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« …la France n’est pas en retrait en Afrique, elle est simplement lucide et en train de se réorganiser. » — Le président français Emmanuel Macron dans son discours à la 30e Conférence des ambassadeurs à Paris (lundi 6 janvier 2025)
Quelques heures après cette déclaration, extrapolée à partir d’une heure et quelques minutes de discours de Macron, elle a été interprétée par les experts comme une confirmation des révélations du président de la République du Niger, le général Abdourahmane Tiani, sur les intentions de la France de recoloniser l’Afrique. Selon Tiani, le plan de jeu de la France est résumé dans sa proposition secrète de créer un nouveau commandement militaire pour l’Afrique : le Commandement pour l’Afrique.
Cette mission, révèle-t-il, est menée par Jean-Marie Bockel (envoyé personnel de Macron pour l’Afrique) et le duo formé par le colonel David Pawlowski et le lieutenant-colonel Paul Menon-Bertheux. Pour ce faire, la France, a-t-il ajouté, dispose de bases dans la ville de Porga, en République du Bénin (frontière avec le Burkina Faso), dans le parc national de la Pendjari (frontière avec le Togo), dans le lac Tchad dans l’axe Baga de l’État de Borno et dans la forêt de Gaba à l’est de Sokoto.
L’existence de ces deux dernières bases a été contestée par le gouvernement nigérian. Cependant, Tiani a affirmé que le 4 mars 2024, la France et l’ISWAP ont signé un protocole d’accord pour établir une base pour Lakurawa dans la forêt de Gaba afin de desservir les États de Sokoto, Zamfara et Kebbi.
Macron a affirmé que le départ annoncé des bases françaises aurait été négocié entre les pays africains, qui l’ont décrété, et la France. Il estime que la France s’est volontairement retirée de certains pays d’Afrique de l’Ouest par simple commodité et politesse. « Nous avons proposé cette réorganisation. Par politesse, nous leur avons laissé la primauté de l’annonce. Mais ne vous y trompez pas, c’est nous qui avons pris cette décision, et parfois nous avons dû les pousser. »
« Nous avons pris cette décision ensemble », déclare-t-il, soulignant « qu’aucun pays africain ne serait souverain aujourd’hui si la France ne s’était pas déployée ».
Mais le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko a réagi en démentant la déclaration de Macron : « Je voudrais dire que, dans le cas du Sénégal, cette déclaration est complètement erronée. Aucune discussion ni négociation n’a eu lieu à ce jour et la décision prise par le Sénégal découle de sa seule volonté, en tant que pays libre, indépendant et souverain.
« Notons que la France n’a ni la capacité ni la légitimité d’assurer la sécurité et la souveraineté de l’Afrique. Au contraire, elle a souvent contribué à déstabiliser certains pays africains comme la Libye avec des conséquences désastreuses constatées pour la stabilité et la sécurité du Sahel.
« C’est enfin le lieu de rappeler au président Macron que si les soldats africains, parfois mobilisés de force, maltraités et finalement trahis, n’avaient pas été déployés pendant la Seconde Guerre mondiale pour défendre la France, ils seraient peut-être encore aujourd’hui allemands », conclut Sonko.
Comme l’a justement souligné Sonko, la France est à la merci de nombreux pays africains et de ses soutiens occidentaux, comme les États-Unis. Pourtant, elle est toujours insolvable en raison d’une « dette publique élevée », dans un contexte « d’économie européenne à revenu élevé, avancée et diversifiée, et d’utilisateurs de l’euro, de secteurs touristiques, de construction aéronautique, pharmaceutiques et industriels forts ».
Ses « efforts continus de réforme des retraites » et sa transition « vers une économie verte via la stratégie « France 2030 » » (voir le rapport de la CIA) ne l’ont pas encore sorti de son dilemme ; c’est pourquoi il a besoin de l’Afrique, en particulier de l’Afrique de l’Ouest, qui a bien rempli sa fonction avant que le Burkina Faso, le Mali et la République du Niger ne lui tournent le dos et ne quittent l’union de la CEDEAO.
En se basant sur le principe de Pareto, qui stipule que 80 pour cent du résultat d’une situation ou d’un système donné est déterminé par 20 pour cent de l’apport, les pays de l’AES (Burkina Faso, Mali et République du Niger) représentent 15 pour cent de la CEDEAO et influencent la manière dont le pendule de l’intégration régionale va osciller.
Le discours d’Emmanuel Macron et les réactions qui ont suivi révèlent la complexité des relations entre la France et l’Afrique. Si la France présente ses actions comme respectueuses de la souveraineté africaine, les allégations d’ambitions néocoloniales persistent. Les fondements économiques des politiques françaises, associés à la dynamique régionale, suggèrent une lutte multiforme pour l’influence et l’autonomie. Il semble que la France soit en train de se venger.
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