Jo Golan – Un destin marocain
Jo Golan est mort dans son sommeil près d’El Jadida (Mazagan), au Maroc, le 11 août 2003. Les autorités marocaines ont pris en charge le rapatriement de son corps du Maroc à Paris, puis au village d’Avihaïl, en Israël, où il fut inhumé. C’est au nom du gouvernement marocain que son ami, l’ancien ministre des affaires étrangères marocain Mohamed Cherqaoui, beau-frère du roi Hassan II, a veillé à faire transférer le corps dans un cimetière juif et à régler toutes les problèmes techniques. Golan est décédé à l’âge de 81 ans, entouré de sa famille qui l’avait accompagné en vacances au Maroc où ils avaient été invités par le ministre Cherqaoui. Le destin a voulu qu’il trouvât la mort dans le pays dont il avait aidé les dirigeants à accéder à l’indépendance tout en aidant les Juifs à préserver leurs droits. Il est mort à quelques kilomètres d’El Jadida, à l’endroit même où se trouvait à l’époque le camp de transit pour émigrants Qadimah. Quarante-huit ans auparavant, il s’était occupé de l’évacuation de ses occupants vers Israël.
Tout au long de sa carrière publique, Golan aura été un visionnaire qui savait œuvrer à contre-courant comme en ont témoigné après coup ses rivaux. Son caractère était celui d’un sabra dont la mentalité n’a que peu à voir avec celle d’un Juif de la diaspora. Ce fut celui d’un homme très impliqué dans la vie du monde arabe et d’un bon connaisseur de sa culture. Sa méthode préconisait l’action diplomatique pour régler les conflits. Il savait par-dessus tout entretenir des liens d’amitié avec les dirigeants arabes et gagner leur confiance. La liste de ses relations et contacts est variée. Elle comporte des conversations intimes avec le roi Mohamed V, une amitié avec la veuve du président Roosevelt et avec le maire de la ville de Florence, Giorgio La Pira, des rencontres avec les Égyptiens Mohamed Hasanin Heikal et le colonel Sarouate Oqacha, avec le dirigeant du FLN algérien Krim Belqacem et avec le chef de l’Armée de Libération Marocaine, le docteur Abdelkrim Khatib. Il entretint des négociations avec Mohamed Laghzaoui, chef des services de sécurité du Maroc. Il tissa des liens solides avec le premier chef du gouvernement marocain, Mbark Bekkaï, avec les dirigeants de l’aile gauche de l’Istiqlal, Abderahim Bouabid et Mehdi Ben Barka, avec les dirigeants du Parti Démocratique pour l’Indépendance, Abdelqader Benjelloun, Mohamed Cherqaoui et Abedelhadi Boutaleb, avec Bensalem Guessous et avec le dirigeant du Mouvement Populaire (berbère) Mahjoubi Aherdane. Il rencontra aussi des dirigeants plus conservateurs comme Allal Alfassi, Hadj Omar ben Abdeldjalil, Ahmed Balafrej, Moulay Ahmed Alaoui et le docteur Mohamed Alfassi. Ces relations, et bien d’autres encore, ont fait de Golan un médiateur incontournable aux services duquel tout organisme étranger devait avoir recours pour établir des contacts avec des protagonistes du monde arabe.1
Toutefois, le chef du Mossad, Isser Harel, reprochait à Golan de trop faire confiance à ses interlocuteurs arabes, qu’il ne comprenait pas que la catastrophe était imminente au Maroc et qu’il fallait à tout prix faire sortir les Juifs avant qu’il ne soit trop tard. De son point de vue, les Marocains n’étaient pas meilleurs que les Syriens, les Irakiens, les Égyptiens ou les Yéménites qui expulsèrent les Juifs de leurs pays. Il accusa Golan d’avoir incité les membres du Congrès juif mondial à trop faire confiance aux Arabes et d’avoir exposé les Juifs du Maroc à de graves dangers. Quant au caractère de Golan et à ses rapports avec ses collègues, le dirigeant du Congrès juif mondial à Genève, Gerhardt Riegner, traça ainsi son portrait : « Il avait un grand intérêt pour les mouvements nationalistes arabes. Il parlait couramment l’arabe et avait un don particulier pour ouvrir des portes et établir des contacts même dans les situations les plus difficiles. Le Congrès juif mondial lui a confié la mission de nouer les premiers liens avec les milieux nationalistes de l’Istiqlal et du Parti Démocratique pour l’Indépendance. Golan n’était pas dépourvu de charme et il en usait volontiers. Il savait aussi plaisanter, ce qui lui a sûrement facilité ses missions mais ne l’a pas rendu populaire chez mes amis conseillers politiques » 2 .
