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Résumé
Le Maroc et le Panama ont entamé un rapprochement diplomatique en 2013 après des déclarations favorables du ministre panaméen des Affaires étrangères, Fernando Núñez Fábrega, sur la proposition marocaine d’autonomie du Sahara occidental. Ce rapprochement a conduit à des échanges diplomatiques et commerciaux, notamment dans le secteur des phosphates. En 2014, le Panama a ouvert une ambassade à Rabat et a suspendu ses relations avec la République arabe sahraouie démocratique (RASD). Cependant, un scandale a éclaté concernant une donation marocaine de 3 000 tonnes de fertilisants, dont le stockage au port panaméen a engendré un coût d’un million de dollars. L’ambassadeur panaméen en poste à Rabat à l’époque, Demetrio Olaciregui, n’avait laissé aucune trace de cette transaction. En 2022, la presse panaméenne a soulevé la disparition inexpliquée de cette cargaison, entraînant des interrogations sur sa gestion et son utilisation réelle.
Le journaliste Demetrio Olaciregui, premier contact du Maroc au Panama
Selon une note diplomatique datée du 21 juin 2013 intitulé » Perspectives dans le développement des relations entre le Maroc et le Panama / Projet de visite au Maroc du Ministre panaméen des Relations Extérieures », des contacts entre le Maroc et le Panama ont été initiés au lendemain de la publication, le 31 mars 2013, d’un article de presse du journaliste panaméen, M. Demetrio Olaciregui, qui a rapporté des déclarations positives que le Ministre des Relations Extérieures du Panama, M. Fernando Nuñez Fabrega, lui aurait accordé à l’endroit du Maroc et de notre Cause Nationale. Selon ces articles, M. Fernando Nuñez Fabrega, investi, le 26 février 2013, en tant que nouveau Ministre des Relations Extérieures aurait affirmé que son pays « soutient le processus de négociations sur le Sahara sous les auspices des Nations Unies, dans le respect de l’intégrité territoriale du Royaume », en soulignant, entre autres, que le plan marocain d’autonomie constitue « une initiative qui devrait être abordée par les parties avec un esprit d’ouverture, de pragmatisme et de réalisme » ; des propos qui marqueraient une certaine prédisposition des responsables panaméens à se détacher du discours qu’ils ont tenu, jusque-là, sur la question du Sahara.
« Une dynamique de rapprochement en direction du Panama a, ainsi, aussitôt été engagée, à travers M. Demetrio Olaciregui Quintero, qui a été nommé le 22 avril 2013, en tant que nouveau « Directeur Général de l’Information Diplomatique » au sein du Ministère panaméen des Relations Extérieures, sachant qu’il s’est toujours estimé être, pendant ces dernières années, le seul à même d’apporter des éléments nouveaux favorables à la défense de notre Cause Nationale au Panama et à l’ouverture d’une nouvelle page dans les relations bilatérales avec le Maroc », indique la note.
« Dans cette logique de rapprochement, et à l’instigation de M. Demetrio Olaciregui, le Ministère panaméen des Relations Extérieures a par la suite publié, le 08 mai 2013, un communiqué précisant que « le Gouvernement panaméen considère que la proposition d’un statut d’autonomie pour le Sahara Occidental, présenté par le Royaume du Maroc au Conseil de Sécurité de l’ONU, mérite d’être traitée avec ouverture, pragmatisme et réalisme sur la table des négociations, afin de faire sortir ce différend de son statut actuel ». Le même communiqué, qui « exhortait les parties à faire preuve de volonté politique et de bonne foi pour parvenir à des accords mutuellement acceptables », signalait, entre autres, que « le Panama reconnaît que la solution au différend sur le Sahara Occidental constitue une demande urgente de la communauté internationale, du fait que la situation d’instabilité dans la région du Sahel représente une menace pour les pays voisins et compromet le bien être futur de leurs populations », ajoute-t-on.
Le président panaméen contacté par la DGED
« Suite à ce communiqué, affirme cette note, les contacts avec la partie panaméenne se sont poursuivis, à travers M. Demetrio Olaciregui, notamment en marge de la 43ème session de l’Assemblée Générale de l’Organisation des Etats Américains tenue au Guatemala du 04 au 06 juin 2013, et à laquelle le Maroc a pris part. Il convient de préciser que ces contacts sont intervenus dans le prolongement d’une rencontre, tenue auparavant à La Haye, entre des agents de la DGED et le Président panaméen, M. Ricardo Martinelli, à l’occasion de la récente visite qu’il a réalisé aux Pays-Bas, en compagnie de son Ministre des Relations Extérieures, dans le cadre d’une tournée l’ayant mené dans divers pays européens, dont notamment en France ».
