Algérie : Jours de doute

Comme il fallait bien s’y attendre, les grandes foules n’étaient pas au rendez-vous du scrutin législatif d’avant-hier. Seuls les partis et les candidats ayant participé ont cru sérieusement qu’ils représentaient la majorité du corps électoral. Mais la réalité des urnes- même quand elles sont abusivement bourrées comme on l’a bien vu dans un bureau de vote à Msila- livre un autre verdict. Les Algériens ont majoritairement tourné le dos aux spectacles électoraux et plus généralement à la politique. C’est là une donnée sociopolitique qu’il faut bien admettre et analyser. Le nombre d’électeurs se rétrécit comme une peau de chagrin. Pourtant, les législatives sont censées mobiliser plus de votants en ce sens qu’elles s’appuient sur d’autres considérations plus subjectives, comme l’appartenance tribale et la connaissance des candidats. Mais cela n’a pas suffi cette fois-ci.

Le taux provisoire de 30,20% de participation, annoncé par le président de la Haute Autorité Indépendante des Elections (ANIE), est largement en deçà des espérances. De ce fait, la crédibilité de la prochaine Assemblée populaire nationale est, pour le moins, sujette à caution. Et la seule question qui vaille est de savoir comment on en est arrivé à ce triste résultat ? Il y a surtout la qualité des partis et des candidats engagés. Quand vous entendez un chef de parti qui se gargarise d’être à la tête de la première force politique et qui, en plus, est d’obédience islamiste proposer à l’entreprise Saidal de produire du….Viagra » pour booster l’activité politique, il ne fallait pas espérer grand-chose. Il n’y a plus ni politique ni morale. Ou alors un autre qui présente les candidates de sa liste comme étant des  » fraises sélectionnées » dans une allusion maladroite à leur beauté, comme si elles allaient concourir dans un défilé de mode !

Comment s’attendre après cela à un meilleur résultat et à une grande participation ? Où est le discours mobilisateur sur des thématiques pertinentes et porté par des candidats intellectuellement costauds et politiquement engagés ? C’est cela qui fait la différence dans un scrutin législatif. C’est cela qui mobilise l’électeur passif et indécis. Et c’est donc à ce niveau que se situe la faillite intégrale de ces partis et de ces candidats  » indépendants » pour qui l’objectif d’être l’heureux élu prime sur toutes autres considérations.

En ce jour d’après, on est censé avoir plus de visibilité politique. Or, le sentiment ambiant est que ce sont des jours de doute qui commencent. Une assemblée aussi « mal élue » ne risque pas de peser lourd sur les équilibres du pouvoir alors même qu’elle traine depuis longtemps la réputation peu glorieuse de « chambre d’enregistrement ». Peut-être même qu’on n’est pas au bout de notre surprise et qu’on aura droit à un retour vers le passé et la victoire du PFLN ! Qui sait ?

Par Imane B.

L’Est Républicain, 14 juin 2021

Etiquettes : Algérie, élections législatives, partis politiques, taux de participation, absentéïsme,

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