Sahara Occidental: autodétermination impossible sans référendum. L’ONU pousse à la reprise des négociations avec le Maroc
Sahara occidental : l’ONU pousse à la reprise des négociations avec le Maroc
Une impasse qui dure depuis trente ans, a dégénéré il y a un an avec la reprise du conflit entre Rabat et le Front Polisario. Le Secrétaire général des Nations Unies, par l’intermédiaire de son envoyé, propose la formule du compromis politique. L’objectif reste l’autodétermination du peuple sahraoui. Pendant ce temps, dans les camps en Algérie, ils souffrent d’une grave crise alimentaire et sanitaire.
Tout est reporté au vendredi 29 octobre. Mercredi 27 octobre, les Etats-Unis n’ont pas réussi à faire approuver par l’ONU le projet de résolution prolongeant d’un an le mandat de la mission de l’ONU au Sahara occidental, la Minurso. La Russie, qui soutient les positions de l’Algérie, a mis un bâton dans les roues. Le temps, cependant, est compté. Parce que le mandat de la Minurso expire le dimanche 31 octobre. Face aux États-Unis, l’opposition de la Russie n’est pas la seule. L’ambassadeur du Kenya aux Nations unies, Martin Kimani, président en exercice du Conseil de sécurité, a répété : « Nous voulons que l’autodétermination soit clairement énoncée dans la résolution ».
En 30 ans, la Minurso n’a pas réussi à remplir son mandat (réaliser le référendum) ni à sauvegarder le cessez-le-feu entre le Maroc et le Front Polisario, qui dure depuis septembre 1991, et que Rabat a violé le 13 novembre 2020, amorçant la reprise de la guerre au Sahara occidental.
L’aspect décisif est la formule avec laquelle le Conseil invitera les deux parties à reprendre les négociations. L’accord entre le Maroc et le Polisario pour un référendum d’autodétermination, conclu avec la médiation des Nations unies en 1988, et qui était censé mettre fin à la guerre qui a débuté en 1975 avec l’invasion par l’armée de Rabat de l’ancienne colonie espagnole, est resté jusqu’à présent lettre morte.
Depuis une vingtaine d’années, depuis que le recensement des ayants droit au vote est achevé, le Maroc oppose son veto à la liste des électeurs, le mot « référendum » a disparu des résolutions du Conseil de sécurité, et a été remplacé par le concept de « solution politique » acceptable par les deux parties, puis renforcé par l’attribut de « réaliste et pragmatique ».
Ce glissement sémantique trahit le rapport de force au sein du Conseil de sécurité, où la France s’est toujours opposée à toute initiative qui contredit les revendications du Maroc en matière de reconnaissance de son occupation de fait, même partielle, du Sahara occidental.
Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, dans son rapport présenté début octobre au Conseil de sécurité, se dit préoccupé par la reprise de la guerre et recommande le renouvellement de la Minurso pour une année supplémentaire, malgré le fait qu’elle n’ait pas pu patrouiller sur le territoire, précisément à cause de la guerre.
De manière plus significative, Guterres propose à nouveau la formule du compromis politique : » une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara occidental » (§ 85). Comme l’ont montré les vingt dernières années, il est difficile, voire impossible, d’imaginer une véritable autodétermination sans référendum.
Afin d’attirer l’attention sur cette impasse et sur ces Sahraouis qui vivent depuis 45 ans dans des camps de réfugiés autour de Tindouf, dans le Sahara algérien, le Polisario a tenté de rompre l’isolement, non seulement pandémique mais aussi médiatique, dont souffre la résistance sahraouie.
A partir des célébrations du 12 octobre – qui pour les Sahraouis est la journée d’unité nationale créée autour du Polisario pour résister à l’invasion marocaine en 1975, et qui cette année a également vu la participation de délégations et de journalistes étrangers après l’interruption due au Covid-19 -, les dirigeants du Polisario ont relancé les termes de l’accord conclu avec le Maroc qui prévoit un référendum d’autodétermination.
Le problème est que le référendum n’est plus accepté par le Maroc, après avoir échoué à manipuler la liste des électeurs établie par l’ONU, et que le Conseil de sécurité l’ignore. Le nouvel envoyé spécial, l’italo-suédois Staffan de Mistura, nommé par Guterres après plus de deux ans de vacance dans ce rôle fondamental de médiateur entre le Maroc et le Polisario, devra évoluer dans les limites fixées par le Conseil lui-même.
Urgence sanitaire dans les camps en Algérie
Pendant que les Sahraouis dans les territoires occupés font face à une répression implacable et à une censure totale de la part du Maroc, les réfugiés sahraouis en Algérie vivent dans des conditions difficiles. La pandémie les a aussi touchés. La campagne de vaccination Covid-19 a débuté le 10 avril et la deuxième dose le 13 juillet. La priorité a été donnée au personnel de santé, aux malades chroniques, aux cadres et aux personnes âgées.
Le président sahraoui lui-même, Brahim Ghali, a été touché par le Covid-19 au printemps dernier puis hospitalisé en Espagne, entraînant des représailles marocaines qui ont mis en crise les relations entre Rabat et Madrid.
Les vaccins utilisés étaient Astra Zeneca, Sinovac et Sinopharm, mais comme ailleurs, la campagne de vaccination s’est heurtée à la disponibilité limitée des vaccins. L’Algérie, qui a commencé à produire des vaccins russes et chinois, a fourni les vaccins, tandis que les promesses de l’Espagne n’ont pas été tenues. L’objectif est d’atteindre 70 % de la population adulte.
La situation alimentaire est particulièrement alarmante. Depuis des années, les agences internationales, le Programme alimentaire mondial (PAM) et le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) ont fortement réduit les rations. Une mission conjointe avec les pays donateurs est actuellement en cours pour évaluer les besoins. L’Italie, à travers l’Agence italienne de coopération au développement (AICS) vient d’allouer un demi-million d’euros au Pam pour l’assistance humanitaire aux réfugiés sahraouis.
La pandémie a empêché la mobilité traditionnelle, notamment avec l’Espagne, où de nombreux Sahraouis travaillent et alimentent les envois de fonds qui permettent aux familles des camps de réfugiés d’obtenir des ressources pour faire face aux pénuries alimentaires et matérielles, ressources qui ont donc fait défaut en cette période.
De plus, la sécheresse et la chaleur, particulièrement sévères cet été, ont mis à rude épreuve non seulement la population mais aussi le bétail. Depuis les territoires libérés, traditionnellement des pâturages, de nombreux Sahraouis sont retournés dans les camps de réfugiés en Algérie pour survivre, ce qui a contribué à grever les stocks alimentaires disponibles.
Nigrizia