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Mohamed Cheikh, chargé d’affaires à l’ambassade sahraouie à Alger : «Un échec cuisant pour la france et le Maroc»
Pour Mohamed Cheikh, chargé d’affaires de l’ambassade du Sahara occidental à Alger, le verdict du tribunal de l’Union européenne est «un échec cuisant pour la France et le régime perfide du Maroc et pour le Conseil de l’Europe qui ont violé pendant de très longues années le droit international».
Entretien réalisé par Nadia Kerraz
El Moudjahid : Le Tribunal de l’Union européenne a annulé mercredi les deux accords commerciaux liant le Maroc à l’Union européenne et affirmé que le Front Polisario est le seul représentant légal du peuple sahraoui. Quel commentaire vous inspire cette double décision ?
Mohamed Cheikh : Le Front Polisario se réjouit de cette décision rendue par le Tribunal de l’Union européenne. Elle tombe à point nommé après les succès obtenus cette semaine au niveau de l’Assemblée générale des Nations unies. C’est le fruit d’un âpre combat mené par le peuple sahraoui depuis dix ans pour la préservation de ses ressources naturelles, aidé en cela par ses amis et ses soutiens et le vaste mouvement de solidarité manifesté en faveur de la cause sahraouie. Nous tous, nous avons finalement eu gain de cause. Le Tribunal de l’UE a prononcé l’annulation de deux accords de pêche et d’agriculture liant le Maroc à l’Union européenne et étendus au Sahara occidental. Pour le Tribunal ces deux accords ont été conclus en violation de la décision de la Cour de justice de l’UE de 2016,sans le consentement du peuple sahraoui. C’est un franc succès pour le peuple sahraoui et ses amis et c’est un échec cuisant pour la France et le régime perfide du Maroc et pour le Conseil de l’Europe qui ont violé pendant de très longues années le droit international. Maintenant, les multinationales qui avaient spolié et bradé les ressources du peuple sahraoui doivent payer pour les vols qu’elles ont commis pendant une trentaine d’années. Il y a aussi à signaler que le Tribunal a prononcé de manière claire que le Front Polisario est le seul représentant du peuple du Sahara occidental. A cet égard, le Tribunal a constaté que le Front Polisario, reconnu sur le plan international en tant que représentant du peuple sahraoui, est à même de mener un autre combat ; celui de l’exigence de la mise en œuvre effective du référendum d’autodétermination .
Quelle serait la prochaine étape ?
Maintenant on attend la décision du Conseil de l’Europe. Par le passé, malheureusement, ce dernier ainsi que la commission n’ont pas respecté les avis du Tribunal et ont opté pour la politique du fait accompli. Ils doivent maintenant respecter coûte que coûte l’avis du Tribunal. Le bradage des ressources du peuple sahraoui doit définitivement prendre fin.
Le Maroc a fini par accepter la proposition de nomination de M. De Mistura comme Envoyé spécial du Secrétaire général de l’ONU pour la Sahara occidental. Quand le Conseil de sécurité va-t-il procéder à la confirmation de cette nomination ?
Elle le sera très prochainement. On s’attend à ce que De Mistura commence sa mission dès que possible. On a forcé la main du Maroc pour l’accepter. Il faut rappeler qu’il avait récusé plusieurs noms européens et, par le passé, que l’Envoyé spécial soit un diplomate dont le pays est membre du conseil de sécurité. La balle est dans le camp du Conseil de sécurité qui doit forcer le Maroc à respecter le droit international, à respecter les résolutions onusiennes.
Qu’attendez-vous de De Mistura ?
Nos attentes sont les mêmes, celles que nous ne cessons d’exprimer depuis plusieurs années. La Minurso a été créée en 1991 pour organiser un référendum d’autodétermination, ce qu’elle n’a pas fait. Elle a été apprivoisée par le Maroc et ligotée par la France. Ce pays entrave le processus de paix. La Minurso n’a ni accompli sa tâche assignée par l’ONU d’organiser un référendum ni fait respecter les droits de l’homme systématiquement violés dans les territoires occupés. Pour De Mistura, il faudrait irrémédiablement un appui ferme et constant de la part du Conseil de sécurité pour qu’il aille de l’avant.
Ramatane Lamamra : «Victoire éclatante»
L’annulation des accords agricole et de pêche conclus entre l’Union européenne et le Royaume du Maroc par le Tribunal de l’Union européenne est une « victoire éclatante pour la cause légitime du peuple sahraoui », a déclaré hier, le chef de la diplomatie algérienne, Ramtane Lamamra.
« Il s’agit là d’une victoire éclatante pour la cause légitime du peuple sahraoui. Tout d’abord, à travers la reconnaissance de la représentativité du Front Polisario par la plus haute instance judiciaire de l’Union européenne, qui lui confère la capacité d’agir devant le Tribunal de l’Union », a déclaré le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger.
