L’Algérie et le Maroc en campagne pour le poste de vice-président de l’UA

"Étant donné le niveau de tension entre l'Algérie et le Maroc, tristement illustré par la bagarre entre les diplomates des deux pays à Tokyo, on peut imaginer qu'ils ne feront pas dans la dentelle," prédit François Soudan, directeur du magazine panafricain Jeune Afrique.

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Les experts prédisent que la compétition entre le Maroc et l’Algérie sera tout sauf pacifique, les représentants des deux pays étant connus pour en venir aux mains, littéralement.

L’Algérie mène une campagne ambitieuse pour obtenir le poste de vice-président de la Commission de l’Union africaine (UA), visant à réaffirmer son leadership en Afrique après des années de retrait politique.

Alors que le sommet de l’UA de février approche à grands pas, le président algérien Abdelmadjid Tebboune a déployé une délégation de haut rang composée de trois ministres pour une tournée diplomatique afin de rallier des soutiens à la candidature de l’Algérie, représentée par l’ambassadrice Salima Malika Haddadi. Proche alliée de Tebboune, Haddadi est actuellement la représentante permanente de l’Algérie en Éthiopie et auprès de l’Union africaine.

La campagne a vu les responsables algériens parcourir le continent, rencontrant des dirigeants en Zambie, en Érythrée, au Burundi, en Ouganda et en Éthiopie pour promouvoir la candidature de Haddadi et la vision de l’Algérie pour l’UA.

Tebboune a également accueilli récemment à Alger le président sudafricain Cyril Ramaphosa, l’un des membres les plus influents du bloc.

S’exprimant depuis Addis-Abeba, le ministre des Affaires étrangères algérien Ahmed Attaf a présenté la candidature de son pays comme « un impératif moral ».

« Ce n’est pas une quête de prestige vide ou de vanité politique, » a-t-il déclaré le 17 décembre. « L’engagement de l’Algérie découle d’un désir sincère de servir l’Afrique en cette période de crise profonde et d’incertitude mondiale. »

Israël et le Polisario : l’agenda de l’Algérie à l’UA

La campagne de l’Algérie s’inscrit également dans ses différends avec certaines des récentes décisions de l’UA, notamment la décision controversée de 2021 d’accorder à Israël le statut d’observateur.

Israël a obtenu ce statut après près de 20 ans d’efforts diplomatiques pour intégrer le bloc. À l’époque, le président de la Commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat, avait défendu la décision, affirmant que le processus de paix entre la Palestine et Israël devait inclure toutes les parties. La Palestine bénéficiait déjà d’un statut d’observateur à l’UA.

En 2023, l’UA a suspendu le statut d’observateur d’Israël face aux protestations de pays comme l’Afrique du Sud et l’Algérie, qui s’opposaient à la présence de responsables israéliens dans les rassemblements panafricains alors que Tel Aviv poursuit un génocide dans la bande de Gaza.

Si l’Algérie obtient le poste de vice-président de l’UA, elle devrait également plaider pour l’un de ses alliés de longue date dans la région : le Front Polisario, un mouvement indépendantiste au Sahara occidental.

L’Algérie soutient le Front depuis des décennies dans sa lutte contre le Maroc, qui considère ce territoire disputé comme le sien.

Rabat s’était retiré du bloc panafricain en 1984 après l’admission du Polisario comme membre sous l’État contesté de la « République arabe sahraouie démocratique ».

Cependant, le Maroc a réintégré le bloc en 2017 pour « défendre » sa position depuis l’intérieur de l’Union africaine, sans toutefois reconnaître le Front sahraoui.

Les responsables marocains ont même menacé d’expulser le Front de l’Union alors que Rabat gagne en influence sur le continent.

Maroc contre Algérie lors de l’élection à l’UA

Les experts prévoient que la compétition entre le Maroc et l’Algérie sera tout sauf pacifique, les représentants des deux pays ayant littéralement échangé des coups par le passé.

« Étant donné le niveau de tension entre l’Algérie et le Maroc, tristement illustré par la bagarre entre les diplomates des deux pays à Tokyo, on peut imaginer qu’ils ne feront pas dans la dentelle, » prédit François Soudan, directeur du magazine panafricain Jeune Afrique.

Le 24 août, une bagarre a éclaté entre des diplomates algériens et marocains lors de la TICAD, une conférence sur la coopération afro-japonaise tenue à Tokyo.

Une vidéo montre un représentant marocain sautant sur une table pour s’emparer d’une plaque portant l’inscription « République sahraouie », placée par Lamine Baali, « ambassadeur de la République sahraouie » auprès de l’Union africaine. Baali serait entré à la réunion avec un passeport diplomatique algérien, Tokyo ne reconnaissant pas cette entité.

Un diplomate algérien est intervenu, plaquant le représentant marocain au sol. Bien que séparés, les deux ont continué à échanger des hostilités verbales.

La course pour le poste de vice-président ne se limite pas à l’Algérie et au Maroc. D’autres candidats d’Afrique du Nord, qui doivent occuper ce rôle en 2025, sont également en lice pour cette position.

L’économiste égyptienne Hanan Morsy et la diplomate libyenne Najat Hajjaji présentent de solides qualifications, avec une vaste expérience aux Nations Unies et à la Banque africaine de développement. Leurs candidatures pourraient séduire de nombreux pays africains désireux d’éviter de prendre parti dans les querelles entre l’Algérie et le Maroc.

Source : The New Arab, 23/12/2024

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