Algérie : « Ma mission est de remettre sur pied le pays» (Tebboune)

Tebboune au magazine Le Point : « Ma mission est de remettre sur pied le pays»
Par Mohamed Mecelti

Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a assuré dans un entretien accordé au magazine français «Le Point», paru jeudi 3 juin que les élections législatives du 12 juin constitueront une grande avancée vers la reconstruction des institutions de l’Etat, affirmant ne jamais céder au «diktat d’une minorité » qui refuse l’élection et menace la stabilité de l’Algérie.

Le chef de l’Etat, qui s’est exprimé sur divers sujets d’actualités nationale et internationale, notamment les marches du mouvement de protestation populaire interdites depuis maintenant trois semaines, a signalé que « ce qui reste du Hirak », qui a dévié de sa trajectoire et s’oppose actuellement au progrès et au développement du pays, ne représente qu’une minorité, car «le Hirak authentique et béni a choisi la voie de la raison en allant à l’élection présidentielle» du 12 décembre 2019.

S’agissant de la vague d’arrestations des partisans du Hirak accentuée au cours du mois de mai dernier, M. Tebboune a souligné qu’il était le premier à tendre la main aux gens du Hirak et à les recevoir, lorsque les marches, après la présidentielle, rassemblaient encore de 20 000 à 25 000 manifestants à travers le pays, signalant que les « gestes » d’apaisement, telles que la libération des détenus et l’appel au dialogue, ont été interprétés comme une faiblesse.

Pour le président Tebboune, face aux appels « clairs » à la violence lancés par le mouvement Rachad (mouvement d’opposition islamiste en exil) pour « affronter les services de sécurité et l’armée », et aux tentatives « d’agir avec des voitures piégées » planifiées par le MAK (Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie), « la patience à des limités ».

Il convient de noter, que le mouvement Rachad et le MAK ont été classés par le Haut Conseil de Sécurité le 18 mai, sur la liste des organisations terroristes.

« Tant qu’on était au stade des idées, il n’y avait pas de problème, mais les appels à la violence, c’est autre chose », a-t-il averti, indiquant que « le manifestant et le policier qui maintient l’ordre public sont les enfants de la même République. Je n’ai pas le droit de les laisser s’affronter ».

M. Tebboune, qui considère que le Hirak actuel est « très hétéroclite », a souligné qu’« aujourd’hui, dans ce qui reste du Hirak, on trouve de tout, il y en a qui crient « Etat islamique ! » et d’autres qui scandent « pas d’islam ! », relevant que les manifestants expriment actuellement « une colère » et qu’il ne s’agit plus du « Hirak originel ».

Après avoir chargé le courant démocratique qui «rejette les urnes et prône la désignation », le locataire d’El Mouradia s’est dit confiant de la réussite du rendez-vous électoral eu égard « l’engouement pour ces législatives, notamment chez les jeunes ».

Ceux qui s’opposent aux élections sont « une minorité qui se présente comme une majorité grâce à une médiatisation à outrance, notamment outre-mer », a affirmé le président, alertant que tous ceux qui veulent entraîner le pays vers l’aventure sont en train de perdre leur temps».

A une question sur la possibilité de se retrouver avec une majorité parlementaire, et donc gouvernementale, islamiste, M. Tebboune a été catégorique, «l’islamisme en tant qu’idéologie, celle qui a tenté de s’imposer au début des années 1990 dans notre pays, n’existera plus jamais en Algérie », relevant néanmoins que « l’islam politique n’a pas bloqué le développement de pays comme la Turquie, la Tunisie ou l’Egypte », et que cette vision de l’islam politique ne le gêne pas tant qu’elle «n’est pas au-dessus des lois de la République qui s’appliqueront à la lettre ».

Interrogé sur les reformes politiques nécessaires pour réajuster le pays sans parti présidentiel et sans l’adhésion de l’opposition, le président, qui n’a pas écarté définitivement la création d’un parti présidentiel, a affirmé qu’une multitude des partis politiques du pays ne sont pas représentatifs d’un courant d’idées, mais sont construits autour d’une personne qui s’éternise à leur tête sans aucune volonté d’ouverture ou de réformes, précisant qu’il a été le candidat du peuple et de la jeunesse et non pas des partis.

« Une partie de l’administration sensée être neutre et servir les administrés s’est mise au service (…) d’un groupe de voleurs », a-t-il avoué, précisant qu’il ne pensait pas à un deuxième mandat et que sa mission est de remettre sur pied le pays et reconstruire les institutions.

M. Tebboune est revenu a également sur le rôle de l’armée, qui selon lui, a joué un rôle positif, notant que « si nous n’avions pas une armée aussi moderne et aussi professionnelle, la situation en Algérie serait pire qu’en Libye ou en Syrie. Je rappelle que l’armée s’est retirée de la politique depuis la fin des années 1980. L’époque où des officiers de l’armée siégeaient au comité central du FLN (ex-parti unique) est terminée. L’armée ne fait plus de politique ».
Et d’ajouter : « «Si elle avait voulu prendre le pouvoir, elle l’aurait fait. C’était une demande populaire, le peuple l’appelait à faire cesser la comédie du cinquième mandat et la déliquescence de l’État. L’armée n’a pas pris le pouvoir et ne le prendra pas, parce qu’elle est légaliste ».

S’agissant du cas du journaliste Rabah Kareche en détention à la prison de Tamanrasset, le chef de l’Etat s’est brièvement exprimé sur ce sujet, indiquant par contre qu’ « Il a joué à tort au pyromane sur un sujet très sensible. Très grave ».

Pour rappel, Rabah Karèche, a été placé en détention provisoire le 19 avril dernier, après avoir passé une nuit en garde à vue. Le journaliste est poursuivi pour « atteinte à l’intégrité du territoire national », « publication et diffusion volontaire de fausses informations susceptibles de porter atteinte à l’ordre public et usage de divers moyens pour porter atteinte à la sûreté et l’unité nationales ». La date de son procès n’est pas encore fixée.

Le Jeune Indépendant, 03 juin 2021

Etiquettes : Algérie, Abdelmadjid Tebboune, reconstruction des institutions de l’Etat, stabilité de l’Algérie, Hirak, Rachad, MAK, élections législatives,

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