réponse aux risques de prolifération que présente le programme nucléaire iranien.
L’Iran continue à ne pas se conformer aux exigences de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) ni aux dispositions des résolutions précédentes du Conseil de sécurité. Ces résolutions exigent que l’Iran coopère pleinement avec l’AIEA et suspende toutes ses activités liées à l’enrichissement d’uranium et au retraitement.
Par ses résolutions 1737 (2006), 1747 (2007), 1803 (2008) et 1929 (2010), le Conseil de sécurité a adopté un certain nombre de mesures concernant la République islamique d’Iran. Ces mesures comprennent notamment :
Un embargo sur les activités nucléaires de l’Iran posant un risque de prolifération et sur ses programmes de missiles balistiques;
Une interdiction des exportations et de l’achat d’armes et de matériel connexe de l’Iran et une interdiction concernant la fourniture à l’Iran des sept catégories d’armes classiques et de matériel connexe visées; et
Des sanctions ciblées à savoir une interdiction de voyager, une obligation de notification des déplacements et un gel des avoirs visant des personnes et des entités désignées. Le gel des avoirs vise également les personnes ou entités agissant au nom ou sur les instructions des personnes ou entités désignées, ou des entités qui sont leur propriété ou sont sous leur contrôle.
Les mesures imposées contre l’Iran, en vertu des résolutions du Conseil de Sécurité des Nations Unies incluent notamment :
l’interdiction d’exporter vers l’Iran certains articles, matières, équipements, biens et technologies susceptibles de contribuer aux activités iraniennes liées à l’enrichissement de l’uranium, au retraitement du combustible, à l’eau lourde ou à la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires ;
l’interdiction de fournir à toute personne en Iran de l’aide technique, des services financiers, de courtage ou tout autre service lié la fourniture, la vente, au transfert, la fabrication ou l’utilisation des produits visés par l’embargo sur l’exportation;
l’interdiction de mettre des biens ou des services financiers ou services connexes à la disposition de l’Iran à des fins d’investissement dans certaines activités nucléaires ;
l’interdiction d’exporter vers l’Iran toute technologie se rapportant à toute activité liée aux missiles balistiques pouvant emporter des armes nucléaires, y compris les tirs recourant à la technologie des missiles balistiques ;
l’interdiction d’exporter vers l’Iran tout char de combat, véhicule blindé de combat, système d’artillerie de gros calibre, avion de combat, hélicoptère d’attaque, navire de guerre, missile ou lanceur de missile ;
l’interdiction d’importer d’Iran des armes et du matériel connexe ainsi que des équipements et articles en lien avec des activités nucléaires posant un risque de prolifération ou avec la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires ;
l’imposition d’un gel des avoirs l’encontre des personnes ou entités désignées par le Conseil de sécurité ou par le Comité créé conformément au paragraphe 18 de la résolution 1737 (2006) (Comité 1737) comme participant aux activités de l’Iran liées l’enrichissement de l’uranium, au retraitement ou l’eau lourde ou la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires;
l’interdiction de voyager visant les personnes désignées par le Conseil de sécurité ou par le Comité 1737 comme participant au programme nucléaire iranien;
l’interdiction des réclamations déposées par l’Iran ou par les personnes désignées concernant toute transaction interdite en raison des sanctions imposées sur l’Iran.
2/ Le Comité 1737
Le Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1737 (2006) a été établi le 23 décembre 2006 afin de s’acquitter des tâches prévues au paragraphe 18 de cette dernière. Le mandat du Comité a depuis lors été étendu à la surveillance de l’application des mesures énoncées dans les résolutions 1747 (2007) et 1803 (2008) ainsi que des mesures imposées par la résolution 1929 (2010). Il a pour mandat d examiner les informations faisant état de violations desdites mesures et y donner la suite qu’il convient; à désigner toutes autres personnes et entités passibles de ces mesures; et à faire des recommandations en vue de renforcer leur efficacité.