Au Maroc, qui fut le théâtre principal de ses activités dans les années 1950, Golan favorisa l’option diplomatique. C’est elle et seule qui a permis l’émigration des Juifs3. À l’encontre de cette méthode, l’activisme excessif de ses rivaux fut cause de désastres et causa des morts et des blessés. Harel avait l’habitude d’établir une distinction schématique entre deux conceptions opposées : d’un côté celle des partisans de l’émigration clandestine, qui mettaient souvent en danger des vies humaines, et de l’autre celle des tenants de la diplomatie discrète, tolérants envers les autorités marocaines. En réalité, ce clivage était plus complexe et diverses considérations entrent en jeu. Les activistes étaient persuadés que les Juifs du Maroc couraient un grand danger. Il fallait donc forcer les autorités marocaines, par tous les moyens, à les laisser partir. Mais même le représentant de cette méthode, Barukh Duvdevani, de l’Agence juive, a été obligé d’admettre l’efficacité de la méthode Golan. « Notre conception était sioniste. Nous avons souvent pris des décisions lourdes de conséquences. Nous étions persuadés qu’il n’y avait pas d’autre avenir pour le judaïsme marocain que l’émigration en Israël et nous avions réellement l’impression qu’il s’agissait d’un cas d’extrême urgence. Il n’en était pas de même pour les membres du Congrès juif mondial qui s’efforçaient de trouver des solutions ad hoc pour remédier aux problèmes de la vie communautaire juive. En outre, il faut dire en leur faveur que les liens d’amitié qu’ils ont tissés avec de nombreux membres du gouvernement évitèrent une effusion de sang dans la communauté dans une période de transition et de passation de pouvoir. Ces liens permirent aussi d’améliorer les conditions de vie dans le camp de transit près de Casablanca »4
De l’avis de Golan, l’émigration dite « clandestine » n’a en fait jamais existé au Maroc. Cette émigration ne pouvait s’effectuer qu’avec le consentement et l’approbation tacite de la classe dirigeante marocaine. La seule condition à cet arrangement était que les départs s’effectuent discrètement : « Comment peut-on prétendre, rétorque Golan, faire sortir des dizaines de milliers de familles de quartiers surpeuplés, au su des voisins, de liquider des affaires et de vendre tous ses biens, tout cela clandestinement et sans que personne ne s’en rendre compte ? »5 En outre, Jo Golan témoigne d’un entretien entre le gouverneur de Tanger, Bensalem Guessous et un représentant de la Misgeret6 , au cours de laquelle Guessous avait averti les responsables du bateau Egoz (Pisces) au nord du pays, que les conditions atmosphériques n’étaient pas favorables pour les embarquements en haute mer et leur conseilla impérativement de ne pas poursuivre l’opération7 .
