Mots clés : Algérie, France, réconciliation, Emmanuel Macron, Abdelmadjid Tebboune,
L’ouverture du président français, Emmanuel Macron notamment à la reconnaissance du rôle de la France dans la colonisation de l’Algérie a marqué une rupture avec la position de ses prédécesseurs. Lors de sa candidature à l’élection présidentielle pour son premier mandat, Emmanuel Macron jeune candidat avait exprimé sa tentation de se rapprocher de l’Algérie.
Optant pour une relation apaisée, il aborde le passé et la colonisation de manière décomplexée, une sérénité peut-être due à son jeune âge, puisqu’il est né après l’indépendance de l’Algérie. En voyage en Algérie en février 2017, il qualifie la colonisation de « crime contre l’humanité » et de » vraie barbarie ». C’est une première : personne dans le milieu politique français n’est habitué à entendre de tels propos dans la bouche d’un candidat à l’élection présidentielle.
Les critiques sont nombreuses, émanant de la droite et de l’extrême droit. François Fillon, également en lice, juge ces paroles « indignes d’un candidat à la présidence de la République ».
Macron ne se laisse pas intimider pour autant : élu président, il multiplie les gestes mémoriels, reconnaissant, au nom de la Réublique française, que Maurice Audin a été torturé à mort par des militaires français et de sa mort a été rendue possible par un système légalement institué. C’est une déclaration très importante, puisqu’elle reconnaît un système mis en place à la faveur des « pouvoirs spéciaux », votés en mars 1956, qui permettent aux forces armées françaises, par les moyens qu’elles jugeaient nécessaires , d’entraver les droits individuels et de légitimer des centres de détention administratifs. Une fois de plus, la posture du président Emmanuel Macron est mise à l’index, et à la droite de l’échiquier politique on juge ses déclarations « inacceptables », s’apparentant à une repentance ».
Sur le dossier mémoriel et le passé colonial de la France, Macron dérange tous ceux qui pensent qu’en aucun cas il ne faut évoquer la part d’ombre du passé français. Qu’importe, le chef d’Etat français semble déterminé à aller plus loin en annonçant l’ouverture des archives de la guerre d’Algérie.
Le 20 juillet 2020, il confie à l’historien Benjamin Stora une mission sur « la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie ». Cependant, une vision d’incompréhension et de vérité persiste encore en France où des cercles politiques extrémistes tiennent à camoufler les crimes coloniaux de la France pendant plus de 132 années d’occupation.
L’Algérie farouchement indépendante aspire à une relation fondée sur le respect mutuel et l’égalité et la repentance de la France. L’héritage de l’exploitation économique et les questions non résolues concernant les biens culturels algériens alimentent le ressentiment national.
Il est dit que la France est aux prises avec ses propres difficultés internes liées à son identité d’intégration et à sa diaspora algérienne qui compte plus de 7 millions de personnes et qui représentent un pont entre les deux nations. Ces derniers dont beaucoup possèdent la double nationalité incarnent l’entrelacement complexe des cultures et des histoires. Ils contribuent significativement à l’épanouissement de la société française, enrichissant son tissu culturel, social et stimulant son économie.
Pourtant, ils se retrouvent souvent confrontés à la discrimination et aux préjugés en France. Les restrictions de visas ont d’ailleurs rendu les regroupements familiaux très difficiles et ont mis à rude épreuve les liens personnels. Ces mesures de rétorsion, d’autant plus que la mobilité de ses ressortissants a toujours été un motif de crispation récurrent dans les relations entre les deux pays. La crise au cours de ces dernières années a été réelle, réunissant les deux sources majeures de crispation entre les deux pays: la question mémorielle et la mobilité des Algérien, régulièrement utilisée comme un levier par Paris pour faire pression sur Alger.
De plus la rhétorique des nationalistes des politiques français a exacerbé les choses et alimenté un sentiment anti-algérien. Aujourd’hui, reconnaître les contributions de la diaspora algérienne et favoriser une société inclusive est un impératif moral et stratégique car une diaspora intégrée peut servir de moteur de réconciliation en favorisant des liens plus étroits et la compréhension mutuelle. Au-delà du poids de l’histoire et des complexités de la diaspora, l’Algérie et la France se trouvent liées par une réalité géopolitique commune. La région du Sahel est en proie aux insurrections terroristes, aux crimes organisés et à l’instabilité politique, représente une menace directe sur la sécurité des deux pays.
L’Algérie avec ses vastes frontières et son armée aguerrie est considérée comme un partenaire crucial dans la lutte contre le terrorisme et la France fortement investie dans la région par sa présence militaire et son aide au développement compte beaucoup sur le renseignement et la coopération de l’Algérie pour contrer la propagation de l’extrémisme, la montée de DAECH et de ses affiliés au Sahel conjuguée aux vastes frontières a ajouté à l’urgence de la coopération sécuritaire . Dans ce cadre, la France consciente de sa propre vulnérabilité aux attentats terroristes reconnaît l’importance stratégique d’une Algérie stable et coopérative. Une approche globale comprenant des mesures de sécurité, développement économique et inclusion sociale offrirait de meilleurs espoirs de stabilité et de paix à long terme dans toute la région.
Par ailleurs, la relation algéro-française ne se définit pas uniquement par les préoccupations sécuritaires et le poids de l’histoire, les intérêts économiques notamment dans le secteur de l’énergie ajoute une autre couche de complexité à l’équation. L’Algérie important producteur de pétrole et de gaz fournit une part importante des besoins énergétiques de l’Europe, la France particulièrement dépendante du gaz naturel algérien considère cette relation comme stratégiquement vitale.
Le Maghreb.dz, 06/04/2025
#Algérie #France
Be the first to comment on "Algérie-France : un pas vers la réconciliation"