Le Comité 1737 prend ses décisions par consensus. Un État qui constate des violations des sanctions (ou qui dispose d’informations selon lesquelles il est raisonnable de penser que tel est le cas) doit les porter à la connaissance du Comité 1737 dans les plus brefs délais par voie de rapport
3/ Le Groupe d’experts
Par sa résolution 1929 (2010), le Conseil de sécurité a créé un Groupe d’experts pour aider le Comité à s’acquitter de son mandat, et notamment contrôler et améliorer l’application des sanction. Le Conseil de sécurité lui a confié un certain nombre de tâches, et l’a notamment chargé de « recueillir, examiner et analyser des informations provenant des États, d’organismes des Nations Unies compétents et d’autres parties intéressées concernant l’application des mesures prescrites par les résolutions 1737 (2006), 1747 (2007), 1803 (2008) et 1929 (2010), en particulier les violations de leurs dispositions ». Le Groupe d’experts a été reconduit dans ses fonctions par le Secrétaire général le 30 juin, après l’adoption le 9 juin 2011 de la résolution 1984 (2011), par laquelle le Conseil de sécurité a décidé de proroger, jusqu’au 9 juin 2012, le mandat du Groupe.
Conformément à l’alinéa h) du paragraphe 18 de la résolution 1737 (2006), le Président du Comité adresse au moins tous les 90 jours au Conseil de sécurité un rapport sur ses travaux.
4/ Rapport du Comité 1737
Le dernier rapport (dix-neuvième rapport trimestriel, conformément au paragraphe 18h) de la résolution 1737 (2006)) devant le Conseil de Sécurité, le 07 Septembre 2011, couvrant la période du 24 juin au 1er septembre 2011 fait état de ce qui suit :
le Groupe s’est rendu au Brésil pour tenir des consultations avec les organismes gouvernementaux pertinents sur la mise en oeuvre des résolutions du Conseil de sécurité ;
le Comité a reçu des informations supplémentaires de la part d’un État Membre concernant un incident déjà signalé portant sur la violation présumée du paragraphe 5 de la résolution 1747 (2007).
Le Comité a également reçu une communication conjointe provenant de quatre États Membres lui signalant un cas de « violation du paragraphe 9 de la résolution 1929 (2010) ». Le Comité a demandé la pleine coopération des quatre États Membres et est en cours d’examen de cette violation présumée avec l’aide du Groupe d’experts ;
Le Comité a sollicité des informations supplémentaires dans le cadre du suivi de deux autres requêtes écrites envoyées par deux États Membres distincts l’une concernant la coopération énergétique avec une société iranienne et l’autre liée à des informations spécifiques sur des transactions financières.
5/ Derniers développements :
L’Iran affirme que son programme est civil, mais il aurait produit, selon des rapports des experts, de l’uranium à des taux se rapprochant de plus en plus du seuil militaire, dans des quantités toujours plus importantes, et dans des installations bunkérisées.
Le rapport publié par l’AIEA le 08/11/2011, l’un des plus critiques à l’égard de Téhéran souligne que l’Agence a de sérieuses inquiétudes concernant la dimension militaire du programme nucléaire iranien.
Le Conseil des Gouverneurs de l’AIEA a adopté avec une large majorité la onzième résolution (Gov2011//69) exprimant la forte préoccupation du Conseil quant aux questions non résolues et en suspens au sujet du programme nucléaire iranien ;
Le Directeur Général de l’AIEA indique dans son dernier rapport qu’il est dans l’impossibilité de confirmer que toutes les matières nucléaires en Iran sont dédiées à des activités pacifiques.
Le refus de l’Iran de coopérer pleinement avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et le fait de continuer, en dépit des résolutions du Conseil de sécurité, d’enrichir de l’uranium, selon ce pays, à des fins pacifiques et ce malgré l’absence d’un réel programme électronucléaire en Iran suscitent de jour en jour les inquiétudes et préoccupations de la communauté internationale.
L’évolution de ce dossier et les décisions contraignantes prises par le Conseil de sécurité resserent l’étau autour de l’Iran afin de la ramener à la table des négociations.
Les relations sont très tendues entre l’Iran et les E3, particulièrement avec le Royaume Uni, suite à l’attaque de l’Ambassade de Grande Bretagne à Téhéran.
