La lutte pour le leadership n’a pas lieu d’être

La lutte pour le leadership n’a pas lieu d’être – Algérie, Maroc, Palestine, Sahara Occidental, Israël, normalisation, armée, armement, ressources naturelles,

Si certains experts mettent aujourd’hui, les divergences entre Alger et Rabat sur le compte d’une lutte pour le leadership régional, d’autres experts estiment que cette lutte n’a aucune raison d’être, car les deux pays voisins ne jouent pas dans la même division, et que ce serait mésestimer les cartes de l’un et surestimer celles de l’autre pour les mettre à égalité de chances et de performances. Or ce n’est le cas, l’Algérie étant dans un autre niveau de compétences, de performances, d’atouts géopolitiques et de crédit au sein du vaste monde arabo-musulman.

Pour faire vite et court, il faut d’abord, garder en mémoire que l’Algérie est le plus grand pays d’Afrique, du monde arabe et du pourtour méditerranéen ; ce sont déjà là, trois points d’avance, quasi « irrattrapables ». A ces trois atouts s’ajoute un autre, d’une importance décisive : l’Algérie partage les frontières terrestres et maritimes de neuf pays : sept terrestres, avec la Tunisie, la Libye, le Niger, le Mali, la Mauritanie, le Sahara occidental et le Maroc, ainsi que deux frontières maritimes avec l’Italie et l’Espagne. Ces frontières permettent d’être à cheval de deux continents, africain et européen, d’être l’axe des pays maghrébin et subsaharien, position privilégiée dont seule l’Algérie peut se prévaloir.

Pour la puissance de feu, le classement fait par les revues militaires internationales spécialisées donnent une très large avance à l’Algérie ; sur le continent africain, seule l’Égypte peut se permettre la comparaison, et plus. Le Maroc se situant à des échelles plus bas.

Pour les ressources naturelles, présentes et futures, avec une superficie de 2.381 741 km2, l’Algérie est un continent qui regorge de toutes les richesses naturelles imaginables. Les principaux gisements en Algérie sont parmi les plus importants dans le monde. Pétrole, gaz, fer, sel, zinc, plomb, barytine, marbre, or, tungstène, diamant, terres rares, métaux rares et pierres précieuses et semi-précieuses, plomb-zinc, bentonite, sel, phosphate, uranium, etc. Pour les énergies du futur, l’énergie solaire et les terres rares donnent une avance encore sur le Maroc. De même que les eaux souterraines du Sahara central, qui font de la région sud de l’Algérie le réservoir mondial de l’avenir.

Avec plus de 43 millions d’habitants (bientôt le curseur pointera à 45), dont une large majorité de jeunes, c’est une force et une vitalité pleine de promesses totalement tournées vers l’avenir.

Au plan de la référence politique et morale, l’Algérie peut se réclamer d’un crédit sans faille auprès des populations du monde arabe et musulman, pour au moins les deux dossiers dont elle s’est fait le chantre, le dossier palestinien et celui du Sahara occidental.

La normalisation avec Israël n’a pas arrangé les choses pour Rabat, loin s’en faut. Les retombées escomptées par le Palais tardent à voir le jour, et le Maroc est en train de s’enliser, jour après jour, dans une logique de fait, qui lui sera préjudiciable, comme on peut le constater avec la montée au créneau du front social, la descente aux enfers du PJD, largement discrédité par les populations marocaines pour ses compromissions avec le Palais royal, les critiques de son propre camp et les remontées du djihadisme.

Pour les casseroles qu’il traîne, le Maroc a perdu crédit et crédibilité auprès de ces mêmes populations arabes et musulmanes. Dernier pays colonisateur sur tout le continent africain, il se trouve en bon ménage avec Israël, colonisateur de la Terre sainte de la Palestine, cœur battant du monde de l’islam depuis quatorze siècles. A la longue, ce discrédit, peut être périlleux et les populations marocaines elles-mêmes ressentent ces frustrations et ce discrédit, car elles sont, au bout du compte, une pièce de ce bloc arabo-musulman.

Si l’on ajoute le « paradoxe du sol » que vivent les Marocains, on en arrive à ces dix raisons invoquées et qui font que les deux pays voisins et frères ne jouent pas dans la même division. Par paradoxe du sol, on entend cette propension à coloniser un pays faible (Sahara occidental) alors que dans le même temps, ses propres terres (le littoral rifain) sont sous joug d’un pays plus fort depuis près de cinq longs siècles. Ce seul paradoxe marocain résume tout un univers de contradiction nourri par un expansionnisme qui cache de bien piètre manière les frustrations et les échecs dont il cherche à en atténuer les amertumes.

̈́L’Express, 30/12/2021

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