Algérie – Espagne : La crise est là pour rester

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L’Algérie a nommé un nouvel ambassadeur en France et c’est à Madrid plutôt qu’à Paris que la nouvelle suscite le plus d’intérêt.
La raison en est que le nouveau chef de la plus importante mission diplomatique algérienne à l’étranger n’est autre que Saïd Moussi, l’ambassadeur algérien en Espagne rappelé pour consultation le 19 mars.

C’était le premier acte d’éloignement entre les deux pays. Alger avait pris cette mesure au lendemain de l’annonce par le gouvernement espagnol de son revirement historique vis-à-vis de la question du Sahara occidental.

D’autres mesures ont suivi depuis, dont la suspension, mercredi 8 juin, du traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération signé avec l’Espagne en 2002.

Les autorités espagnoles crient également au blocage des échanges commerciaux et nourrissent de sérieuses craintes quant à l’approvisionnement du pays en gaz, dont un peu plus de 20% provient d’Algérie.

Fin avril, Amar Belani, envoyé spécial chargé du Sahara occidental et des pays du Maghreb, avait prévenu que la crise avec l’Espagne n’était pas un nuage d’automne.

Ceux qui parlent d’une « colère passagère de l’Algérie, ne sont pas en phase avec la réalité », avait rétorqué le diplomate algérien au président du gouvernement espagnol, Pedro Sanchez, qui avait appelé au retour de l’ambassadeur d’Algérie à son poste.

Les propos de Belani prennent tout leur sens avec les développements de ces dernières semaines et notamment cette nomination de Saïd Moussi à Paris.

Même rappelé il y a 4 mois, Moussi était encore ambassadeur en Espagne. Son affectation à Paris signifie qu’Alger a choisi de laisser son ambassade à Madrid vacante, probablement pour un long moment encore.

C’est du moins ainsi que les analystes espagnols interprètent la décision du président Abdelmadjid Tebboune.

Tant que Sanchez et Albares restent en poste…

Certains sont même convaincus que le poste restera vacant et les relations entre les deux pays brouillées tant que Pedro Sanchez et son ministre des Affaires étrangères José Manuel Albares resteront en charge de la politique étrangère espagnole.

Citant des sources diplomatiques algériennes, le journal El Confidencial rapporte, mercredi 13 juillet, que le président algérien « n’est pas prêt à se réconcilier avec l’Espagne tant que Sánchez est à la tête du gouvernement et José Manuel Albares à la tête de la diplomatie espagnole ».

Il faut dire que les deux hommes n’ont rien fait pour calmer la colère d’Alger, s’efforçant pendant quatre mois de défendre leur nouvelle orientation plutôt que de la revoir.

C’est d’ailleurs le jour même d’un discours dans lequel Pedro Sanchez tente de justifier à nouveau son revirement qu’Alger annonce la suspension du traité d’amitié.

A Alger comme à Madrid, il y a de bonnes raisons de penser que les deux pays pourront retrouver des relations normales en cas de changement de gouvernement en Espagne.

Parmi ces raisons, le désaccord quasi unanime de la classe politique, à l’exception du parti socialiste (PSOE) au pouvoir, avec la nouvelle orientation de Pedro Sanchez vis-à-vis de la question sahraouie et des pays du Maghreb.

Fin juin, le congrès des députés (parlement) a adopté une motion demandant le retour à la neutralité historique de l’Espagne dans le dossier sahraoui et des relations normales avec l’Algérie.

En Espagne, Pedro Sanchez est accusé d’avoir pris une décision aussi lourde de manière unilatérale, sans consulter les autres groupes parlementaires, et d’avoir laissé à un chef d’État étranger le soin de l’annoncer.

C’est en effet le roi du Maroc Mohamed VI qui a annoncé dans un communiqué de presse, le 18 mars, la décision du gouvernement espagnol de soutenir le plan d’autonomie marocain.

Les milieux d’affaires en veulent également à M. Sanchez et à son équipe d’avoir mis en péril les relations avec un partenaire économique important, un pays qui achète à l’Espagne pour 2 à 3 milliards de dollars de marchandises par an et lui fournit d’importantes quantités de gaz à un prix inférieur à celui du marché.

Fin juin, l’ancien président du gouvernement, José Maria Aznar, qui a lui-même signé le traité d’amitié qu’Alger a décidé de suspendre, a averti que l’Espagne « paiera cher » cette crise avec l’Algérie.

The Maghreb Times, 14/07/2022

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