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La France fait partie des pays européens les plus touchés par le crime organisé, à en croire au Global Organized Crime Index qui note que les flux d’armes et de drogues ont explosé ces dernières années, même si les réseaux à l’œuvre sont encore peu structurés.
Alors que les thématiques sécuritaires promettent d’être au centre des débats de la prochaine présidentielle, une étude menée par l’ONG Global Initiative Against Transnational Organized Crime (GIATOC, Initiative mondiale contre le crime organisé transnational) vient confirmer que la France serait en proie à une insécurité galopante.
Le pays est en effet le premier d’Europe occidentale en matière de crime organisé et le huitième sur le Vieux Continent, d’après le Global Organized Crime Index de la GIATOC qui liste 193 États membres de l’Onu selon leur taux de criminalité. Le score de la France, qui est 59e dans ce triste classement mondial, se rapproche de celui de l’Italie (53e) ou de certains pays des Balkans.
Les réseaux criminels qui sévissent dans l’Hexagone (Corse comprise) sont cependant moins structurés qu’ailleurs. Il s’agit principalement de « gangs de banlieue » affirme l’étude, même si des groupes de type mafieux tendent aussi à se développer et à s’infiltrer dans diverses entreprises, comme des bars, des restaurants ou des hôtels.
Des mafias étrangères se sont en outre implantées en France, venant principalement d’Italie, d’Europe de l’Est et du Nigeria précise l’étude. Elles travaillent souvent main dans la main avec les groupes locaux pour blanchir de l’argent. Paris, Grenoble, Marseille, Lyon et Lille seraient les villes les plus gangrenées par ces différents réseaux.
Armes, drogues, prostitution
Sans surprise, le trafic de drogue est l’une des principales activités sur laquelle prospère le crime organisé, souligne l’étude. Le cannabis domine, sous forme de marijuana plutôt que de haschisch. Le problème est double, puisque la France est un pays de consommation mais également de transit.
« Le marché a connu une croissance exponentielle ces dernières années [….] La France est un pays de transit et de destination du cannabis. Le cannabis en provenance du Maroc est transité par l’Espagne vers la France puis transporté vers le reste de l’Europe en voiture, bus ou camion », explique ainsi l’étude.
Le trafic de cocaïne est aussi une valeur sûre pour les réseaux criminels. Si la Guyane reste une plaque tournante traditionnelle, du fait de sa proximité avec certains pays producteurs d’Amérique du Sud, la vraie porte d’entrée vers l’Hexagone est le port du Havre. Les trafiquants n’hésitent pas à y faire pression sur les dockers, comme l’ont montré des faits divers récents.
Autre point noir français: le trafic d’armes. Celui-ci est d’ailleurs souvent lié au trafic de stupéfiants, les criminels s’adonnant à divers trocs, en échangeant par exemple des AK-47 contre de la drogue. Ce « flux constant d’armes illicites » provient d’Europe de l’Est mais aussi des États-Unis.
La GIATOC rappelle une explosion des trafics d’êtres humains, surtout liés à la prostitution, mais pouvant aussi déboucher sur du travail ou de la mendicité forcés.
« La contrebande d’êtres humains s’est développée dans le nord de la France […] depuis la fermeture des camps de migrants à Calais », précisent les auteurs du classement.
Le département de Mayotte, soumis à une forte pression migratoire, serait aussi un haut lieu du trafic d’êtres humains, d’après l’étude.
En septembre 2020, Gérald Darmanin avait d’ailleurs clairement fait le lien entre ces différents trafics et le crime organisé, dans un entretien au Parisien.
« La drogue, c’est de la merde, ça finance le crime organisé […] À travers ce sujet, il y a la lutte contre le crime organisé, avec la traite des êtres humains et le financement du terrorisme, mais aussi une grande mesure de santé publique », avait-il ainsi déclaré au quotidien.
Le ministre de l’Intérieur avait alors assuré vouloir faire de la lutte contre les stupéfiants l’une des priorités de ses services. Une lutte qui s’est récemment traduite par des opérations coups de poing et un bond des saisies de drogue au premier semestre 2021.
Mi-août, Gérald Darmanin avait d’ailleurs affirmé avoir « gagné une bataille dans cette guerre difficile et très ancienne » contre les trafics de stupéfiants.
Frontières poreuses et politiques réticents
Selon le Global Organized Crime Index, l’appartenance de la France à l’espace Schengen n’aide guère à réguler ces trafics. De nombreux trafiquants profitent en effet « de l’absence de contrôles aux frontières de l’UE » pour entrer en France. Le contrôle des frontières en Guyane est également problématique. Mais « l’intégrité territoriale » est aussi « compromise » dans les banlieues des grandes villes souligne l’étude, en référence aux fameux « territoires perdus de la République ».
Au palmarès du crime organisé, d’autres pays s’illustrent cependant plus que la France. Sur les 193 États recensés, la palme revient à la République démocratique du Congo, devant la Colombie, célèbre pour ses cartels. La Russie est classée 32e et les États-Unis sont au 66e rang.
Plus de 350 experts du monde entier -journalistes, scientifiques, chercheurs et représentants de la société civile- ont participé à l »établissement du classement, note la GIATOC. Cette organisation basée à Genève précise que son étude a été en partie financée par le département d’État américain, tout en notant que les opinions exprimées dans le rapport ne reflètent pas nécessairement celles des autorités des États-Unis.
Florent Zephir
Sputnik France, 16/10/2021