ONU – Sahara occidental : échec et mat au roi !

Cette résolution coïncide avec des batailles diplomatiques essentielles au niveau international, notamment en Europe. Son adoption à ce moment précis revêt une dimension stratégique réelle. Elle intervient quelques semaines avant le renouvellement du mandat de la Minurso par le Conseil de sécurité de l’ONU, dans un contexte de débats renouvelés sur son retour à sa mission initiale. Elle soulève également la possibilité que les USA, en leur qualité de porteurs de plume concernant les résolutions sur le Sahara occidental, tentent d'édicter des propositions de solutions hors du cadre onusien quelle qu'en soit la forme. Ou encore de vouloir accréditer une prétendue autonomie comme unique solution.

Très attendues après un fort activisme diplomatique et médiatique du Makhzen, et une agitation forcenée de ses mouches électroniques sur les réseaux sociaux, les conclusions de la 80e session de la Commission spéciale des questions politiques et de la décolonisation de l’ONU (la quatrième) ont nettement réaffirmé le caractère juridique et politique strict de la question du Sahara occidental. Autrement dit, c’est toujours une question de décolonisation inachevée, et c’est là la corroboration d’une sentence en parfaite harmonie avec les principes de la Charte de l’ONU et de la résolution 1514 (XV) de son AG en 1960, qui stipule l’octroi de l’indépendance aux peuples et territoires colonisés. Echec du Makhzen et échec et mat au roi M6 !

La résolution adoptée renforce la légitimité internationale de la cause du peuple sahraoui. Elle adresse en même temps un message politique puissant à un moment sensible, marqué par la multiplication des tentatives marocaines, avec le soutien diplomatique explicite ou implicite de Washington et de certaines capitales européennes, de faire avaliser une hypothétique «autonomie» au Sahara occidental. Une «autonomie» résultant d’un fait accompli colonial imposé par la force.

La résolution réaffirme le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination et à l’Indépendance, expression juridique claire qui exclut l’imposition de «solutions toutes faites» qui ne reposent pas sur la libre volonté du peuple concerné.

Elle réaffirme aussi la responsabilité des Nations unies envers les territoires sahraouis en tant que pays colonisé. Elle rappelle ainsi, et clairement, que le Sahara occidental demeure un territoire occupé et qu’aucune autre partie, qu’il s’agisse du Maroc colonisateur ou de tout autre acteur régional ou international, ne peut interférer avec son statut juridique.

Elle a salué également la poursuite du processus de négociation sous l’égide des Nations unies et confirmé que tout règlement doit se faire exclusivement dans le cadre des Nations unies, et non par le biais d’accords bilatéraux ou d’arrangements économiques détournés, comme certaines parties tentent de l’imposer. Elle a, par la même occasion, appelé les parties à coopérer avec le Comité international de la Croix-Rouge. Il s’agit là d’une clause humanitaire reflétant la conscience de la communauté internationale au sujet de l’instabilité de la situation humanitaire du peuple sahraoui qui exige le respect du droit international humanitaire, en particulier dans les territoires occupés.

Cette résolution coïncide avec des batailles diplomatiques essentielles au niveau international, notamment en Europe. Son adoption à ce moment précis revêt une dimension stratégique réelle. Elle intervient quelques semaines avant le renouvellement du mandat de la Minurso par le Conseil de sécurité de l’ONU, dans un contexte de débats renouvelés sur son retour à sa mission initiale. Elle soulève également la possibilité que les USA, en leur qualité de porteurs de plume concernant les résolutions sur le Sahara occidental, tentent d’édicter des propositions de solutions hors du cadre onusien quelle qu’en soit la forme. Ou encore de vouloir accréditer une prétendue autonomie comme unique solution.

C’est ainsi que cette résolution offre aux pays défenseurs des droits du peuple sahraoui un soutien juridique et politique solide pour plaider en faveur de l’inclusion, en termes clairs, du principe d’autodétermination dans le texte de la prochaine résolution du Conseil de sécurité. Et s’opposer ainsi à toute tentative de prescrire des solutions d’appui à l’occupation.

Dans le contexte purement européen, cette résolution intervient alors que l’UE et le Maroc ont amendé et mis en œuvre «provisoirement» l’accord de partenariat commercial, sans consulter le Parlement européen. Et surtout en violation flagrante des arrêts de la Cour de justice de l’UE affirmant que le Sahara occidental est un territoire distinct du Maroc. Et que les accords européens ne peuvent lui être appliqués sans le consentement du peuple sahraoui à travers son représentant légitime reconnu par la Cour européenne, le Front Polisario. Aussi, pourrait-on affirmer que la décision de la Quatrième Commission constitue une condamnation implicite, mais nette, de cette approche européenne extralégale. Une démarche violant le droit international et européen et perpétuant l’exploitation des ressources d’un territoire soumis aux règles de la décolonisation.

Pour sa part, la diplomatie américaine a progressivement évolué depuis 2020 vers un soutien à la proposition marocaine d’autonomie, notamment après l’annonce par l’Administration Trump de la reconnaissance de la prétendue «souveraineté marocaine» sur les territoires sahraouis. La nouvelle décision de la Quatrième Commission fixe donc des limites limpides à toute tentative américaine ou marocaine de sortir le conflit du contexte de la légitimité internationale. Etant donné qu’elle a affirmé qu’il s’agit d’une question de décolonisation, et non d’un différend de frontières, et que la seule solution légitime porte bel et bien sur l’organisation d’un référendum libre et équitable permettant au peuple sahraoui d’exprimer sa volonté.

Il est clair que l’Administration Trump cherche à imposer un «règlement politique» rapide qui transcende l’essence même du conflit, en promouvant la solution d’autonomie élargie présentée par le Maroc comme «la seule option réaliste». Sauf que cette proposition est fondamentalement en contradiction avec les résolutions des Nations unies qui ne reconnaissent aucune souveraineté marocaine sur les territoires sahraouis. Et alors même qu’elles envisagent toutes les options possibles, y compris l’indépendance totale.

Cette résolution de la Quatrième Commission de l’ONU n’est pas une simple réitération annuelle de la même position. C’est plutôt un message politique vigoureux contre les tentatives de contournement de la légitimité internationale. Un message d’autant plus incisif que la résolution a réaffirmé que la question du Sahara occidental demeure une question sans concessions de décolonisation, et que toute solution en dehors du cadre des Nations unies et du droit à l’autodétermination est juridiquement et politiquement invalide.

Cela dit, toute tentative de soustraire la question sahraouie du contexte rigoureux de la décolonisation ne ferait qu’aggraver la crise. Et accentuer immanquablement les tensions régionales, au vu notamment de l’implication croissante d’Israël dans la région et de la concurrence croissante entre les États-Unis, l’Europe et la Russie pour l’influence en Afrique du Nord.

Noureddine Khelassi

Le Soir d’Algérie,  21-10-2025, 11:00

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