Algérie, prix des produits alimentaires, #Algérie,
Surenchère, spéculation, prix exorbitants, produits alimentaires hors de portée des citoyens qui frisent l’indécence, combien de fois le consommateur y a‐t‐il été confronté ? Les autorités chargées de réguler le marché, qui se nourrit de l’informel et du chantage des maquignons, ont été amenées à réagir sans que cela n’ait jamais eu d’effet. Aussi, il de nouveau question plus que jamais d’établir l’ordre pour maintenir l’équilibre entre l’offre et la demande, entretenir la transparence dans le cheminement normal du producteur au consommateur sans que certains circuits mal intentionnés n’aient à interférer pour spéculer sur des produits cédés à des prix record.
Encore une fois, des instructions viennent d’être données pour casser cette chaîne de spéculateurs qui prennent les ménages en otage et mettent à mal l’économie nationale. Une économie que les pouvoirs décisionnels sont en train de remettre sur les rails en intervenant énergiquement sur les textes de loi. Et c’est précisément dans cette même trajectoire juridique que les services du ministère du Commerce, en coordination avec d’autres ministères concernés, planchent sur la criminalisation de ce fléau qui ronge l’économie nationale. Instruction est donnée aux directeurs régionaux de l’agriculture et du commerce d’intervenir pour réguler les prix, et ce, en attendant son effectivité sur le terrain pour asseoir l’autorité de l’Etat qui voit ses moyens épuisés à force de pénuries créées par des parasites, envers lesquels il sera intransigeant, étant plus que jamais déterminé à agir.
Avant de passer à la vitesse supérieure, le gouvernement a mis en place d’autres dispositifs pour casser les prix des produits agricoles. Ainsi, le ministère du Commerce a autorisé les agriculteurs de vendre directement leurs marchandises au consommateur au niveau des marchés de gros et de détail. De même que les points de vente de l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) ont été mobilisés pour mettre à disposition des consommateurs des légumes secs produits localement, notamment les lentilles et les pois chiches, dont les prix unitaires respectifs sont 90 et 100 DA. Pour les professionnels, le marché parallèle constitue le terreau propice pour les spéculateurs qui parient sur la fluctuation des prix pour réaliser le maximum de bénéfice au détriment du consommateur. L’Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA) appelle à une stratégie nationale et à un plan d’action conjoint entre les départements du Commerce et de l’Agriculture à même de coordonner et de garantir une certaine stabilité des prix des produits de base.L’Union préconise aussi de mettre en place plus de marchés de proximité et de garantir la disponibilité, notamment des produits agricoles, mais aussi de contenir le marché illégal dans le réseau officiel en vue de pouvoir encadrer et règlementer l’activité commerciale et l’extraire aux forces spéculatrices.
Pour sa part, la Fédération algérienne des consommateurs appelle les autorités publiques à être «rigoureuses» dans l’application de loi et de réactiver tous les organismes de régulation du marché et de contrôle. «Les trois secteurs névralgiques, à savoir le commerce, l’agriculture et l’industrie, doivent agir dans une vision d’intersectorialité et en temps réel pour assurer la maîtrise des prix. La direction chargée de la régulation des marchés du ministère du Commerce et ses démembrements locaux sont absents sur le terrain. Idem pour l’Office national interprofessionnel des légumes et des viandes censé inonder le marché en cas de crise et dynamiser, si besoin est, le système de régulation des produits de large consommation. Tous ces organismes ne jouent pas leur rôle, d’où l’anarchie qui caractérise le marché», fait observer Mohamed Toumi, directeur exécutif de la FAC. Il estime que les produits subventionnés, destinés aux ménages, profitent aux activités commerciales, à l’image des restaurants et cafétérias, s’interrogeant sur le rôle des services de contrôle.
Concernant la criminalisation de la spéculation, notre interlocuteur voit qu’il faut «organiser avant de criminaliser», regrettant que la Fédération n’ait eu de cesse de tirer la sonnette d’alarme sur les infractions constatées de visu, mais sans suite.
UNE AUTORITÉ SPÉCIALISÉE
Par ailleurs, le juriste Mounir Gattal voit que l’arsenal juridique de lutte contre la spéculation et la concurrence déloyale existe déjà, citant la loi 04-02 relative à l’exercice des activités commerciales, modifiée en 2018 en vertu de la loi 18-08. Ce texte de loi, dans son article 22, stipule que le wali doit, après consultation des organisations de protection des consommateurs, établir la liste des commerçants devant assurer la continuité de leurs activités. Selon lui, le wali, l’agent de contrôle et les associations de protection des consommateurs peuvent exercer l’action publique contre les spéculateurs ou les commerçants faisant l’objet d’une infraction.
Aussi, les articles 35 et 38 du même texte de loi soulignent le droit à une indemnisation du consommateur par le biais des organismes de protection des consommateurs.
Le spécialiste explique que l’ordonnance 03-06 relative aux marques commerciales accorde le pouvoir au wali, s’appuyant sur les procès-verbaux des services de contrôle, d’agir contre tout commerçant contrevenant et de lui retirer le registre du commerce pour une durée déterminée.
Pour une lutte efficace contre cette pratique illégale, Gattal suggère une autorité nationale indépendante spécialisée en la matière, constituée des agents de contrôle et de la répression de la fraude.
UN TEXTE DE LOI POUR SEVIR
En réalité, la criminalisation de la spéculation sur les produits de large consommation, comme ultime recours pour stopper ce phénomène récurrent, a été une des instructions du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, lors de la rencontre gouvernement-walis tenue samedi et dimanche derniers à Alger. Le chef de l’Etat a fait part de sa colère contre ce qu’il a qualifié de «parasites et d’intrus» du marché. Ces derniers, a-t-il souligné, n’ont de souci que d’épuiser les stocks stratégiques de l’Etat en provoquant sciemment des pénuries.
«L’Etat sera intransigeant avec eux et déterminé à retrouver son autorité», a-t-il averti. Il a aussi souligné, dans ce sens, le décloisonnement des secteurs dans l’élaboration de la stratégie de développement de l’économie nationale à travers un réseau économique national intégré et solide.
A. Mehdid
Horizons, 29/09/2021
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