Il s’agit aussi d’une victoire car il est question, dira-t-il, de « l’annulation des deux accords conclus en violation de l’obligation relative à la nécessaire obtention du consentement libre et authentique du peuple sahraoui qui découle directement du statut séparé et distinct du territoire du Sahara occidental en tant que territoire non autonome éligible à l’autodétermination conformément au droit international ».
« Cette double avancée majeure consacrée par la jurisprudence européenne constitue un acquis historique qui s’imposera désormais à l’ensemble des pays membres de l’Union européenne et à ses institutions dans leurs relations avec le Maroc, en tant qu’Etat occupant », a signalé le ministre. « Cette sentence vient aussi ouvrir une nouvelle étape dans la lutte du peuple du Sahara occidental pour l’exercice de son droit inaliénable, imprescriptible et non négociable, à l’autodétermination, en ce sens qu’elle constitue un repère incontournable pour les organisations internationales impliquées dans la recherche d’une solution au conflit du Sahara occidental qui garantit le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination », a-t-il ajouté.
S’inscrivant en droite ligne du statut du Sahara occidental, représenté par la République arabe sahraouie démocratique, en tant qu’Etat fondateur de l’Union africaine, « cette nouvelle consécration juridique de sa personnalité internationale a l’effet clarificateur de réduire à néant les prétentions expansionnistes du Royaume du Maroc », a précisé, en outre, M. Lamamra. « Dans le même temps, ce verdict de la justice européenne indique au Conseil de sécurité des Nations unies la voie que le parachèvement de la décolonisation du Sahara occidental doit impérativement emprunter », a-t-il poursuivi. « Face à une occupation illégale de territoires sahraouis et à une exploitation effrénée de ressources naturelles sur lesquelles le peuple du Sahara occidental est le titulaire exclusif d’une souveraineté permanente, le Conseil de sécurité est plus que jamais mis en demeure d’engager son autorité dans la promotion et la protection des droits nationaux du peuple du Sahara occidental », a conclu le ministre.
Echec et mat
Le régime marocain vient de subir une sérieuse défaite juridique dont le retentissement et les dividendes pour le peuple sahraoui sont incontestables.
Justice est rendue, et il ne sert à rien de persister dans la politique du fait accompli et le déni de droit.
Le Tribunal de l’Union européenne a annulé deux accords sur la pêche et l’agriculture liant le Maroc à l’Union européenne et étendus au Sahara occidental occupé, affirmant que le Front Polisario est le seul représentant légal du peuple sahraoui qui dispose de l’autonomie et de la responsabilité pour agir devant la justice européenne.
Victoire triomphale devant la justice européenne en ce mercredi 29 septembre 2021 à marquer d’une pierre blanche.
Le Maroc a été pris à partie à plusieurs reprises, accusé d’exploiter à outrance les ressources naturelles du Sahara occidental, en particulier le phosphate, le poisson et les produits agricoles, d’un montant de plusieurs milliards de dollars, privant ainsi les Sahraouis de leurs moyens de subsistance.
Ces pillages éhontés vont à l’encontre des principes établis par la Cour internationale de Justice et des Conventions de Vienne et de La Haye. La colonisation du Sahara occidental par un régime qui ne recule devant rien risque de mener, à plus ou moins longue échéance, à un épuisement des ressources terrestres et halieutiques du territoire sahraoui.
Mais le peuple sahraoui, sous la conduite du Front Polisario, est actif sur le plan juridique et mène des batailles incessantes pour la défense de ses richesses naturelles.
Soutenu par des avocats et des défenseurs acquis à sa cause, il lutte pied à pied contre le caractère illicite de l’exploitation des ressources naturelles de son sol et leur commercialisation illicite par le Maroc. Au nom de quoi le Maroc s’accapare-t-il criminellement ces richesses, alors que tout le monde sait qu’en 1963, les Nations unies inscrivaient le Sahara occidental sur la liste des territoires autonomes et n’ont cessé de réaffirmer, résolution après résolution, le droit inaliénable du peuple sahraoui à l’autodétermination ? Il n’est que l’obstination forcenée du Maroc pour se persuader du contraire.
Le conseiller juridique du Secrétaire général de l’ONU, Hans Corell, a publié en 2002 l’avis consultatif de l’ONU affirmant clairement que le Maroc n’a aucun droit de souveraineté sur le Sahara occidental. Par conséquent, il s’agit d’un fait de colonialisme qui fait main basse sur le territoire sahraoui.
L’exemple du phosphate est emblématique. Depuis le départ des Espagnols, le minerai est exploité puis commercialisé par le Maroc. Au cours de l’année 2020, il a exporté illégalement 1,1 million de tonnes de phosphate à partir du Sahara occidental pour une valeur de 170,8 millions de dollars, indique le rapport du Western Sahara Resource Watch.
Pour le combattre, le Front Polisario s’appuie sur ce réseau international. Regroupant une quarantaine d’organisations et de personnalités, ce réseau identifie les entreprises impliquées dans le transport, le traitement et le commerce du minerai. Il leur demande de cesser tout achat de phosphate tant qu’une solution juste et durable n’est pas trouvée au conflit qui oppose la RASD au Maroc.