La configuration de l’APN devra aboutir à la formation d’un gouvernement issue de la majorité présidentielle. Un exécutif sera formé par les cadres des trois partis nationalistes arrivés en tête, à savoir le FLN, le RND et Front El Moustakbel, ainsi que des personnalités de la société civile.
Le FLN n’ira pas au musée, bien au contraire. Il sera la pièce maîtraisse du pouvoir législatif et conduira le prochain gouvernement de la majorité présidentielle. Même si cette perspective n’a pas encore été officiellement évoquée entre les trois partis du courant nationaliste bien représentés à la chambre basse du parlement, il n’en demeure pas moins que tout indique un regroupement du FLN, du RND et du Front El Moustakbel autour du programme du président Abdellmadjid Tebboune, jusqu’en décembre 2024, date de la prochaine élection présidentielle. C’est le principal enseignement à tirer des résultats sortis des urnes des élections législatives du 12 juin dernier. Cette réalité politique dessinée par les suffrages exprimés a laissé une belle place aux indépendants, dont les listes ont fait une percée remarquable. En effet, les indépendants ont créé la surprise en s’érigeant deuxième force politique dans le pays, une première du genre en Algérie. Ils ont réussi à s’octroyer 87 sièges après le parti du FLN qui a décroché 105 sièges.
Cela étant dit, le poids du FLN, combien même déterminant n’a pas moins baissé, puisque le parti passe de 161 sièges dans une APS de 462 sièges, lors du scrutin de 2017 à 105 sièges. Le parti aura perdu, cette fois-ci, ses foyers dans plusieurs wilayas, un constat qualifié de «perte politique» de sa représentation. «Le boycott dont a tiré profit le parti, en présence d’une base électorale classique structurée et une culture ancrée chez les militants qui votent quels qu’en soient les fustigations», estiment les observateurs de la scène nationale. Il existe néanmoins une autre explication qui fait état de l’adaptation «avec les nouvelles tendances politiques locales en changeant les anciennes figures et mettant en avant de nouveaux candidats, notamment ceux qui n’ont jamais occupé de postes de responsabilité au sein du parti», selon les mêmes observateurs.
Il reste le nouveau poids, en hausse, des indépendants. Les résultats qu’ils ont obtenus induiront inéluctablement un changement des rapports de forces traditionnels. Le Président de la République s’est engagé à financer la campagne électorale des candidats indépendants âgés de moins de 40 ans pour écarter l’argent sale de la politique.
La première force d’opposition aura immanquablement été le MSP qui a réussi une progression spéculaire en doublant le nombre de député dans l’Assemblée. De 34, en 2017, il passe à 64 sièges. Il fait mieux que le RND qui avec ses 57 sièges a régressé, pas tant que cela, puisqu’il conserve son groupe parlementaire, alors que certains prédisaient sa disparition.
Ces élections ont permis à des partis émergents de confirmer leur progression, à l’image du parti Front El Moustakbal qui a remporté 48 sièges et le Mouvement El Bina qui a enregistré sa présence dans le couloir de la députation avec 40 sièges. La présence d’autres partis nouvellement agréés a été remarquée également dans l’hémicycle du Parlement, comme le parti Voix du peuple (PVP) qui s’est adjugé trois sièges, alors que d’autres partis sont aux abonnés absents tel que Tajamoue Amel El Djazair (TAJ).
Il faut dire que l’organisation de ces élections s’est faite dans un contexte de mise à l’écart totale de l’Administration qui n’a plus de lien avec les élections, après que tout ce qui se rapporte à l’opération électorale a été confié à l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE), ce qui reflète «la véritable image de la scène politique en Algérie, après le Hirak populaire authentique». Le nouveau mode de scrutin a eu pour résultats, deux listes de partis ayant raflé, pour la première fois, l’ensemble des sièges dans les deux wilayas de Djelfa et de Mostaganem. Ce nouveau mode a débouché également sur le fait qu’aucune liste n’a dépassé le seuil de 5% des suffrages à Constantine, ce qui a mené à la répartition des sièges en fonction des résultats obtenus.
La configuration de l’APN devra aboutir à la formation d’un gouvernement issue de la majorité présidentielle. Un exécutif sera formé par les cadres des trois partis nationalistes arrivés en tête, à savoir le FLN, le RND et Front El Moustakbel, ainsi que des personnalités de la société civile pour donner le change aux indépendants, deuxième force politique du pays. Le chef de l’Etat pourra, ainsi gouverné à l’aise grâce à une majorité très stable, ce qui éviterait toute crise politique dans les quatre années à venir, tout au moins.
Yahia Bourit
Ouest Tribune, 17 juin 2021
Etiquettes : Algérie, élections législatives, majorité parlementaire, formation du gouvernement,