Maroc : Le Makhzen encaisse le coup

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Le Maroc contrôle une grande partie du Sahara occidental mais n’en a pas encore obtenu le titre. Donald Trump a voulu le lui donner avant de conclure son mandat présidentiel, en signant une déclaration dans laquelle les États-Unis, avec le soutien d’Israël, reconnaissaient la souveraineté marocaine sur l’ancienne colonie espagnole. Date : 10 décembre 2020. Dix mois plus tard, la justice européenne vient de verser une cruche d’eau froide sur cette déclaration.

Depuis l’investiture de Joe Biden, Rabat a tenté d’amener la nouvelle administration américaine à adhérer à la décision de Trump. Il y a mis de la chaleur. Lorsque l’ambassadeur d’Allemagne aux Nations unies a rappelé que le statut du Sahara occidental est sous la juridiction des Nations unies, le Maroc a appelé son ambassadeur à Berlin pour des consultations et a gelé la collaboration sécuritaire avec l’Allemagne.

En digérant la sentence, le Maroc demande à l’Espagne de lui envoyer du gaz

Lorsque l’Espagne, qui maintenait une ligne prudente, a accueilli dans un hôpital de Logroño – à la demande de l’Algérie – le secrétaire général du Front Polisario, Brahim Gali, gravement atteint du covid, les dirigeants marocains ont vu l’occasion d’envoyer une sérieuse advertence au gouvernement Sánchez, qu’il considère comme faible. [Rabat suit la politique espagnole à la minute près et dispose d’un un lobby à Madrid].

L’avalanche humaine sur Ceuta était l’avertissement. Le 17 mai 2021, quinze jours après la débâcle socialiste aux élections régionales à Madrid. La crise de Ceuta aurait pu faire avancer Pedro Sánchez, mais il a pu obtenir le soutien de l’Union européenne. La ministre des Affaires étrangères, Arancha González Laya, dont le cabinet a géré l’entrée de Gali en Espagne avec un faux passeport algérien, a été touchée.

Lors du remaniement gouvernemental de juillet, Sánchez a remis la tête de González Laya au Makhzen marocain (un cercle de pouvoir qui dépasse le roi et les ministères), en remplaçant la ministre, d’affiliation indépendante, par José Manuel Albares, diplomate avec un fort instinct politique.

En août, voyant venir un orage, le roi Mohamed VI envoie des messages de détente à l’Espagne. Et l’Algérie, qui était immobile, a bougé. Dame émue : fin août, elle rompt les relations diplomatiques avec le Maroc. L’arrêt du Tribunal de l’Union européenne sur les avoirs du Sahara occidental dans les traités commerciaux entre le Maroc et l’Union européenne était prévu.

L’Algérie n’a pas tardé à annoncer qu’elle était prête à couper l’approvisionnement en gaz au Maroc dès l’expiration du contrat du gazoduc Maghreb-Europe, le 31 octobre. La coupure de gaz algérienne affecterait principalement deux centrales de production d’électricité marocaines.

La sentence était connue hier et est défavorable au Maroc : Rabat ne peut pas conclure des accords commerciaux comme si le Sahara Occidental était le sien. En digérant la sentence, Rabat a déjà demandé à l’Espagne de lui envoyer du gaz par le gazoduc Maghreb-Europe, qui pourrait aussi fonctionner dans le sens inverse : du nord au sud.

Albares et les gaziers espagnols se rendent aujourd’hui à Alger pour tenter d’empêcher la fermeture du Maghreb-Europe, du sud au nord, de nuire à l’Espagne et d’aggraver le coût du gaz en plein cauchemar du tarif de l’électricité.

Les États-Unis, observent. Israël aussi. Et la Russie, toujours présente à Alger aussi.

La Vanguardia, 30/09/2021

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