Par Ammar Zitouni
La détérioration de la situation générale en Libye n’intéresse plus personne, y compris la coalition occidentale qui a été à l’origine de la chute du régime de Maâmar el Kadhafi.
Depuis quelques jours, on s’empresse, sous la pression des combats meurtriers entre milices, à quitter ce pays. La France, les Etats-Unis, la Turquie, la Grande-Bretagne, la Belgique, les Philippines et certains pays arabes ont évacué leurs ressortissants et leurs diplomates. A présent, la Libye, se trouve être un pays livré à lui-même et à la merci totale de djihadistes-mercenaires. Ces derniers, profitant du vide institutionnel et du manque cruel de centralisation, sèment désordre sécuritaire et blocage politique. Les pouvoirs locaux et régionaux représentés par les comités locaux, les conseils militaires et les milices fondées sur des identités territoriales et tribales, sont aujourd’hui les principaux freins à l’enracinement d’un Etat centralisé.
Au lendemain de la première élection législative, la France et ses alliés ayant largement contribué au complot contre la souveraineté libyenne, se sont empressés de qualifier cette échéance de « victoire « de la démocratie libyenne post-Kadhafi. Mais, ce ne fut en réalité qu’une appréciation injuste pour camoufler leur échec dans ce pays. Le pouvoir libyen, jusqu’à preuve du contraire, reste fragmenté par des rivalités héritées de la chute de l’ancien pouvoir, et qui prennent racine dans la propre histoire de ce pays. Un réveil brusque des identités religieuses et communautaires. Celles-ci se conjuguent à présent pour compliquer la restauration de l’ordre sécuritaire et la stabilité politique. Une situation singulièrement complexe pour surtout la recherche simultanée d’un double équilibre: « un équilibre entre les différentes régions et localités et un équilibre entre les différentes mouvances partisanes ».
Ces graves problèmes qui surgissent à tout moment à Tripoli, Benghazi et d’autres localités, représentent ce qu’on appelle « La guerre de second ordre », la guerre civile locale à l’instigation de l’impérialisme et ses relais dans la région. En la matière, les exemples sont légions, notamment dans le Monde arabe.
La Libye, un pays aujourd’hui complètement à l’abandon et entre les mains d’un terrorisme aventurier au nom de cette nouvelle conception « djihadiste », est un tourbillon au « diamètre » contagieux.
En effet, pour nombre d’observateurs, « la guerre en Libye a déstabilisé le Sahel ». Des milliers d’armes, dont des missiles sol-air, circulent dans cette région aux frontières poreuses. Dans ce sillage, le Maghreb et le Sahel n’en finissent pas de subir les conséquences du « printemps arabe ». « Le tremblement de terre géopolitique qui secoue l’espace maghrébo-sahélien a pour épicentre la Libye dont les secousses sont ressenties jusqu’au rivage sud du Sahel. Exception faite de l’Algérie, les fragilités sociopolitiques, territoriales et sécuritaires font tâche d’huile chez les voisins de la Libye, faisant planer un risque sécuritaire transnational, du fait de la prolifération d’armes et de l’infiltration du terrorisme. Les conséquences sécuritaires de cette « guerre de second ordre » en Libye pose problème pour la résilience des Etats et des sociétés qui structurent le rivage sahélien. Il suffit de s’en référer à ce qui se passe au Mali, Niger, Nigeria, Tunisie, Egypte etc… pour comprendre la gravité de cette situation.
Les Occidentaux, responsables potentiels de ce tourbillon libyen, osent à l’heure actuelle prendre le large et osent aussi dénoncer cette guerre civile locale, qu’ils ont eux-mêmes provoqué, et d’en faire une propagande politique sans la moindre honte. Une stratégie en ligne d’évolution pour se déjuger de ce chaos. Tout Arabe sensé, peut comprendre ce que signifie cette « stratégie machiavélique » et à quoi elle tend. Que signifie donc le climat malsain actuel qui prévaut à Tripoli, Benghazi et presque dans tout le pays ? Cela signifie qu’on est en train de réduire en cendres toute la Libye et qu’on se tient loin de ce théâtre des opérations des milices.
Ces questions sécuritaires préoccupent actuellement l’Algérie, l’Egypte et la Tunisie. L’Algérie voisin occidental et l’Egypte voisin oriental de la Libye, suite à la récente visite du président al-Sissi à Alger et sa rencontre avec le président Bouteflika, semblent coordonner leurs actions face à cette évolution dangereuse, dans toute la région. Les deux présidents Bouteflika et al-Sissi semblent apparemment sur la même ligne, décidés à mettre en oeuvre des mesures pour résorber le chaos libyen. Il n’est pas impossible que cette volonté sécuritaire des deux chefs d’Etat, se traduise par une intervention armée conjointe.
A. Z.
http://www.tribunelecteurs.com/fichier/3_8_2014/coeur.html
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