Un exemple des divergences entre les chefs du Mossad et Golan concerne l’attitude des premiers à l’égard des caches d’armes que le réseau de la Misgeret, affilié au Mossad, avait installées au Maroc. Ces dépôts d’armes, assez nombreux, mettaient en danger la communauté locale. De l’avis de Golan : « Ils ont fait des choses insensées. Un des représentants [du Mossad] a envoyé des jeunes Juifs marocains s’entraîner dans des camps militaires en Israël et les a ramenés dans leurs villages d’origine, munis d’armes individuelles introduites clandestinement au Maroc pour l’autodéfense des Juifs. Personne n’avait pensé qu’ils deviendraient suspects aux yeux de la population locale qui aurait vite compris la nature de leur activité ». Le Mossad n’avait pas tiré les leçons de l’échec du réseau israélien en Égypte, « la hasardeuse affaire », et continuait à commettre les mêmes erreurs. De même, le recours excessif des Israéliens à proposer des pots-de-vin au Marocains scandalisait Golan8 . Les représentants du Ministère des Affaires Étrangères israélien et ceux du Mossad étaient tellement habitués à proposer des pots-de-vin, que cette coutume devint un réflexe spontané à chaque rencontre avec un dirigeant marocain, comme c’était le cas avec Bensalem Guessous. Selon Jo Golan, un ami de Guessous, celui-ci était loin d’être une cible convenable à la corruption à des fins politiques9 . Les émissaires israéliens étaient persuadés qu’on ne pouvait accéder à un renseignement ou recevoir un service qu’en ayant recours à la corruption de fonctionnaires. Fidèles à cette conception, ces émissaires se conduisaient ainsi dans tous leurs rapports avec l’administration marocaine et proposèrent souvent des gratifications alors que ce n’était point nécessaire : « Je n’ai jamais donné le moindre centime pour qu’un Juif quitte le Maroc. Après mon départ, la corruption de fonctionnaires devint monnaie courante chez les émissaires du Mossad dans leurs relations avec les autorités »10 .
En ce qui concerne les contacts avec les pays arabes, Golan devint pratiquement incontournable pour établir des médiations avec les autorités locales, les organismes officiels étant incapables de les effectuer elles-mêmes. La liste des institutions qui, à contrecœur, sollicitèrent son intervention est impressionnante. Elle compte le ministère des Affaires étrangères à Jérusalem, l’ambassade d’Israël à Paris, ses amis du Congrès juif mondial, les délégués de l’Agence juive, les chefs du Mossad et même les dirigeants de la communauté juive au Maroc. L’establishment israélien n’aimait pas les médiateurs expérimentés de son genre, qui constituaient une preuve trop évidente de sa propre incapacité. C’est la raison pour laquelle on essaya à plusieurs reprises d’écarter Golan, ainsi qu’André Chouraqui, de la scène de ces opérations, mais sans grande réussite. 11
Quant à l’attitude de Golda Meir envers Golan, empreinte de méfiance, contrairement à celle de Moulay Hassan et à celle des Marocains en général, on peut s’en faire une idée grâce à l’épisode suivant. Le 4 août 1960, une délégation du Congrès juif mondial était sur le point de partir au Maroc pour s’entretenir avec le prince héritier. La délégation devait être constituée d’Alexandre Easterman, d’André Jabès et de Jo Golan. À la veille de leur départ, un télégramme de Golda Meir les informa qu’elle s’opposait au voyage de Golan sous prétexte qu’il n’existait pas de relations diplomatiques entre le Maroc et Israël. Golan étant le seul Israélien de la délégation, elle ne pouvait garantir sa sécurité. Le jour du départ, Easterman s’entretint avec l’ambassadeur d’Israël à Paris, Walter Eitan, pour le convaincre que la participation de Golan à cette mission au Maroc était indispensable. Mais l’ambassadeur avait reçu de son ministère, à Jérusalem, des instructions pour empêcher Golan de partir, et il lui fit savoir que, s’il partait quand même au Maroc, il le faisait à ses risques et périls et contre l’avis de l’ambassade. Il était évident que les diplomates israéliens ne se souciaient guère de la sécurité de Golan. Ils étaient plutôt préoccupés par ses opinions sur la politique à mener envers les pays nord-africains. Qui plus est, quelques mois plus tôt, Golda Meir et l’ambassadeur Eitan avaient eux-mêmes sollicité l’intervention de Golan auprès des Marocains en faveur du voyage au Maroc de l’Israélien Aqiva Levinski, en dépit de l’absence de relations diplomatiques entre les deux pays. Ils savaient aussi qu’en fournissant à Golan un visa sur son passeport israélien, les autorités marocaines se portaient garantes de sa sécurité. En outre, cet acte prouve bien que les Marocains ne considéraient pas Israël comme un pays hostile. De fait, le couple Esther et Jo Golan détenaient des passeports israéliens sur lesquels étaient appliqués des visas d’entrée numéros 6 et 7 du nouvel état marocain. Par loyauté envers le ministère, Golan décida d’annuler son départ jusqu’à nouvel ordre. Quel fut l’étonnement de Golda Meir en lisant, dans le rapport de Goldmann, qu’à l’arrivée de la délégation à Rabat, Moulay Hassan s’étonna de l’absence de Golan. Easterman s’en étant excusé, prétextant que ce dernier était malade, le prince conseilla d’attendre sa guérison pour entamer les pourparlers. La délégation quitta donc le Maroc bredouille12
