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Par Mohamed Kouini
C’est la dégringolade la plus brutale jamais connue par la monnaie unique européenne depuis 2022. Après avoir atteint la parité avec le dollar, l’euro a plongé ce mercredi encore, dépassant toutes les prévisions les plus pessimistes. Le dollar américain valait plus d’un euro, une situation inédite depuis la création de la monnaie européenne en 2000.
Mardi, la valeur du billet vert était de 1,01 dollar pour un euro, soit une perte de 22% de sa valeur en un an. Un taux qui risque encore de s’élever ces jours ci, en raison de certains facteurs liés aux marchés américains et la volonté de la Réserve fédérale américaine de soutenir encore davantage le dollar.
Pour les experts, cette situation s’explique surtout par les inquiétudes du marché sur l’émergence d’une crise énergétique majeure sur le Vieux continent, notamment avec les nouvelles tensions sur le gaz russe et les travaux de maintenance sur le gazoduc Nord Stream 1.
L’Europe est entrain de faire les frais de son soutien aveugle aux Etats-Unis au détriment de ses intérêts nationaux dans le conflit en cours en Ukraine.
Cette situation alimente notamment les craintes de récession économique en Europe. Un simple arrêt de quelques jours des livraisons de gaz russes causerait une récession dans toute la zone euro. Les dégâts seraient incalculables, selon les experts, qui pensent que la zone euro connaîtra trois trimestres consécutifs de contraction de l’économie.
L’une des conséquences serait que la Banque centrale européenne (BCE) aura à faire face à une inflation galopante et la politique monétaire sera des plus difficiles pour éviter les déséquilibres sociaux.
Actuellement, les investisseurs achètent en masse du dollar, devenu valeur refuge, et profitent au maximum de cette situation. La Réserve fédérale américaine (Fed) veut poursuivre ses hausses des taux, alors que les chiffres de l’emploi publiés ce vendredi ayant montré que l’économie des Etats-Unis résiste mieux.
Qu’en est-il pour l’Algérie avec la chute de la valeur de l’euro ? Pour les analystes, c’est tout bénef pour le pays qui importe 60% de ses besoins en euros depuis l’Union européenne. En 2021, elle a importé pour 13 milliards d’euros soit près de 17 milliards de dollars. Si la dépréciation de l’euro continue encore, cela va permettre à l’Algérie et ses importateurs de réaliser de fortes économies en devises. C’est encore le Trésor public qui sera soulagé avec la baisse de la facture des importations algériennes depuis l’Union européenne. Le Trésor public compte ses recettes et ses dépenses en dollar.
Pour d’autres économistes, cette situation va permettre à Sonatrach d’augmenter ses exportations vers l’Union européenne (notamment avec l’Italie, la France, l’Espagne et l’Allemagne) qui sont actuellement de l’ordre de 11 milliards d’euros. La hausse des prix du gaz et du pétrole sur le marché international doublé d’une explosion de la demande dans la zone euro sur les produits énergétiques vont permettre à l’Algérie de renflouer encore davantage ses caisses.
Pour les sociétés algériennes versées dans l’importation de l’Europe, on se frotte les mains. Certains secteurs sont ciblés, comme l’agroalimentaire, les médicaments, les produits parapharmaceutiques, les produits cosmétique et de luxe.
Toutefois, aussi paradoxal que cela puisse paraitre, au marché informel du Square du Port Said, dans la capitale, l’euro maintient toujours ses valeurs, ne subissant aucun contrecoup de sa chute mondiale. Est ce par rapport à la forte demande des potentiels touristes algériens en partance en vacances en Tunisie? Rien n’est moins sûr.
Il est attendu vers la fin de cette année, si la chute se poursuit, une nette amélioration de la balance commerciale de l’Algérie et une préservation de ses réserves de change.
Le Jeune Indépendant, 13/07/2022
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