Algérie. Don de soi. Le don de sang, quant à lui, fait partie de cette générosité que le citoyen manifeste journellement à l’égard d’autrui, qu’il soit simple anonyme ou dans le cercle des proches.
Si le peuple algérien devait être caractérisé par une vertu, ce serait la générosité. Le peuple algérien est foncièrement généreux et il le démontre dans la quotidienneté à travers des actions caritatives et chaque fois qu’une situation l’exige de manière plus exceptionnelle où ce sentiment se traduit par un élan de solidarité à la hauteur de la nécessité. Il suffit de se rappeler le dramatique été dernier durant lequel une vague d’incendies a déferlé sur le nord du pays, jetant des populations entières dans un état de dénuement tel que seule une rare mobilisation pouvait repousser.
De fait, la solidarité dont a fait preuve le peuple algérien dans son entièreté, nourrie par une générosité sans borne, a tout simplement été incroyable. Le don de sang, quant à lui, fait partie de cette générosité que le citoyen manifeste journellement à l’égard d’autrui, qu’il soit simple anonyme ou dans le cercle des proches.
Faire un don de sang, c’est faire don de soi, et les Algériens, en dépit de toutes circonstances défavorables, n’ont pas l’égoïsme chevillé au corps. Malgré la pandémie de la Covid-19, la collecte de sang n’a pas cessé et les donneurs n’ont pas déserté, de sorte que les patients en besoin d’une transfusion sanguine ont continué à être pris en charge sans difficulté particulière.
La célébration de la Journée nationale des donneurs de sang a été instituée à point nommé pour rendre hommage à ces milliers de volontaires qui font tous les jours don de vie à des concitoyens mis en danger de mort par une santé défaillante ou un accident létal, tout en constituant aussi une occasion pour sensibiliser à la noblesse de ce geste qui, dans d’autres sociétés moins enclines aux bons sentiments, est souvent actionné par un seul incitateur, l’argent.
L’importance du don de sang restera intacte tant que la science n’a pas réussi à trouver un succédané au sang humain. Bien sûr, de grands progrès ont été accomplis dans la fabrication d’un sang artificiel et universel, c’est-à-dire qui pourrait être transfusé à tout patient, indépendamment de son groupe sanguin, mais toutes les difficultés n’ont pas été encore résolues car le sang humain est un liquide complexe.
C’est sûrement la solution d’avenir, mais en attendant la mise au point d’un substitut sanguin d’une efficacité prouvée, le don de sang reste irremplaçable, et le donneur volontaire, un auxiliaire précieux du système de santé et un exemple à suivre dans les autres aspects de la vie sociale.
Ouali Mouterfi
Dalila, donneuse de sang : «La bénédiction divine est ma seule rétribution»
Donner du sang a été pour Dalila une curiosité. Elle avait à peine 20 ans lorsqu’elle a fait son premier don à la banque de l’hôpital Mustapha-Pacha d’Alger.
«J’étais avec ma mère en train de déambuler dans la capitale, à faire les vitrines. Pour se rendre de la rue Larbi-Ben M’hidi à celle de Didouche-Mourad, il fallait passer par la Grande-Poste. Arrivées sur l’esplanade de cette dernière, j’avais remarqué la présence d’un camion de prélèvements du CHU Mustapha-Pacha d’Alger sur lequel était écrit ‘‘donner son sang, c’est sauver une vie’’. J’ai dit à ma défunte ma mère, tiens, et si j’allais donner un peu du mien. Elle n’avait trouvé aucune objection, mais elle m’avait encouragé à le faire. Je suis rentré dans le camion. Je me suis fait piquer et j’ai vu du sang couler dans un petit tuyau vers une poche. Une fois remplie, l’infirmerie me dit que Dieu te bénisse ma fille. J’avais les larmes aux yeux tant j’étais émue par son propos. Et dire que je n’avais que 20 ans.» Depuis ce jour,il n’a cessé de donner de son sang. Aujourd’hui, la cinquantaine entamée, femme au foyer et mère de deux enfants, elle semble encore heureuse d’avoir franchi la porte de ce camion collecteur de sang. A raison de 3 dons par année, Dalila a dépassé le cap de 100 dons. Avant qu’on lui fixe la périodicité, elle ne ratait aucune occasion pour donner de son sang. «A chaque fois que je vois un camion, je m’arrête pour donner un peu de mon sang, et ce, avant qu’un médecin m’explique que les femmes ne doivent faire don de sang qu’une fois tous les quatre mois», indique-t-elle.
Plus de 100 dons
Depuis cette première expérience, Dalila, qui habite Tizi-Ouzou et coule des jours heureux avec son mari et ses deux enfants, a toujours été au rendez-vous. Mieux, elle a même inculqué cette habitude à son fils. «J’ai lu sur une page Facebook que le CTS de Tizi-Ouzou avait appelé à un don de sang pour un malade. J’ai pris mon fils et nous sommes allés donner le nôtre sans réfléchir.» Etant répertoriée sur le fichier national des donneurs de sang, elle est souvent appelée pour les besoins d’un malade qui a le même rhésus qu’elle. Il reste que la maladie de son défunt père allait lui faire tourner le dos à cette action caritative. «Lorsqu’on m’avait remis ma carte de donneur bénévole, on m’avait dit que si un jour j’étais dans le besoin, il me suffisait de remettre cette carte à n’importe quel CTS ou banque de sang pour que l’on me serve ce dont j’avais besoin. Malheureusement, ma carte n’a pas servi à grand-chose. Mon père, qui était hospitalisé au CHU de Tizi-Ouzou, avait besoin de sang et j’ai reçu un cinglant refus du responsable du CTS de Tizi-Ouzou me disant que ma carte ne m’ouvrait aucun droit. Sur quoi, j’avais juré de ne plus remettre les pieds dans un CTS. Mais une fois la colère passée, j’ai repris mes habitudes avec un réel bonheur», dit-elle encore avant de conclure : «Je sais que c’est un geste banal mais ô combien important. Je ne cesse de revoir cet écriteau que j’ai vu pour la première fois à la Grande-Poste et qui me pousse et m’incite à donner encore. Je n’attends rien en retour. La bénédiction divine est ma seule rétribution.»
Rachid Hammoutène
Horizons, 25/10/2021