Algérie: MIEUX VAUT PRÉVENIR…

» D’une part, la justice est supposée être totalement indépendante. Notamment, depuis le déclenchement du hirak, et le lancement de cette campagne tous azimuts contre la corruption « .

Par Mohamed Abdoun :

La menace salafiste, qui est loin d’être une simple vue de l’esprit, existe bel bien. Elle n’a, du reste, jamais été aussi présente, ni aussi imminente. En témoigne par exemple, la menace dont a été victime djelloul Hadjimi, le secrétaire général de la coordination des imams qui, pourtant, est lui-même loin d’être un enfant de choeur.

Ce dernier, en effet, aurait été empêché par un groupe d’intégriste d’entrer au sein de la mosquée où il avait pour habitude d’officier tous les vendredis. Dans une déclaration adressée à la presse, le dénommé Hadjimi pointe du doigt les salafistes qu’il désigne par « une minorité ayant ses propres référents doctrinaires et idéologiques ».

Tirant la sonnette d’alarme, ce porteparole des imams affirme que « tout le monde est responsable de cette dérive dangereuse », en rappelant toutes les mises en garde déjà adressées à la tutelle au sujet de la multiplication des actes d’agression ciblant les fonctionnaires des Affaires religieuses et des Wakfs.

Dans le même sillage, Djeloul Hadjimi prévient contre « une mauvaise exploitation du hirak et ses effets pervers », allusion à la montée des extrémistes. Le signataire de la déclaration estime par ailleurs que le fait de « se taire face à une telle conduite est une dérive intolérable et une voie ouverte à la fitna (…) qui plongera le pays dans une spirale fatale et dont les conséquences ne peuvent être que néfastes ».

Il n’est pas exclu, en revanche, qu’il s’agisse là d’une grossière manipulation de la part de ce personnage, lui-même peu fréquentable. Ce dernier, en effet, a mis à profit cet incident -dont l’authenticité reste à prouver- pour lancer un bien curieux appel à l’ANP, dans lequel il lui demande » de venir à leur secours et d’actionner la justice contre l’agresseur ». Il est évident que ce genre d’activités ne relèvent absolument pas des prérogatives de l’ANP.

D’une part, la justice est supposée être totalement indépendante. Notamment, depuis le déclenchement du hirak, et le lancement de cette campagne tous azimuts contre la corruption. Demander à l’ANP d’actionner la justice serait dès lors une manière sournoise de suggérer que cette derrière serait à la botte où à la solde de l’institution militaire.

Il aurait été tellement plus simple, plus sain, et plus conforme aux lois de la République, pour ce personnage sulfureux d’introduire lui-même une action en justice, s’il avait été véritablement agressé et empêché de se livrer à son traditionnel prêche du vendredi. Il en va de même pour ce curieux et sournois appel au secours. Il n’est pas non plus dans les prérogatives de l’ANP de voler au secours d’un citoyen agressé, quel qu’il soit, puisque cela relève du rôle traditionnel de la police et de la gendarmerie.

L’ANP, elle, veille à préserver l’intégrité et la souveraineté territoriales, tout en luttant contre le terrorisme. Or, si ces salafistes représentent en effet un danger pour le pays, ses lois et pour la République, ils ne sont quand même pas terroristes tant qu’ils ne commettent pas d’actes de violence qualifié, ni n’adhèrent pas à un groupe criminel activant dans le pays ou ailleurs. C’est dire que la sortie de Hadjimi, loin d’être innocente, donne l’air de chercher à impliquer l’ANP dans ces affaires qui ne sont pas le siennes. Il pourrait même s’agir ici d’une façon machiavélique de la disqualifier, après coup, afin d’ouvrir la voie toute grande aux salafistes, intégristes et terroristes de tous poils. Prudence…

M. A.

La Tribune des Lecteurs, 6 jui 2019

Tags : Algérie, dialogue, hirak, armée, Gaïd Salah,

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