Algérie, Fête de l’indépendance, 05 juillet 1962, économie, situation sociale,
Célébration de notre Glorieuse fête de l’Indépendance du 05 juillet 2022 : l’Algérie, pays plein de vitalité, de 1962 2022, est toujours à la recherche de son destin, avec une transition inachevée
Cinquante-huit ans après son indépendance, fêté le 5 juillet 2022, son 60ème anniversaire. Le moment est venu, pressant, d’un examen lucide de la situation afin d’engager les réformes profondes, indispensables pour engager le pays sur le chemin de l’avenir. Sonatrach en 2022 procure avec les dérivées inclus dans la rubrique hors hydrocarbures environ 98% des recettes de l’Algérie : ainsi sur le plan économique après plusieurs décennies d’indépendance politique, comme vient de la rappeler le Président de la république le 24 juin 2022, je le cite « Sonatrach est l’un des puissants leviers de la souveraineté nationale ».
1.-L’Algérie célèbre le 5 juillet 2022 la fête de l’indépendance marquant la fin de la colonisation française depuis la conquête de l’Algérie de 1830 à 1871, après une longue résistance de 1830 à 1962. La France reconnaît l’indépendance de l’Algérie le 3 juillet et celle- ci est proclamée le 5 juillet 1962. Soixante ans (60) ans après, l’Algérie est toujours à la recherche de son destin, avec une transition inachevée tant sur le plan politique qu’économique et les défis qui l’attendent, avec un monde en plein bouleversement préfigurant d’importantes mutations géostratégiques, entre 2022/2030, sont nombreux et complexes. Toute politique de développement envisageable sur la période 2022/2025/ 2030 n’aura de chance d’aboutir que si d’abord l’on tient compte des trajectoires du passé, afin de ne pas renouveler les mêmes erreurs. Cela implique la mise en place de nouvelles institutions débureaucratisées et décentralisées, une refonte de l’État et un minimum de consensus social pour la mise en œuvre, tout projet étant forcément porté par les acteurs politiques, sociaux et économiques. D’où l’importance pour l’Algérie de se défaire du mythe de la rente issue des exportations de matières premières brutes et semi brutes.
Autre mythe , celui de l’importance des réserves de change issues de la rente comme signe de développement. Rappelons-nous le déclin de l’Espagne pendant plus d’un siècle, après avoir épuisé ses stocks d’or venu d’Amérique ; les cas du Venezuela, premier réservoir mondial de pétrole en semi-faillite, et de tous ces pays riches en minerais de l’Afrique en sous-développement. Voyez l’expérience de la Roumanie communiste de Nicolae Ceausescu, avec une dette nulle mais une corruption généralisée et une économie en ruine. Comme il faudra aussi éviter l’illusion monétaire face aux tensions financières et budgétaires inévitables entre 2020-2025. Une Nation ne pouvant distribuer plus que ce qu’elle produit, attention donc à la dérive salariale ne pouvant que conduire à la dérive inflationniste qui pénalise les couches défavorisées et sans relancer la machine économique. Cependant, durant cette conjoncture difficile, la cohésion sociale est vitale, et il faudra tenir compte de la pression démographique, souvent oubliée, étant une véritable bombe à retardement, avec plus d’un million de naissances chaque année entre 2015-2021, contre environ 600 000 dans les années 2000, devant avoir un taux de croissance minimum de 8/9% par an pour absorber la demande d’emplois additionnelle qui s ‘ajoute au taux de chômage actuel entre 350.000/400.000 emplois par an .
Aussi, il y a lieu de procéder sans complaisance à un examen très lucide de la situation pour mieux réagir dans plusieurs segments de la vie économique et sociale, tels : l’éducation-formation, le savoir pilier du développement, la santé, la modernisation de l’agriculture, la culture financière des acteurs économiques, l’efficacité de l’administration, la relance des entreprises ; à travers une nouvelle politique industrielle, lutter contre les déséquilibres régionaux et les inégalités sociales, la formation civique et politique de la jeunesse et tant d’autres domaines. Dans le cadre de la bonne gouvernance, il s’agit d’éviter des dépenses inutiles que l’on voile par de l’activisme reflétant une panne d’idées, habitués à dépenser et non à gérer à partir de normes standards.
