La 117e marche du hirak a été réprimée ce vendredi. Des centaines de personnes, y compris des journalistes et photographes qui étaient en couverture, ont été interpellées. Une cinquantaine d’entre elles ont été placées en garde à vue et vont être présentées devant le procureur à partir d’aujourd’hui.
Plusieurs partis et personnalités politiques, ainsi que des ligues de droits de l’homme ont dénoncé la répression qui a marqué ce 117e vendredi. Ce «changement» dans la gestion des manifestations hebdomadaires par les autorités était prévisible, dans la mesure où il survient après le communiqué du ministère de l’Intérieur du 9 mai, dans lequel il est demandé aux «organisateurs» du hirak (c’est mentionné en ces termes dans le communiqué, ndlr) de communiquer aux autorités l’itinéraire, les horaires et les slogans de la marche. Ceci sachant que les marches du mardi sont empêchées depuis trois semaines.
Visiblement agacé par ces manifestations de rue, et alors que les élections législatives approchent, rejetées d’ailleurs par ce même hirak, le pouvoir a décidé, selon toute vraisemblance et au vu de l’impressionnant dispositif et du nombre important d’éléments de la police mobilisés vendredi, de tenter de mettre un terme à ce mouvement populaire. «Par le recours à la répression, c’est le pouvoir qui s’est mis à nu, dévoilant sa vraie nature autoritaire.
C’est la promesse de l’Algérie nouvelle qui est démasquée», a indiqué, dans une déclaration, Saïd Salhi, vice-président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH). «Saut dans l’inconnu. Après les journalistes et les chefs de parti, les arrestations touchent désormais les avocats», a écrit, pour sa part, sur les réseaux sociaux, le sociologue Nacer Djabi. L’approche, donc, de cette élection, qui est rejetée et par le hirak et par la classe politique de l’opposition, a remis sur la table le débat autour de la démarche unilatérale du régime.
Et sa décision de réprimer les marches de ce vendredi confirme qu’il n’a nullement l’intention de s’écarter de la feuille de route qu’il a établie. Si depuis le départ, aucune «solution politique» n’a été envisagée, se contentant de proposer des rendez-vous électoraux, et dans un climat marqué plutôt par une répression continue (les interpellations et mises sous mandat de dépôt par exemple n’ont pas cessé depuis février 2019, même s’il y a eu, entre-temps, deux épisodes de libérations), ces dernières semaines, il semble que le pouvoir commence à perdre patience en décidant d’opter désormais pour la «manière forte».
Dans le discours, les différents responsables tentent, tant bien que mal, de convaincre les Algériens que les élections proposées, avec la nouvelle Constitution et la loi électorale, sont des réponses aux revendications du hirak.
Or, la répression qui a caractérisé la gestion du mouvement populaire, et ce, depuis le début et non seulement ces derniers mois, ne fait que renforcer le sentiment chez bon nombre de hirakistes que les choses n’ont pas changé. Une situation complexe qui, d’après l’opposition, ne peut être réglée techniquement, c’est-à-dire par le biais d’élections législatives qui n’offrent pas toutes les garanties de transparence, alors que les champs médiatique et politique sont fermés.
El Watan, 16 mai 2021
Etiquettes : Algérie, Hirak, manifestations, répression,
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