par Abdou BENABBOU
Rapts, enlèvements, agressions, viols, matricides, infanticides, les signes des esprits déboussolés se multiplient en nombre incalculable au cœur de la société algérienne pour donner au vivre ensemble une dimension insoutenable. La décennie noire a laissé une tare et une plaie psychique profonde pour que la violence multiforme soit ancrée jusqu’à devenir un label d’un pays ayant perdu tous les repères de la conscience et de la civilité. On a l’impression qu’une déshumanisation s’est installée pour que la valeur de la vie ne vaille plus qu’un bas prix. Il arrive à l’Histoire d’infliger des rides insupportables à des peuples n’ayant pas su s’adapter à la marche du temps pour échapper aux pièges de la vie.
Le reste du monde n’est pas épargné par une terrifiante culture de l’agressivité et le nouveau siècle semble couvrir la majorité des êtres d’une chape d’aigreur comme si le vivre de soi était devenu un exercice embarrassant avec la seule et unique priorité d’effacer le vivre de l’autre. La matérialité a vaincu et mis à terre le sens de la mesure et de la concorde pour que les hommes s’approprient les féroces segments de l’animalité.
L’agression dont ont été victimes les infortunées enseignantes esseulées de Bordj Badji Mokhtar n’est que la représentation d’une déperdition des âmes d’un groupe de criminels appartenant à une nouvelle race d’acteurs dont le premier tribut est la sauvagerie. On ignore encore si l’érection démultipliée des tribunaux et le recrutement à bras raccourcis de nouveaux policiers et gendarmes viendra à bout de la mal-vie qui s’est installée jusqu’à être décelée dans les regards provocateurs d’une jeunesse déboussolée aux coins des rues. Travers pernicieux d’une démographie cancéreuse, crise économique étendue sont des héritages imposés par des gouvernances débridées. Penser ne pas pouvoir se mettre debout aujourd’hui ne relève pas du pessimisme. Remettre dans le droit chemin un jeune fortement convaincu qu’il n’a que le couteau et le sabre comme éléments de langage serait un exploit. Quand bien même elle est gigantesque, de plus en plus diarrhéique, la prise en charge des revendications sociales ne suffira pas.
L’Histoire, encore elle, a immanquablement enseigné aux êtres les fatidiques finalités résultantes quand les sociétés retiennent la violence comme recette de vie. Les Algériens et la plupart du reste des peuples ont souvent tendance de tourner le dos à cette vérité.
Le Quotidien d’Oran, 23 mai 2021
Etiquettes : Algérie, société, Rapts, enlèvements, agressions, viols, matricides, infanticides, enseignantes,
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