2.-Le principal défi est d’ améliorer la gouvernance et lutter contre la corruption.Les importations de biens et services souvent oublié ( appel aux compétences étrangères) le montant a été d’environ 10 milliards de dollars par an entre 2010/2020 avec une baisse selon banque mondiale d’environ 6 milliards de dollars en 2021 ont été environ de 1050 milliards de dollars et les exportations d’environ 1100 milliards de dollars, 98% provenant des hydrocarbures avec les dérivées ( pour 2021 selon la Banque mondiale importations de biens et services ont été de 46 milliards de dollars), le solde au 31/12/2020 étant les réserves de change de 44 milliards de dollars, Le taux de croissance a été dérisoire, moyenne annuelle de 2/3% durant cette période alors qu’il faut sur plusieurs année un taux minimum de 8/9% pour absorber le flux annuel qui s’ajoute au taux de chômage actuel entre 350.000/400.000 emplois par an . S i on applique 20% de surcoûts ( 10% de surfacturation et 10% de mauvaises gestion) nous avons plus de 100 milliards de dollars de transferts illicites et 100 milliards de dollars de pertes faute d’une bonne gestion, car ne devant pas confondre mauvaise gestion et corruption : non maîtrise des contrats et des mécanismes économiques et financiers internationaux comme les fluctuations boursières.
Les biens à l’étranger peuvent provenir de plusieurs sources : celle des travailleurs mais qui s’est tari avec la mort des retraités et la crise économique ; celle des entrepreneurs exerçant légalement hors du pays d’origine et les transferts illicites dus aux surfacturations où on assiste par un vase communicant au rapatriement d’une fraction via le marché parallèle pour acheter localement surtout des biens immobiliers. Mais outre les devises, nous assistons également à des surfacturations en dinars notamment dans le BTPH ( ou le coût de la corruption se répercute sur la mauvaise qualité des projets) et des pertes au trésor, le premier ministre reconnaissant « la faiblesse du recouvrement fiscal. Et que la fraude et l’évasion fiscale ont atteint des niveaux intolérables ». Selon un rapport sur l’état des lieux de la justice fiscale, publié, par l’organisation non gouvernementale (ONG), Tax Justice Network, l’Algérie perd chaque année plus de 467 millions de dollars, (pour l’Afrique c’est environ 23,2 milliards de dollars/an), représentant 0,3% du produit intérieur brut (PIB) du fait des pratiques d’évasions fiscales internationales.. Environ 413,75 millions de dollars relèvent d’abus transfrontaliers d’impôts sur les sociétés par les multinationales et 53,3 millions de dollars, en évasion fiscale, par des particuliers fortunés qui transfèrent leur argent à l’étranger.
Pour l’Algérie, je réitère la proposition que j’ai faite en 1983 lorsque je dirigeais les départements des études économiques et des contrats, en tant que haut magistrat, premier conseiller à la Cour des comptes, chargé du contrôle du programme de l’habitat en coordination avec le ministère de l’intérieur , le ministère de l’habitat et les 31 walis de l’époque entre 1982/1983 et le dossier des surestaries en relation avec le ministère du commerce concernant le contrôle du programme anti pénurie, j’avais proposé à la présidence de l’époque la mise en place en urgence d’un tableau de la valeur avec la numérisation pour permettre l’interconnexion des différents secteurs concernés, la banque d’Algérie la douane, la fiscalité, entreprises publiques/privés, et les différents ministères avec leurs annexes locales afin de lutter contre les surfacturations , tableau qui n‘a jamais vu le jour car s’attaquant à de puissants intérêts que certains politiques, experts et fonctionnaires redécouvrent en 2021/2022.
3.- Évitons cette vision du tout sinistrose. Ceux qui affirment que rien n’a été réalisé depuis l’indépendance versent dans le dénigrement politique, mais il convient de reconnaître qu’existent encore des poches de pauvreté et une répartition inégalitaire du revenu national, ainsi qu’une non maîtrise de la gestion avec des surcoûts exorbitants, et la corruption qui gangrène le corps social. De 1963 à ce jour, contrairement à certaines analyses malveillantes, depuis l’indépendance politique l’Algérie a connu d’importantes réalisations, mais également des imperfections qu’ils ‘agit de corriger. Au 1er janvier 2022 l’Algérie comptait 45 millions d’habitants. Mais, quelle était la situation de l’économie, de l’éducation, des infrastructures, des branchements en gaz et électricité, en 1962 ? La population était alors de 11,62 millions d’habitants, dont 95 % d’analphabètes, plus de 80 % vivant dans des taudis. D’où l’urgence de corriger l’actuelle trajectoire qui a atteint ses limites. Cela devra reposer sur une réelle décentralisation, une réorganisation institutionnelle centrale et locale et une vision stratégique de l’avenir dans le domaine économique, social, culturel, diplomatique, et sécuritaire de l’Algérie à l’horizon 2030 en phase avec la transformation du nouveau monde.
