Treize (13) pays d’Afrique et d’Asie viennent d’être « épinglés » par le Fonds monétaire international dans un rapport consacré aux campagnes de vaccination contre le coronavirus, qui se déroulent actuellement dans le monde, mais à des rythmes qui diffèrent d’un pays à l’autre. Ainsi, l’Algérie, la Tunisie, l’Egypte, la Libye, l’Iran, l’Irak, la Jordanie, l’Afghanistan, le Liban, l’Ouzbékistan, le Pakistan, Djibouti et la Palestine sont classés comme des pays où la vaccination contre la Covid-19 est jugée lente. « Les 13 pays et territoires de ce groupe ont commencé les vaccinations avec une couverture limitée et il n’est généralement pas attendu qu’ils atteignent une partie importante de leur population jusqu’à la mi-2022 au plus tôt, sauf dans le cas d’efforts supplémentaires tels que l’aide de la communauté internationale », prévoit le FMI dans son rapport.
Ce constat sans appel contraste avec les prévisions élaborées par les autorités sanitaires en Algérie, qui s’étaient fixées comme objectif de vacciner 70 % de la population avant la fin de l’année 2021. L’Algérie a reçu jusqu’à présent 664 000 doses de vaccins, mais compte sur la prochaine entrée en service (septembre selon le ministre de l’industrie pharmaceutique) de l’usine Saidal qui produira localement le vaccin russe Sputnik V, pour s’assurer une autonomie et accélérer la cadence de vaccination. Pour l’instant, on en n’est pas encore là et de nombreux professionnels de la santé craignent déjà le pire avec la recrudescence des contaminations et la propagation inquiétante des variants Covid. Parmi eux, le professeur Mohamed Belhocine, président de la cellule opérationnelle chargée d’investigation et de suivi des enquêtes épidémiologiques au ministère de la Santé, et épidémiologiste mondialement reconnu.
Selon lui, il y a lieu d’admettre que « la propagation est de plus en plus rapide ». « Je le crains malheureusement », a-t-il ajouté, avant de reconnaitre que l’Institut Pasteur d’Algérie ne possède pas les capacités nécessaires pour tester un maximum de personnes et réaliser un grand nombre de séquençages, qui lui permettent de donner la totalité de l’image de la situation. « Je n’ai pas la cause formelle, mais comme d’autres pays sont passés par là avant nous, il est probable que cette accélération du nombre de contaminations avec tout ce qu’elle comporte comme cas sérieux qui nécessitent l’hospitalisation ou des soins intensifs, soit liée à la propagation des variants », a-t-il estimé.
Dans ces conditions, il a tout simplement préconisé le retour au confinement. « Si la pression continue de façon importante sur le système de santé, j’ai bien peur que oui, qu’il faille probablement revenir à des mesures plus strictes », a-t-il soutenu. Dénonçant le non-respect des mesures-barrières et l’indiscipline généralisée, il a appelé à une intervention des autorités publiques. « Il faut peut-être faire du rappel à l’ordre et si c’est nécessaire bien évidemment, il faut aller à des mesures de confinement soit géographiquement ciblé, soit généralisé », a-t-il souligné.
« La situation tend à montrer que c’est partout dans le pays que c’est ainsi. La situation est assez préoccupante et la possibilité d’un retour à un confinement strict n’est pas à écarter », a-t-il estimé. « On est loin du compte et malheureusement on risque de payer ça en vies humaines supplémentaires perdues indûment, en souffrance supplémentaire sociale et économique avec un retour à un confinement plus strict, et bien sûr en dépenses financières parce que tout cela coûte de l’argent (hospitalisation, test PCR…) », a-t-il déclaré.
Relevant le retard enregistré dans l’opération de vaccination, le professeur Mohamed Belhocine a déploré le fait que l’Algérie n’ait pas pu davantage. « La situation aurait été plus confortable si on avait vacciné quelques millions ou une dizaine de millions de personnes au moment où nous affrontons cette remontée épidémique », a-t-il fait savoir. Selon lui, « même s’ils ne sont pas efficaces à 100% contre les variants, les vaccins protègent quand même ». « Il est établi qu’ils protègent de façon très importante contre la mortalité et contre les formes graves », a-t-il tenu à préciser, avant d’évoquer les réticences constatées vis-à-vis du vaccin AstraZeneca. « Il faut relativiser », a-t-il dit, et de rassurer que pour « l’instant, beaucoup de pays continuent à l’utiliser, n’oublions pas que le Royaume-Uni a vacciné des dizaines de millions avec l’AstraZeneca et continue à le faire, il n’y a pas de raison de ne pas continuer ».
Mohamed Mebarki
L’Est Républicain, 24 avr 2021
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