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Amar Belani au JI : « L’exploitation politique de African Lion par le Maroc est sérieusement affectée »
Par S. Ould Brahim
L’envoyé spécial chargé du dossier du Sahara occidental et du Maghreb au ministère des affaires étrangères, Amar Belani, a souligné dans un entretien au Jeune Indépendant que désormais « l’exploitation politique et médiatique de ces exercices par le Maroc est sérieusement et durablement affectée ».
Le diplomate réagit, dans cet entretien, à l’annonce faite mardi par le général Stephen J.Townsend, commandant en chef du Commandement des Etats Unis d’Amérique pour l’Afrique que le Congrès a exigé de l’Africom de déplacer le lieu des manœuvres militaires « African Lion » du Maroc vers un autre pays sur le continent africain.
Le Jeune Indépendant: Le Pentagone a décidé de déplacer les manœuvres de Lion Africa, conduite par l’Africom hors du Maroc, quelle lecture faite-vous de cette décision?
Amar Belani: Tout d’abord, il faut rendre un vibrant hommage au sénateur James Inhofe, et ses autres collègues influents de la commission des forces armées, dont le sénateur Mike Rounds, pour leur ténacité et leur engagement actif en faveur de la décolonisation du Sahara occidental.
Le Maroc doit se rendre à l’évidence que l’exploitation politique et médiatique éhontée de l’exercice militaire African Lion est sérieusement et durablement affectée par la tournure des débats qui ont eu lieu au cours de l’audience de confirmation des candidats à la direction du Commandement Afrique et du Commandement des opérations spéciales.
Selon les différentes déclarations faites par les membres de la commission des forces armées du Senat américain, le Pentagone est appelé à plancher sur la diversification, la rotation et la recherche de lieux alternatifs pour les prochaines éditions du plus grand exercice militaire en Afrique même si quelques modules pratiques pourraient éventuellement se tenir, dans un cadre dérogatoire, sur le territoire du Maroc, à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues.
Le makhzen a toujours puisé autour de la tenue de ces exercices annuels pour se construire une puissance régionale factice. La diplomatie marocaine a longtemps usé et abusé de African Lion. Comment voyez-vous la suite étant donné que ces exercices se déroulaient pas loin d’un territoire occupé et en guerre, et dans une région sous tension ?
Nonobstant les raisons géopolitiques et d’influence qui se recoupent avec cette volonté américaine de diversifier les sites et les pays hôtes de l’exercice en question, il est clair que les campagnes de propagande et de manipulation marocaines sur la prétendue « consécration de la reconnaissance américaine du Sahara marocain” comme le déclarait benoîtement l’ancien premier ministre marocain, El Otmani, sont désormais périmées.
Le deuxième message important, est que le blocage planifié et systématique par le makhzen institutionnel du processus de règlement politique de la question du Sahara Occidental a un prix à payer, que les leviers de pression existent et que rien n’est gratuit en politique.
Les conditions inacceptables posées, encore récemment, par le Maroc pour entraver le projet de visite de l’envoyé personnel, Staffan De Mistura, dans les villes occupées de Laayoune et Dakhla finiront par susciter davantage de pressions salutaires sur la partie qui veut résolument faire capoter les efforts du Secrétaire Général de l’ONU et de son envoyé personnel, afin de perpétuer le fait colonial dans un territoire occupé militairement en violation flagrante du droit international.
Pensez-vous que le Maroc va activer ses réseaux et ses appuis pour faire capoter cette décision en vue de maintenir le statu quo dans la région que ce soit la tension avec l’Algérie ou le blocage sur la question sahraouie?
Il est évident que ces lobbies, divers et variés, seront activement actionnés ; il est cependant prématuré d’en évaluer les résultats hypothétiques.
Le Jeune Indépendant, 27 juil. 2022
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