C’est un roi du Maroc mal inspiré qui a écrit au président actuel de l’Union africaine pour motiver la demande d’adhésion du Maroc à cette organisation continentale qu’il a quittée en 1984, suite à l’acceptation de la République sahraouie comme Etat membre en son sein. «L’histoire retiendra cet épisode comme un acte comparable à un détournement de mineur, l’OUA étant encore adolescente à cette époque», a argué Mohammed VI. Une comparaison maladroite qui s’ajoute aux innombrables faux pas de la diplomatie marocaine qui collectionne les échecs et les déconvenues depuis plusieurs années. C’est la première fois dans les annales des relations internationales qu’un chef d’Etat tient ce genre de propos incongrus et déplacés dans une correspondance officielle adressée au président d’une institution internationale. Les auteurs frivoles de cette métaphore cynique et obscène écorchent l’image de leur propre pays, qui a déjà du mal à se défaire de sa réputation de «destination privilégiée pour les pédophiles».
Le roi du Maroc a énuméré les contributions de son pays à l’Union africaine depuis sa création et l’apport du Maroc au continent jusqu’à ce jour, malgré son retrait de l’organisation il y a plus de trente ans. «Le Maroc qui a quitté l’OUA n’a jamais quitté l’Afrique», a souligné Mohammed VI, qui explique que les circonstances dans lesquelles son père, feu Hassan II, avait décidé de claquer la porte de cette organisation étaient «particulières». Il fustige, au passage, la reconnaissance d’un «pseudo-Etat», en faisant allusion au Sahara Occidental dont il ne cite à aucun moment le nom dans sa longue missive aux dirigeants africains auprès desquels il sollicite compréhension et mansuétude. «C’était dur à accepter par le peuple marocain», se plaint-il, sans expliquer, néanmoins, pourquoi le Maroc a décidé de revenir dans le giron bien que le Sahara Occidental siège toujours à l’Union africaine.
Mohammed VI se contredit, ainsi, en quémandant un siège au sein de l’organisation panafricaine et en continuant de nourrir un discours conquérant et orgueilleux en parlant de la République sahraouie : «Il est difficile d’admettre que le royaume, nation pérenne et ancestrale, soit comparé à une entité ne disposant d’aucun attribut de souveraineté, démunie de toute représentativité ou effectivité», maugrée le roi du Maroc qui évoque une «blessure» qu’il «rêve depuis des années» de «confier» aux chefs d’Etat africains. Il dit attendre de ces derniers «une écoute attentive et sereine».
Insidieusement et en des termes à peine voilés, Mohammed VI appelle les dirigeants africains à expulser le Sahara Occidental de l’Union africaine. Le roi du Maroc trahit ses ambitions inavouées et affiche, sans le vouloir, le véritable dessein qui se cache derrière sa décision de réintégrer l’Union africaine. Le Makhzen a compris que toutes ses tentatives de faire avaler son plan d’autonomie à la communauté internationale ayant échoué, il devait réorienter sa guerre diplomatique en la menant à l’intérieur même de l’organisation africaine dont il compte se servir comme tribune pour isoler le Polisario. Le Makhzen veut clairement prendre sa revanche face à ce qu’il qualifie de «tromperie» et de «détournement de procédures au service d’on ne sait quels intérêts», en exigeant de l’Union africaine qu’elle «corrige les erreurs de parcours» et «rétablisse la légalité».
Karim Bouali
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