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A travers les élections: Le régime marocain cherche à se donner une image de démocratie
Les élections législatives et locales organisées mercredi dernier au Maroc sont importantes pour le régime marocain qui souhaite afficher une image de démocratie après une série de scandales, estime Aboubakr Jamaï, professeur de relations internationales à l’Institut américain universitaire d’Aix-en-Provence.
«Ce scrutin arrive après une série d’événements qui a écorné l’image» du régime marocain, explique Aboubakr Jamaï dans un entretien accordé au journal Le Monde.
Il s’agit, précise-t-il, «en premier lieu, du scandale Pégasus», mais aussi de la condamnation d’un certain nombre de militants marocains, démontrant ainsi «la prépondérance de la dimension sécuritaire dans la gestion du fait public au Maroc». «Aujourd’hui sont ciblés les opposants comme Omar Radi, Maâti Monjib, Soulaïmane et Hajar Raïssouni, mais aussi des citoyens lambda qui critiquent le caractère autoritaire du régime. Tenir les élections en temps et en heure est important pour Rabat qui souhaite afficher une image de démocratie», soutient-il.
Il indique, en outre, qu’il serait étonné de voir le Parti de la justice et du développement (PJD), au pouvoir depuis une décennie, réaliser les mêmes scores qu’en 2011 et en 2016.
«es compromissions et les résultats décevants à la tête du gouvernement ont fait perdre au PJD le premier et deuxième cercle de son électorat. Il a déçu la jeunesse, notamment celle qui portait les revendications du Mouvement du 20 février. La première de ces revendications était d’instaurer une vraie monarchie parlementaire», rappelle-t-il.
Interrogé au sujet du contexte socio-économique dans lequel se tiennent ces élections, Aboubakr Jamaï pense que la situation est difficile en dépit des apparences.
«Si on observe le Maroc de l’étranger, on peut croire à un modèle économique performant : de beaux aéroports, de nouvelles autoroutes, Tanger Med, le TGV. Mais toutes ces infrastructures sont des éléphants blancs, car elles n’ont pas l’effet d’entraînement qu’elles devraient avoir sur la population. Le taux de pauvreté n’a pas diminué, le chômage des jeunes empire», affirme-t-il.
«Les événements d’octobre 2016 dans le Rif ont obligé à reconnaître l’échec du modèle économique. Pour moi, le nouveau modèle de développement du Maroc, défini par une commission spéciale mandatée par le roi Mohammed VI après la contestation de 2016, est au hirak du Rif, ce que la Constitution était pour le Mouvement du 20 février», dira-t-il.
«En 2011, le roi avait lui-même mandaté une commission pour établir les termes de la nouvelle Constitution. En 2017, c’est le même procédé avec la Commission spéciale sur le modèle de développement (Csmd).
Un groupe de personnalités hétéroclite présidé par un ancien ministre de l’intérieur, Chakib Benmoussa, a écrit un projet pour le Maroc, sans s’attaquer au fond du problème : «les défaillances institutionnelles», souligne-t-il.
«Un système autoritaire ne permet pas une économie de marché qui tient la route. Il y a nécessairement de la corruption et des secteurs oligopolistiques, voire monopolistiques», explique Aboubakr Jamaï.
Or, aujourd’hui, ce projet élaboré par le roi devient le cadre référentiel que les partis politiques doivent suivre. C’est ce que le roi a rappelé explicitement dans son discours du 20 août 2021. C’est bien la preuve que ces élections ne sont pas démocratiques. Des législatives sont censées déterminer une majorité gouvernementale qui définit un projet politique et économique. Mais on nous dit : «le projet est déjà là !», déplore l’universitaire.
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