Jo Golan pouvait être fier de ses réussites, qui ne furent pas de moindre importance, aussi bien sur la scène marocaine que pour la sécurité du judaïsme algérien. Un de ses plus grands succès fut l’accord appelé « GolanLaghzaoui », dans le cadre duquel il conclut avec les services de sécurité marocains l’évacuation de milliers d’émigrants du camp de transit Qadimah, près d’El Jadida. Parmi ses autres succès, il faut rappeler l’initiative qu’il prit de persuader les dirigeants de la communauté juive de soutenir, à la veille de l’indépendance, le mouvement nationaliste marocain. Grâce à ses contacts avec les chefs de l’Armée de Libération, il a ainsi pu garantir la sécurité de la communauté lors des troubles politiques qui suivirent le départ des Français du Maroc. Contrairement à Goldman, Golda était persuadée que les autorités marocaines utilisaient abusivement leurs relations avec Golan et grâce à eux prouvaient que le Maroc accordait les pleins droits aux Juifs.
Faut-il rappeler aussi l’organisation des trois « Conférences méditerranéennes pour la culture» qui se tinrent à Florence à partir d’octobre 1958 à l’initiative de Golan et du maire de la ville, Giorgio La Pira ? Le but de ces conférences était d’établir des contacts entre intellectuels israéliens et arabes pour une solution du conflit au Moyen-Orient. Le prince Moulay Hassan arriva à Florence flanqué des dirigeants des deux ailes de l’Istiqlal, Allal Alfassi et Mehdi Ben Barka, dont le parti constituait le gouvernement de l’époque, présidé par Ahmed Balafrèj, Bensalem Guessous et Mohamed Dadoun, président du Wifaq13 Du côté israélien participèrent le philosophe Martin Buber, Uriel Hed directeur du département de littérature à l’université hébraïque, l’orientaliste M. Plessner, l’historien Yehoshua Prawer, l’ancien chef du Mossad Reuven Shiloah, le secrétaire général adjoint du Ministère des Affaires Étrangères Maurice Fisher, le directeur du département politique de la Histadrut Reuven Barqat, ainsi qu’un député à la Knesset Rustum Bastuni (Mapam) 14 . Ces conférences furent accompagnées par la publication de la revue Les Études méditerranéennes, à laquelle collaborèrent des intellectuels de pays arabes et d’Europe. Elles permirent aussi à des hommes politiques des deux camps de se rencontrer et constituèrent un précédent aux pourparlers secrets entre Israéliens et Palestiniens pour la résolution du conflit.
Golan est né à Alexandrie en 1922. L’éducation qu’il reçut à Damas et à Beyrouth en arabe, en anglais et en français lui permit de remplir des fonctions délicates dans sa carrière de diplomate. Installé en 1940, avec ses parents, au mochav Avihaïl, dans la plaine du Sharon, il s’engagea dans l’armée britannique et fut envoyé en Libye et en Italie, puis mobilisé par la suite dans les services de renseignement de la Haganah. Juste avant la création de l’État d’Israël, la police égyptienne l’arrêta au Caire alors qu’il formait de jeunes juifs à l’autodéfense. Il fut libéré trois semaines plus tard. Après la guerre d’indépendance d’Israël, il servit dans les renseignements militaires de Tsahal. De 1949 à octobre 1953, Golan fit des études de droit et de sciences politiques à la Sorbonne. Sa sensibilité aux problèmes du tiers monde et du colonialisme le conduisit à nouer des liens d’amitié avec des étudiants africains et arabes. Avec eux, il créa la « Ligue des étudiants français contre le colonialisme » dont il fut le secrétaire général. À cette époque, la présence française en Afrique du Nord était bien ancrée dans les consciences et beaucoup pensaient qu’il s’y maintiendrait à jamais15. Alors que tous les protagonistes israéliens et les organismes juifs internationaux soutenaient inconditionnellement la France et sa politique coloniale, Golan sympathisait avec la future classe dirigeante nord-africaine. L’aide qu’il apporta au mouvement nationaliste marocain lui valut plusieurs interpellations par les services de sécurité français.
