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Par Samia Benajla
“Parler de paix tout en pensant à la guerre”
Depuis le 20 mai 1973, il y a une guerre de suprématie au Sahara occidental, menée par le Makhzen.
Des milliers de personnes sont mortes durant ces trente neuf dernières années à la suite de l’occupation du territoire par les troupes marocaines.
Si la question du Sahara occidental pouvait trouver une solution maghrébine avant la signature, en novembre 1975, de l’accord tripartite, la “marche verte” de Hassan II organisée en vue de l’occupation du territoire contesté, a donné une dimension internationale au conflit sur lequel la Cour internationale de justice a eu à se prononcer à la demande de Rabat.
Dans son avis, la CIJ n’a trouvé aucun lien juridique voire historique susceptibles de rattacher le Sahara occidental au Maroc, lui-même au prise avec un bled Es-siba dans le sud du pays.
D’ailleurs, au moment de l’indépendance du Maroc en mars 1956, des personnalités de l’Armée de libération marocaine avaient refusé de déposer les armes tant que Tarfaya, Ifni, Ceuta et Mellila, n’auront pas été libérées de la domination espagnole.
Le Sahara occidental n’ayant pas été considéré comme une partie du territoire marocain à libérer, malgré les incessantes revendications de Allal El Fassi pour la récupération de e qu’il appelait “les territoires spoliés”, citant en juin 1956, “Tanger, le Sahara sous influence espagnole et française, de Tindouf à Colomb Béchar, Touat, Kenadza et l’ensemble de la Mauritanie”.
Si Tanger a été récupérée huit mois après la proclamation de l’indépendance du Maroc, elle est restée sous un statut spécial jusqu’en 1960, Tarfaya ne lui a été restituée qu’en 1958 et Ifni est demeurée sous la tutelle espagnole jusqu’au 30 juin 1969 par une décision de l’ONU qui considérait ce territoire non autonome.
L’armée de libération marocaine dans son refus de rendre les armes, parce qu’elle considérait l’indépendance du Maroc incomplète, n’avait revendiqué ni les territoires algériens ni le Sahara occidental ni la Mauritanie que le roi Hassan II a fini par reconnaître en 1969.
Le roi Mohamed V lui-même ne commençait à s’intėresser au Sahara occidental qu’en 1958 devant les fortes pressions de Allal El Fassi et de son parti l’Istiqlal, et au moment où la France avait créé l’Ocrs (organisation commune des régions sahariennes).
En tout cas, cette “revendication” des populations, des tribus qu’il a nommées, et non de la terre, avait laissé planer le doute sur la position officielle du trône. D’autant que Mohamed V, dans une déclaration faite au journal français “Le Monde” du 9 mars 1956, quelques jours seulement après la proclamation de l’indépendance, affirmait :
“… Nos efforts seront sans effets tant que le sol national restera morcelé, soumis à des statuts et des régions divers, et cela en dépit de la maturité du peuple marocain et de la conscience qu’il a prise de la nécessaire réunification du pays , ne se trouve-t-il pas déjà uni le peuple autour du même trône , sous le même drapeau, dans cette communion de sentiments qu’inspire l’appartenance à la même nation.”
Tout est dit. Mohamed V ne semblait se préoccuper que des zones reconnues marocaines occupées par l’Espagne (Ifni, Ceuta, Melilla, Tarfaya).Il ne formule aucune prétention explicite sur la Saguiet El Hamra et le Rio de Oro. Et le 27 mars 1956, il confirme :
“Le Maroc va réaliser son unité à l’intérieur de ses frontières historiques (…). L’unité du Maroc est en marche. Il n’y aura plus de zone (…). Il ne reste plus maintenant qu’à consacrer par des accords politiques et juridiques son unité déjà pratiquement réalisée.”
Curieusement, cette déclaration a été faite quelques jours seulement avant son départ en Espagne où il devait rencontrer le général Franco.
Du reste, le Makhzen ne formule aucune protestation lorsque l’Espagne et la France menèrent une opération militaire sanglante, l’opération Ecouvillon, en février 1958, le Maroc se préoccupait de négocier le retour de Tarfaya à la mère patrie.
En vérité, depuis la fin des années 50, le problème du Sahara est devenu un problème de politique intérieure marocaine qui aurait pu coûter son trône à Hassan II devant l’intransigeance des partis politiques sur les questions des libertés publiques. La revendication du Sahara occidental a soudé, de gré ou de force, l’unité nationale.
De la même manière que l’Algérie, le Maroc confronté à une profonde revendication démocratique venant de partisans d’une monarchie constitutionnelle et de républicains cherche, en excitant le nationalisme de ses ressortissants, à réaliser, comme l’avait fait Hassan II en 1975, une sorte d’union sacrée.
Le seul moyen d’y parvenir est d’accuser l’Algérie non seulement d’empêcher la “réunification” du Maroc de tentatives d’agression. Aussi, seule façon, aujourd’hui, de sortir de ce conflit est de se conformer aux résolutions pertinentes des Nations Unies, notamment la résolution 1514 (XV) du 14 décembre 1960, la résolution du Comité spécial de l’ONU du 16 octobre 1964, les résolutions 2229 (XXI) du 20 décembre 1966, 2354 (XXII) du 19 décembre 1967, 2428 (XXIII) du 18 décembre 1968, 2591 (XXIV) du 16 décembre 1969, 2711 (XXV) du 19 janvier 1971, 2883 (XXVII) du 14 décembre 1972, 3162 (XXVIII) du 14 décembre 1973 et toutes celles qui les ont suivi…
Toutes les résolutions, sans exception, ont réaffirmé “leur attachement au principe de l’autodétermination et leur souci de voir appliquer ce principe dans un cadre qui garantisse aux habitants du Sahara sous domination espagnole l’expression libre et authentique de leur volonté”.
Le départ de l’Espagne en 1975 n’a changé en rien la position de l’ONU quant au statut du Sahara occidental qui demeure un territoire sous domination.
Les manoeuvres dilatoires du Maroc ne changeront rien au problème qui est celui de l’indépendance du territoire par la voie du référendum.
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