La droite française sabote-t-elle la réconciliation avec l’Algérie ?

L’accueil d’un groupe séparatiste kabyle au Sénat français perçu comme une tentative de saboter les efforts de réconciliation entre Paris et Alger après une crise politique de plusieurs mois.

Watan – La droite française, connue pour son hostilité envers l’Algérie, a pris de court la visite prévue du ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, à Alger — programmée pour ce dimanche — par une initiative provocatrice visant à faire échouer toute tentative de résolution de la crise politique persistante entre Alger et Paris depuis juillet 2024. Ce jeudi, la sénatrice française Valérie Boyer a reçu une délégation du Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie (MAK), un groupe séparatiste dirigé par Ferhat Mehenni.

La rencontre a eu lieu au Sénat français, une institution officielle, ce qui semble être une tentative délibérée de conférer un caractère officiel à cet échange. Lors de cette réunion, Boyer a réaffirmé son soutien au MAK, classé comme organisation terroriste par l’Algérie depuis mai 2021, et dont les dirigeants font l’objet de demandes répétées d’extradition par Alger afin de les traduire en justice.

Valérie Boyer : Une dure à cuire qui façonne la politique française envers l’Algérie

Valérie Boyer, l’instigatrice de cette démarche, est l’une des figures les plus radicales du parti Les Républicains, situé à droite de l’échiquier politique français. Elle est également une pied-noir — descendante de colons français ayant quitté l’Algérie lors de l’indépendance — et connue pour ses positions intransigeantes, notamment son appel à criminaliser la négation de certains génocides, en particulier le génocide arménien, ce qui avait provoqué une rupture diplomatique durable entre la France et la Turquie.

Boyer est aussi proche du régime Assad en Syrie, défend constamment la communauté pied-noir et les collaborateurs français durant la guerre de libération de l’Algérie, et a rédigé une proposition de loi visant à criminaliser le Front de libération nationale algérien. Elle est également une fervente partisane d’Israël.

Une tentative de saboter la réconciliation ?

L’analyste politique Kamal Riyach estime que la décision de la droite française de rencontrer les dirigeants du MAK constitue une tentative délibérée d’entraver le processus de réconciliation politique engagé depuis neuf mois. Selon lui, cette initiative touche un point extrêmement sensible pour l’Algérie — le groupe séparatiste — et souligne le refus ou l’incapacité de Paris à agir contre le MAK et ses responsables. Riyach note que ce groupe bénéficie d’un fort soutien politique et médiatique de la droite française, notamment dans le contexte de la crise actuelle entre les deux pays. Il souligne que la nature et le calendrier de cette décision indiquent qu’il s’agit d’un acte calculé pour saboter la réconciliation.

Ce geste intervient dans un contexte politique tendu, marqué par des discours incendiaires de la droite française à l’égard de l’Algérie et par de nouveaux appels à expulser les migrants algériens, seulement quelques jours après un échange téléphonique entre le président algérien Abdelmadjid Tebboune et le président français Emmanuel Macron. Cet échange avait abouti à un accord sur plusieurs étapes pour résoudre la crise diplomatique. La réunion avec le MAK coïncide également avec la visite prévue du ministre des Affaires étrangères Barrot à Alger ce dimanche pour rencontrer son homologue algérien Ahmed Attaf, et précède la visite attendue du ministre français de la Justice Gérald Darmanin. Ces éléments laissent penser que la droite française cherche activement à faire échouer tout processus de normalisation politique et à bloquer toute issue favorable issue de ces rencontres de haut niveau.

Deux jours auparavant, le ministre algérien des Affaires étrangères Ahmed Attaf s’était entretenu par téléphone avec Barrot pour coordonner la visite à venir, dans le cadre des efforts de sortie de crise qui perdure depuis juillet 2024. Cette crise s’était intensifiée à la suite d’un entretien téléphonique entre les présidents Tebboune et Macron, qui avait permis d’aboutir à un ensemble de convergences politiques, incluant la reprise de la coopération en matière de migration et de mobilité, la relance de la coordination judiciaire et sécuritaire, et la réactivation immédiate des travaux de la commission mixte d’historiens franco-algériens. Les accords prévoyaient également la restitution des restes de résistants algériens et le développement des relations économiques et commerciales. Les deux présidents ont également discuté du cas de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, et ont convenu, de manière préliminaire, d’une rencontre bilatérale à une date non encore fixée.

Stratégie de la droite dans la crise algéro-française

Le chercheur en affaires politiques Jamal Khediri a estimé que ce développement était prévisible. Il a expliqué que la droite française ne voit aucun intérêt politique à résoudre les tensions avec l’Algérie. Au contraire, le maintien de cette crise sert son agenda politique, notamment à l’approche de l’élection présidentielle dans deux ans. La droite considère l’Algérie comme une carte électorale utile à agiter pour attiser le sentiment nationaliste. Khediri a rappelé comment ce courant politique avait su instrumentaliser le rejet de l’immigration lors des élections de 2007, qui ont vu l’ascension de Nicolas Sarkozy. Il a mis en garde contre d’autres provocations à venir contre l’Algérie, la droite comptant sur son influence dans des institutions françaises telles que la justice, les médias et le gouvernement.

La crise entre l’Algérie et la France a explosé le 5 juillet 2024, lorsque l’Algérie a décidé d’abaisser le niveau de ses relations diplomatiques et de rappeler immédiatement son ambassadeur, après que le gouvernement français a officiellement soutenu le plan marocain d’autonomie pour le Sahara occidental. Le 16 novembre 2024, la crise s’est aggravée lorsque les autorités algériennes ont arrêté l’écrivain Boualem Sansal à son retour de Paris. La France a alors durci sa position, en réaction au refus de l’Algérie de coopérer dans le rapatriement des migrants algériens expulsés, allant jusqu’à imposer des restrictions de voyage aux responsables algériens détenteurs de passeports diplomatiques.

Source : Watan Serb

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