Dans la pratique des affaires n’existent pas de sentiments, et l’attrait de l’investissement productif – y compris les services à valeur ajoutée, et qu’il soit étranger ou national – repose principalement sur huit (8) facteurs : premièrement, sur une visibilité dans la démarche socio-économique à moyen et long terme, supposant une planification stratégique, évitant des décisions au gré de la conjoncture ; – deuxièmement, de profondes réformes structurelles institutionnelles , macro-et micro économiques , afin d’ attirer les investisseurs créateurs de valeur ajoutée ; – troisièmement, sur la levée des obstacles bureaucratiques centraux et locaux qui constituent le facteur essentiel du blocage, car trop de procédures alors que l’investisseur agit en temps réel, en fonction des opportunités à travers le monde, et pas seulement en Algérie ; – quatrièmement, sur la réforme du système financier, lieu de distribution de la rente qui n’a pas fait sa mue depuis l’indépendance politique car enjeu énorme du pouvoir se limitant à des aspects organisationnels techniques ; – cinquièmement, sur la réforme du système socio-éducatif fondé sur les nouvelles technologies : disposer d’une main-d’œuvre non qualifiée à bon marché n’est plus un atout d’actualité avec l’avènement de la quatrième révolution économique mondiale fondée sur l’économie de la connaissance ; – sixièmement, sur l’efficacité des start-up : malgré des compétences, elle restera limitée sans une base économique et des institutions efficientes adaptées au digital et à l’intelligence économique, et cela au risque de renouveler les résultats mitigés, malgré de nombreux avantages, de tous ces organismes dédiés à l’emploi des jeunes ; – septièmement, sur l’épineux problème du foncier, car actuellement le mètre carré est trop cher et souvent les autorités attribuent du terrain sans viabilisation ni utilités : routes, téléphone , gaz, électricité ; – huitièmement, éviter des changements récurrents des cadres juridiques. Car après les scandales financiers, il est reconnu que la règle des 49/51 a eu un impact néfaste, permettant à certaines oligarchies proches du pouvoir de bénéficier d’une rente sans apporter de valeur ajoutée ; Il faudra ainsi définir clairement ce qui est stratégique et ce qui ne l’est pas. Idem pour le droit de préemption, qui peut décourager tout investisseur sans compter les nombreux cas de litiges au niveau des tribunaux internationaux.
Quelle conclusion tirer ?
Depuis fort longtemps et pas seulement durant la période actuelle, l’Algérie semble chavirer un moment et reprendre avec hésitation ses équilibres à un autre moment. Il ne s’agit pas de renier les traditions positives qui, moulées dans la trajectoire de la modernité, peuvent être facteurs de développement. Pourtant, au-dessus de tout, l’Algérie reste un pays dynamique, plein de vitalité, qui se cherche et cherche sa voie. Il n’existe pas d’État national standard, ce sont les paradigmes anthropologiques intrinsèques qui modèlent le système politique inhérent à chaque situation. Avec le développement des réseaux sociaux, les partis traditionnels et les sociétés civiles servent de moins en moins d’intermédiation sociale et cela n’est pas propre à l’Algérie : l’opposition est atomisée et les nombreux micro-partis et organisations dites « société civile » peu efficaces pour mobiliser la population, déconnectés de la réalité du nouveau monde. Une profonde restructuration de la société devra s’adapter à la perpétuelle évolution, n’existant pas de situation statique. Lorsqu’un État émet des règles qui ne correspondent pas à la réalité de la société, celle-ci émet ses propres règles avec le développement de la sphère informelle. Cela s’applique également à tous les secteurs, notamment le commerce contrôlé à plus de 60 % par cette sphère. C’est que la prospérité ou le déclin des civilisations de l’Orient et de l’Occident a clairement montré qu’une nation sans son élite est comme un corps sans âme. Les expériences historiques montrent clairement que le régime politique – à ne pas confondre avec l’État, au sens épistémologique du terme – qui est un sous-ensemble du système politique, que les tensions que connaît le système, ou celles qu’il est appelé à connaître, doivent être recherchées dans les dysfonctionnements ou les crises d’autorité qui surgissent périodiquement, et depuis longtemps, au plus haut niveau de l’État. La nouvelle reconfiguration politique, pour aller vers une nouvelle République, doit prendre en charge tant les mutations internes de la société algérienne que la nouvelle architecture des relations internationales, et tenir compte de notre histoire car l’histoire est le fondement de la connaissance et de l’action future.
Soulignons ainsi, avec force, l’importance du devoir de mémoire. Les relations entre l’Algérie et la France, mouvementées et passionnelles, doivent dépasser les faux préjugés et établir la vérité , la reconnaissance du fait colonial afin d’éviter que certains, des deux côtés de la Méditerranée, n’instrumentalisent l’Histoire à des fins politiques. Cela permettra d’entrevoir l’avenir pour un devenir solidaire, entreprendre ensemble loin de tout esprit de domination, chaque pays étant souverain dans ses décisions.
Gloire à tous nos martyrs qui se sont sacrifiés pour une Algérie prospère, où serait bannie l’injustice, une Algérie fondée sur l’État de droit et la démocratie, tout en tenant compte de sa riche anthropologie culturelle.
Professeur des universités, expert international Dr Abderrahmane MEBTOUL fils du feu Moudjahid Ali emprisonné Lambèse et El-Harrach 1958/1962
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