II Position des grandes puissances :
Suite à un accord, signé en 2003, avec la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni (désignés sous le sigle « E3 ») et l’Union européenne l’Iran s’engage à coopérer de manière entière et transparente avec l’AIEA ainsi qu’à poursuivre la mise en oeuvre du Protocole additionnel au TNP.
En 2006, les Etats Unis, proposent de participer directement aux négociations sur le programme nucléaire iranien aux côtés des européens (à condition que l’Iran accepte de suspendre son enrichissement de l’Uranium).
Le Groupe des 3+3 (France, Allemagne Royaume Uni et Union Européenne + Etats Unis, Fédération de Russie et Chine) mènent des négociations souvent interrompues par la partie iranienne.
1/ Les Etats-Unis :
Selon les Etats-Unis, le refus de l’Iran de se conformer à ses obligations internationales en matière nucléaire ainsi que les violations de plusieurs résolutions du Conseil de sécurité et la poursuite de ses activités d’enrichissement et celles liées à l’eau lourde, au mépris des décisions du Conseil de Sécurité et du Conseil des Gouverneurs de l’AIEA ainsi que son attitude de refuser de répondre aux informations indiquant que son programme nucléaire aurait d’éventuelles dimensions militaires soulignent l’importance pour la communauté internationale de continuer à faire appliquer scrupuleusement les sanctions afin d’inciter l’Iran à se conformer à ces obligations et de l’empêcher de poursuivre ses programmes interdits.
Les États-Unis encouragent le Comité 1737 à renforcer l’action qu’il mène pour s’acquitter activement de son mandat. « Les États-Unis restent déterminés à empêcher l’Iran de mettre au point des armes nucléaires. Les intentions nucléaires de l’Iran sont très préoccupantes, non seulement pour les États-Unis, mais pour la région, pour le Conseil et pour le monde. Qu’il soit bien clair que les États-Unis sont attachés à la politique de double approche consistant à faire pression en vue d’une solution diplomatique aux préoccupations de la communauté internationale vis-à-vis des activités nucléaires de l’Iran ».
2/ La France :
La France considère que l’Iran profite du contexte régional tumultueux dans la région, notamment en Syrie pour accélérer ses efforts et multiplier les centrifugeuses. Ce pays considère que « les ambitions militaires, nucléaires et balistiques de l’Iran constituent une menace croissante et que depuis de nombreuses années, l’Iran poursuit, en violation de la légalité internationale, une politique du fait accompli »
La France estime que les sanctions que la communauté internationale a adoptées ont un impact et qu’elles produisent des effets très concrets. La communauté internationale doit continuer à les mettre en oeuvre de manière rigoureuse, pour convaincre le régime iranien de négocier et de rejoindre la voie de la légalité internationale.
3/ L’Allemagne :
L’Allemagne privilégie l’option visant à mener avec l’Iran des négociations véritables au sujet de son programme nucléaire mais à condition de respecter les règles d’engagement établies. Ce pays a déclaré être déterminé à trouver une solution durable et pacifique à la question du nucléaire iranien dans le cadre du Groupe des 3+3.
Mais si l’Iran ne fait pas suffisamment preuve de bonne volonté de coopération nécessaire, il n’ y aurait d’autre choix que de continuer à faire pression à travers une application rigoureuse des sanctions.
L’Allemagne souligne également être préoccupée par les nombreux cas d’exportation d’armes de l’Iran vers d’autres pays (souvent la Syrie) en violation des résolutions du Conseil et appelle tous les États Membres à appliquer strictement l’embargo sur les armes, conformément au paragraphe 5 de la résolution 1747 (2007).
La Fédération de Russie :
La Russie souligne qu’elle a toujours privilégié la voie du dialogue avec la partie iranienne pour le règlement des questions en suspens dans le dossier nucléaire et qu’en absence d’une solution basée sur une approche politique et diplomatique, nous « devons trouver des compromis qui nous permettront d’oeuvrer à la réalisation de notre objectif, qui consiste à ôter tout doute quant à la nature purement pacifique du programme nucléaire iranien » La Russie a déclaré qu’elle ne ménagera aucun effort en vue d’une reprise rapide des pourparlers entre le Groupe des 3+3 et l’Iran.