Sur la recommandation du premier Ministre, Moshe Sharet, et du directeur général du ministère des Affaires étrangères, Walter Eitan, Nahum Goldmann le nomma conseiller politique, responsable du dossier arabe, au Congrès juif mondial. À ce titre, il commença à nouer des liens secrets avec de nombreux dirigeants du monde arabe et avec les milieux libéraux et anticolonialistes en Europe. Les tentatives de Golda Meir de lui confisquer son passeport israélien à cause de ses contacts avec les chefs du FLN et de l’avertissement qu’il fit parvenir aux chefs de la communauté juive algérienne en 1961 constituent un des chapitres les plus délicats de l’histoire de la diplomatie israélienne. En Algérie, contrairement au Maroc, un vrai danger menaçait la communauté juive qui soutenait en grande partie la présence française dans le pays. Golan inscrivit aussi son nom dans l’histoire des relations du judaïsme avec le Vatican. À l’issue de ses contacts avec les dirigeants de l’Église catholique, ces derniers acceptèrent de supprimer les mentions antijuives de la prière du Vendredi saint.
En 1982, Golan rédige en français ses mémoires à partir des nombreuses pages du journal qu’il tenait à l’issue de ses pourparlers. La valeur historique de ce témoignage est d’autant plus importante qu’il émane d’un témoin direct qui prit une part active aux événements. Plusieurs autres faits et gestes de Golan n’ont pas été inclus dans son livre16 Pour certains, Golan a préféré les ignorer par modestie ou parce qu’il n’avait pas en sa possession la documentation nécessaire pour les reconstituer. Son livre n’échappe pas à la subjectivité et comporte des partis pris opposés au conformisme en vigueur à l’époque. C’est la raison pour laquelle de nombreux épisodes, comme ses relations avec le chef de l’opposition au Maroc, Mehdi Ben Barka, n’ont pas encore été publiés. Dans les archives nationales d’Israël sont conservés sous le sceau du secret des dossiers qui concernent Golan : « Yossef Golan 1960-1961, ANI AE – Archives Nationales d’Israël, ministère des Affaires Étrangères, dossier 939/9 ; « Golan 1962-1963, ANI AE, dossier 947/4 », « Jo Golan, Nahum Goldmann, janvier 1960 à décembre 1966, ANI AE, quatre dossiers 4332/9, 2,11,01 ». Dans d’autres dossiers secrets se trouvent vraisemblablement des correspondances et de nombreux rapports sur les activités de Golan. Plus de quarante ans après la fin de l’évacuation organisée des Juifs du Maroc, il est temps, à mon avis, de lever le secret sur l’ensemble des dossiers qui touchent ce domaine.
En juillet 2003, Golan m’appela de Rome à Paris où j’étais et me demanda comment progressaient mes recherches sur les relations secrètes entre Israël et le Maroc. Mon livre en était alors aux derniers stades de sa rédaction et il voulait lire le manuscrit avant sa publication17 Je lui répondis que je serais ravi de le mettre à sa disposition pour profiter de ses remarques et suggestions. Je savais aussi qu’il y trouverait de nombreux faits et gestes auxquels il fut impliqué mais dont il ne connaissait pas les revers de la médaille. J’étais très intéressé à lui faire découvrir, par exemple la rencontre avec le prince héritier, le 4 novembre 1960. Nous avions décidé de nous rencontrer tous deux en Israël, à son domicile face à la vieille ville de Jérusalem. Deux semaines plus tard, alors que j’imprimais un exemplaire pour le lui remettre, j’appris la nouvelle de sa mort au Maroc. J’ai beaucoup regretté qu’il n’ait pas lu ce livre, qui, à plusieurs égards, reflète sa contribution cardinale à l’immigration en Israël du judaïsme nord-africain. Grande fut ma tristesse.
Yigal Bin Nun Université de Paris VIII.
Source : Academia
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