« Lors de la rencontre au Guatemala, le Ministre panaméen des Relations Extérieures, à qui une invitation verbale a été formulée pour qu’il effectue une visite au Maroc, a exprimé sa disposition pour la réaliser, à compter du 30 juillet 2013, en précisant qu’elle pourrait éventuellement s’étendre sur une période de trois jours jusqu’au 01er ou 02 août, en fonction de son agenda, ce, afin d’initier une dynamique à même de permettre l’ouverture d’une nouvelle page dans les relations bilatérales entre le Maroc et le Panama. Cette visite interviendrait suite à un déplacement du Ministre panaméen des Relations Extérieures en Grande Bretagne le 29 juillet 2013 », précise-t-on.
La note signale que « la partie panaméenne a, à cette occasion, fait part du souhait de pouvoir bénéficier de la mise en place d’une coopération bilatérale en matière de phosphates, avec, entre autres, la livraison d’un chargement de 30.000 tonnes de phosphates à un prix préférentiel, en plus de la réactivation des projets d’accords de coopération actuellement en instance entre le Maroc et le Panama, notamment en matière portuaire, maritime, et commerciale ».
« Suite à cette rencontre, le Ministère panaméen des Relations Extérieures a publié, le 19 juin 2013, un communiqué annonçant, entre autres, que le chef de la diplomatie panaméenne, M. Fernando Nuñez Fabrega, se rendra en visite officielle au Maroc, fin juillet 2013, pour poursuivre le processus de renforcement des relations bilatérales. Le même communiqué précise également que l’un des thèmes qui sera débattu à Rabat est « l’ouverture d’une Ambassade du Panama au Maroc » ».
« Aussi, et à la lumière de ces éléments, il va sans dire que le Panama semblerait vouloir montrer qu’il marque un meilleur intérêt pour le Maroc, en multipliant les déclarations positives sur la question du Sahara et sur les perspectives pour l’établissement d’une coopération dans divers secteurs porteurs, mais tout en s’abstenant d’évoquer l’éventualité d’un retrait de la reconnaissance de la pseudo « RASD » ».
« Cette Direction estime ainsi qu’il serait tout indiqué de s’assurer des véritables intentions du Ministre panaméen des Relations Extérieures avant l’éventuelle réalisation de sa visite au Maroc et l’envoi d’une invitation par notre pays dans ce sens, de manière à déterminer, dans un premier temps, si le Panama est réellement disposé à adopter un changement de la position officielle qu’il maintient actuellement sur la question du Sahara, en contrepartie de l’établissement d’une coopération bilatérale fructueuse, sachant que ce pays reconnaît toujours la pseudo « RASD ». Les instructions de Monsieur le Ministre sont sollicitées en l’objet ».
Le Panama suspend ses relations avec la RASD
Dans un communiqué du 20 novembre 2013, le gouvernement panaméen, dirigé par Ricardo Martinelli, du parti Cambio Democrático, a décidé de suspendre les relations diplomatiques avec la République arabe sahraouie démocratique « jusqu’à la conclusion du processus de paix, initié et médiatisé par les Nations unies ». Cette décision a été vivement dénoncée par le Parti révolutionnaire démocratique (PRD) et par d’autres organisations non gouvernementales, telles que le Collectif de femmes Diana Morán (FRENADESO).
Le 18 avril 2014, l’ambassade du Panama à Rabat est inaugurée et Demetrio Olaciregui est nommé ambassadeur. Le 1er juillet 2014, il est remplacé par M. Pablo Garrido Arauz, à l’occasion de l’investiture du nouveau président Juan Carlos Varela, du « Parti panaméen », opposé au gouvernement sortant.
Le 25 avril, le ministre panaméen des Affaires étrangères, Alvaro de Soto, communique avec son homologue et l’invite à se rendre au Panama ainsi qu’à y ouvrir une ambassade.
Le 23 septembre 2014, le nouvel ambassadeur du Panama au Maroc, Pablo Garrido Arauz, lors d’une rencontre avec le ministre marocain des Affaires étrangères, a informé avoir reçu des instructions de son ministère pour traiter en urgence une donation d’environ 3 000 tonnes d’engrais (156 conteneurs), dont le stockage au port a engendré, depuis plus de deux mois, un coût total d’un million (1 000 000) de dollars américains, que le gouvernement panaméen est incapable de payer aux autorités portuaires privées.