La Chine :
La Chine considère que le dialogue et les négociations sont les seuls moyens à même de permettre un règlement global, durable et juste de la question des capacités nucléaires iraniennes. Elle a demandé au Groupe d’experts poursuive ses activités sous la direction du Comité, conformément à la résolution 1737(2006), en faisant preuve d’objectivité et de prudence afin de faciliter une mise en oeuvre globale et efficace de la résolution.
La Chine souligne qu’en tant qu’État partie au TNP, l’Iran a droit à une utilisation pacifique de l’énergie nucléaire et qu’il doit s’acquitter de ses obligations internationales. « L’Iran et l’AIEA devront poursuivre et renforcer leur dialogue et leur coopération et régler efficacement les problèmes qui se posent afin de renforcer la confiance dans le caractère pacifique du programme nucléaire iranien. Une solution viable à la question nucléaire iranienne contribuera concrètement au maintien de la paix et de la stabilité au Moyen-Orient ».
La Chine estime que les sanctions occidentales (Etats Unis, Royaume Uni et Canda) contre l’Iran allaient « compliquer et aggraver la situation » et « intensifier la confrontation » autour de la question du programme nucléaire de Téhéran. « La Chine a toujours été contre des sanctions unilatérales vis-à-vis l’Iran ».
Position d’autres parties :
Afrique du Sud :
L’Afrique appuie le Comité 1737 et affirme qu’il n’accepterait pas un Iran doté de l’arme nucléaire pas plus qu’elle ne refuserait à un pays signataire au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires le droit à l’utilisation pacifique de la technologie nucléaire dans le cadre du respect des garanties appropriées.
L’Afrique du Sud considère que l’Iran doit coopérer pleinement avec l’AIEA pour régler les questions en suspens et que l’Agence est la seule autorité internationale qui soit habilitée à vérifier et à fournir les assurances nécessaires s’agissant du caractère pacifique du programme nucléaire iranien.
Inde :
L’inde réitère sa position constante vis-à-vis de la question du nucléaire en Iran et appuie le droit de tous les États, y compris l’Iran, à utiliser l’énergie nucléaire à des fins pacifiques et à respecter leurs obligations internationales. L’Inde considère que les problèmes dans le dossier nucléaire iranien doivent être réglés de manière pacifique par le dialogue et les négociations. L’Inde souligne que toutes les parties doivent appliquer intégralement les résolutions adoptées par le Conseil de sécurité, et en même temps, tous les efforts nécessaires doivent être déployés pour veiller à ce que le commerce et les activités légitimes des entités iraniennes et ceux d’autres pays ne soient pas affectés.
III Position du Maroc
Depuis le déclenchement de la crise du dossier nucléaire iranien, le Maroc a plaidé en faveur d’une position conciliatrice qui fait valoir les vertus du dialogue, de la négociation et du compromis;
Cette position repose sur les considérations suivantes :
La préservation de l’équilibre entre les trois piliers de l’AIEA, à savoir le transfert de technologie, la sûreté et la sécurité et la vérification ;
L’application juste et universelle du système des garanties de l’AIEA et du régime de non prolifération ;
La nécessité de création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen Orient ;
Le respect rigoureux et scrupuleux du régime des garanties et la transparence de l’utilisation des techniques nucléaires ;
Le débat sur le programme nucléaire iranien ne doit pas être utilisé comme prétexte pour empêcher les pays en développement d’accéder à la technologie nucléaire à des fins pacifiques de développement ;
Toute tentative de conciliation et de prise de décision, aussi bien au niveau onusien, qu’au niveau de l’Agence doit tenir compte du contexte particulier de la région ;
Bien que le dossier ait été transmis au Conseil de Sécurité, l’AIEA doit continuer à jouer dans ce cadre un rôle central;
Le Maroc communique régulièrement au Comité 1737 les dispositions prises par notre pays pour la mise en oeuvre des résolutions du Conseil de Sécurité.
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