par Maâmar Farah
En ces temps-là, la cause palestinienne enflait dans nos cœurs, dans nos pensées et dans nos écrits déjà. Elle ne s’habillait pas de cette marque confessionnelle intolérable qui en fait une espèce de guerre de religions encombrante, installant une haine incompréhensible envers les juifs. Notre ennemi était et demeure le sionisme. Pas d’embrouillement possible ! Il y avait, dans les mouvements de résistance, des chrétiens, des musulmans, des athées et des juifs antisionistes. Aujourd’hui, la solidarité du peuple algérien avec la cause palestinienne est restée entière mais elle n’a plus ce caractère rebelle progressiste et humaniste qui faisait d’ailleurs d’Alger la capitale des révolutionnaires. Alger accueillait à bras ouverts ceux qui faisaient parler la poudre aux quatre coins de la planète. Ces patriotes exhalaient la liberté ; ils agissaient pour les droits de leurs peuples. Ils n’avaient pas besoin de visas pour entrer chez nous ! Ils venaient des profondeurs de l’Afrique colonisée ou souillée par l’apartheid ; ils venaient d’Asie ; ils venaient d’Europe et même de France où les mouvements de libération de la Corse, de la Bretagne ou du Pays Basque avaient leurs représentations à Alger. Personne n’osait nous recommander de chasser ces femmes et hommes combattant pour la liberté mais qui demeuraient des « terroristes » pour les impérialistes. L’Algérie décidait en toute liberté. Aucune force au monde ne pouvait lui dicter sa conduite dans les affaires intérieures et extérieures. Même pas les États-Unis qui avaient très mal accueilli l’ouverture d’un bureau des « Black Panthers » à Alger. Avons-nous retrouvé cette autonomie de la décision politique après des années de courbettes face aux étrangers ? Il y a, assurément, un air de ressemblance entre les deux époques et même si, pour le moment, ça ne rapporte pas gros, cela signifie aussi que la décision économique ne sera plus prise ailleurs, au profit d’autrui, et qu’elle n’ira plus jamais dans le sens contraire aux intérêts du pays.
Des décrets importants ont été pris concernant la préférence des entreprises publiques et privées nationales dans l’octroi des marchés. Elles mettent un terme à des dérives graves et avilissantes. Depuis que l’on a découvert que le travailleur algérien est un « fainéant » et que l’on a fait appel massivement aux étrangers même pour construire un mur, une sale mentalité s’est propagée chez les décideurs. La préférence allait toujours aux étrangers, même lorsque, à travail égal, la performance était du côté algérien. Dans ces mêmes colonnes, nous avons fait état de situations atterrantes en citant des entreprises privées dans le domaine informatique qui se voyaient toujours écartées des marchés malgré les prix futiles de leurs prestations. La suite est renversante : ces entreprises étrangères, payées dix fois plus que les offres algériennes, s’empressaient aussitôt de confier les travaux aux jeunes d’ici en leur cédant une partie infime des sommes pharamineuses reçues.
L’Algérie, c’était le Pérou ! Des sociétés accouraient de partout ! Alors que la décision politique interdisait aux agences de publicité privées de traiter avec les entreprises publiques et l’administration, des sociétés de pub internationales s’installaient, telles Karoui & Karoui, d’autres libanaises, marocaines, françaises, etc. pour toucher le pactole, y compris celui versé par des sociétés publiques ! Je sais que 1 500 agences de régie publicitaire ont baissé le rideau par la faute de la décision de M. Ouyahia. Pendant ce temps-là, les boîtes étrangères se sucraient par milliards ! La même chose peut être dite à propos de plusieurs autres secteurs. L’argent du pétrole allait dans les poches de quelques oligarques et de leurs amis étrangers. Cette époque est finie. L’argent restera ici et il ira dans les projets publics et la solidarité nationale ; cet argent ira aussi dans les poches des jeunes entrepreneurs prêts à relever tous les défis.
La récupération de la décision politique et l’affermissement de la décision économique permettent à l’État de contrôler la situation financière du pays en vue d’équilibrer les budgets et d’éviter une trop grande pression. À ce titre, et c’est notre avis personnel, si le rejet du FMI est un bon signe, le refus d’imprimer l’argent ne semble pas répondre aux besoins de l’heure qui se traduisent par la nécessité de mettre sur le marché financier des masses importantes d’argent liquide.
Dans beaucoup de pays, y compris les grandes nations économiques, on continue d’imprimer de l’argent pour faire face à ces situations. Les chiffres du déséquilibre budgétaire en Algérie sont dérisoires par rapport à ceux de ces puissances. Imprimer de l’argent ici est un signe de souveraineté nationale et un acte de solidarité avec les couches défavorisées qui sont les premières destinataires de cet argent. En outre, cette mesure permettra de mettre un terme définitif aux débordements honteux que l’on remarque devant les bureaux de poste.
Le soutien des prix étant une constante de l’Algérie indépendante, il faut aussi signaler ce retour aux grandes opérations de solidarité avec les masses rurales abandonnées dans des hameaux dépourvus d’un minimum de conditions de vie décentes. Les mesures prises en faveur de ce que l’on appelle les « zones d’ombre » sont salutaires à plus d’un titre car elles permettent d’apporter le progrès à des Algériens qui attendent depuis longtemps les bienfaits de l’indépendance. Une critique cependant : n’est-il pas urgent de favoriser le regroupement de ces populations avant de leur venir en aide ? L’habitat rural permet à chaque possédant de bâtir sa demeure sur son lopin. Vous imaginez l’effort colossal et les sommes incroyables qu’il faut mobiliser pour toucher ces centaines de milliers d’implantations éparpillées à travers tout le territoire national !
Regrouper c’est faire comme dans les années 70 mais avec moins de dépenses publiques, en favorisant l’autoconstruction. Malgré une situation économique fragile et compliquée par la pandémie, un monde politique divisé et la persistance des « printanistes » à vouloir pervertir un Hirak dont la majorité des membres sont simplement des Algériens qui aiment leur pays mais qui pensent autrement, l’Algérie est debout ! Elle ne baisse plus les yeux devant le Nord ; elle hurle de sa puissante voix retrouvée à l’ONU ; elle n’abandonne pas la RASD et apporte son éternel message de paix et de solidarité à l’Afrique. Pour le journaliste qui a attendu cela des décennies durant et a continué à croire fermement en cette renaissance, en ne changeant pas d’un iota ses positions, c’est du pur
bonheur ! L’acharnement contre l’Armée nationale populaire est symptomatique de la haine que certains milieux éprouvent envers ce bastion inexpugnable de la souveraineté nationale.
Cette ANP est attaquée de toutes parts parce qu’elle demeure le dernier rempart contre les plans de Soros, contre les sinistres printemps colorés, contre la contrerévolution synonyme de destruction et de chaos ! Non, le plan des impérialistes et des réactionnaires arabes affichant désormais clairement leur putride alliance avec les sionistes ne passera pas ! Ce n’est pas une vue de l’esprit. Les experts sionistes de la déstabilisation, réunis avec leurs frères marocains, sont désormais à quelques encablures de Tlemcen. La vigilance est de rigueur : c’est le message non codé de l’armée au peuple algérien.
M. F.
Le Soir d’Algérie, 27 mai 2021
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