Selon une autre note, Garrido Arauz affirme avoir été instruit par son Ministère afin d’effectuer une démarche urgente auprès du Ministère marocain des affaires étrangères notre Département pour l’informer de ce qui suit :
– Le Maroc a bien voulu offrir au Panama un don de près 3000 tonnes de fertilisants (156 conteneurs) livrées depuis plus de deux mois et se trouvant actuellement dans un port panaméen.
– Ce don a été accordé avant l’investiture, le 1er juillet 2014, de l’actuel Président panaméen, M. Juan Carlos Varela et la mise en place du nouveau gouvernement du Panama, sachant que la livraison de ces fertilisants a été gérée par l’ex-Ambassadeur du Panama à Rabat, M. Demetrio Olaciregui, qui, avant son départ définitif du Maroc, n’en aurait laissé aucune trace au niveau de son Ambassade et n’en aurait pas informé son successeur, l’actuel Chargé d’affaires a.i. panaméen.
– Le Ministère panaméen des Relations Extérieures, vient à peine de s’enquérir de ce don et n’en avait jamais été informé auparavant, sachant que cette livraison de fertilisants aurait été coordonnée à travers l’Agence Marocaine de Coopération Internationale, avec l’entremise de l’ex-Ambassadeur panaméen à Rabat.
– En conséquence, l’entreposage de ces 156 conteneurs de fertilisants au port a engendré, depuis plus de deux mois, un coût total de 1.000.000 (un million) de dollars US, que le gouvernement panaméen est dans l’impossibilité de régler aux autorités portuaires privées.
– Le Chargé d’affaires a.i. a indiqué que la seule solution préconisée par son Département pour éviter que les frais d’entreposage au port ne puissent s’élever davantage consiste à revendre ces fertilisants à une compagnie privée, à un prix presque dérisoire, afin de permettre le paiement du montant de 1.000.000 de dollars que le Gouvernement panaméen doit régler aux autorités portuaires.
– Aussi, le Ministère panaméen des Relations Extérieures souhaite vivement connaître l’avis de notre Département quant à la solution proposée, sachant qu’il n’entreprendrait pas une telle démarche si elle venait à être interprétée par notre pays comme un geste abusif ou inamical, en tenant compte du fait que seule cette revente est de nature à débloquer l’impasse administrative et financière face à laquelle ce pays se trouve actuellement confronté.
« Il convient de signaler qu’une rencontre bilatérale entre Monsieur le Ministre et la Vice-présidente et Ministre des Relations Extérieures du Panama, Mme Isabel de Saint Malo de Alvarado, a été dollicitée à New York en marge des travaux de la 69ème session de l’Assemblée Générale des Nations Unies, et qu’elle constituera l’occasion de traiter de cette question ; les autorités panaméennes souhaitant obtenir une prompte réponse en l’objet. Les instructions de Monsieur le Ministre sont sollicitées en l’objet », conclue la note.
En 2022, la presse panaméenne a relancé le sujet du chargement de ces engrais, qui semblaient avoir disparu du port et dont l’emplacement reste inconnu.
Selon le journal El Siglo, « ce chargement, d’après l’avocat Guillermo ‘Willie’ Cochez, a été transporté dans 141 conteneurs de 20 pieds, emballé dans 56 400 sacs de 50 kilogrammes. Le Maroc a payé le coût et le fret de ce don, estimé à 4 millions de dollars ».
« Cochez, dans une note datée du 25 octobre et adressée au ministre du Développement agroalimentaire (MIDA), Augusto Valderrama, demande à obtenir des informations sur l’emplacement de ce don onéreux », ajoute El Siglo dans son édition du 21 octobre 2022.
Parmi les cinq questions adressées au haut fonctionnaire figure celle-ci : « Existe-t-il, dans les registres du MIDA, une preuve indiquant dans quelles installations de cette entité, désormais sous votre responsabilité, ces engrais ont été stockés et pendant combien de temps ? »
Il est également demandé s’il existe des preuves que ces engrais ont bien été distribués gratuitement aux agriculteurs les plus démunis du pays, comme c’était l’objectif initial du don du Maroc.
D’autres questions concernent l’éventuelle existence d’une plainte déposée par le MIDA et l’identification des fonctionnaires du gouvernement précédent qui auraient été considérés comme suspects d’une quelconque irrégularité.
Une source du MIDA a indiqué que, pour le moment, aucune information ne peut être communiquée, car cela nécessiterait une enquête des autorités compétentes, seules habilitées à fournir ces réponses, conclut le journal.
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