par Abdou BENABBOU
La polémique née autour des écoles coraniques entre le ministre de l’Education et l’organisation des parents d’élèves est un faux débat si l’on n’en retient pas seulement la mise en lumière d’une société algérienne en profonde transformation. Les Algériens dans leur grande majorité ne sont plus dans l’enfournage de deux modes de vie parfois antinomiques et les esprits comme les convictions sont braqués en direction de là où le soleil prend ses levers. Les rues et les boulevards n’ont pas besoin d’être observés au scanner pour s’apercevoir qu’une grande page a été tournée et que la seule lecture des habillements vestimentaires est indicatrice qu’un chamboulement civilisationnel, sinon culturel s’est opéré ces dernières décennies.
En fait, la genèse des écoles coraniques remonte à des temps lointains et elles préfiguraient déjà avec leurs particularités le condensé des crèches d’aujourd’hui. Mais à l’époque, on était encore loin de l’institutionnalisation des universités islamiques érigées comme des labels et frontons inamovibles contre l’atmosphère et les airs occidentaux.
L’école coranique n’est plus seulement à proximité des mosquées, mais elle s’abrite aujourd’hui au cœur des foyers et des demeures où les parents se font un point d’honneur à privilégier pour leurs enfants l’apprentissage par cœur des versets du Coran avant toute matière d’enseignement. Le fait est prenant comme l’est depuis quelque temps déjà la garniture des épaules des hommes par les tapis de la prière chaque vendredi. Les prénoms des nouveau-nés ont pris des couleurs allégoriques et le langage s’est détaché de l’ancestral dialecte. La popeline sur les têtes féminines a remplacé la soierie des chevelures tressées et des queues de cheval malgré que la moulure des jeans reste omniprésente mais en dérisoire consolation.
Il est très significatif que ce soit l’organisation des parents d’élèves qui s’effarouche la première contre un ou deux éléments d’analyse formulés par le ministre de l’Education relatifs à son secteur. Cette montée au créneau au demeurant virulente est à la hauteur de la force du changement d’une société qui a définitivement décidé de basculer dans des rituels et des us dont l’ampleur n’est plus à démontrer.
Le Quotidien d’Oran, 25 avr 2021
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