Dans la nuit du 21 au 22 avril 1961, quatre généraux français opposés à l’indépendance de l’Algérie font sédition et s’emparent d’Alger avec des légionnaires et parachutistes, défiant le général de Gaulle au pouvoir.
Le putsch des généraux Maurice Challe, Edmond Jouhaud, André Zeller, en liaison avec le général Raoul Salan qui les rejoint le 23 depuis l’Espagne, sera bref, à peine cinq jours, et il échouera.
L’histoire est en effet en marche : le 16 septembre 1959 de Gaulle a admis le droit des Algériens à l’autodétermination et, le 8 janvier 1961, les Français ont voté à 75% en sa faveur lors d’un référendum ouvrant la voie à l’indépendance de l’Algérie colonisé par la France.
Pour une partie des cadres de l’armée française, déjà humiliés par la défaite en Indochine, c’est une trahison insupportable du pouvoir, incarnée par le général de Gaulle devenu président de la République, et qui vient
d’évoquer, le 11 avril, un « Etat souverain » en Algérie.
Les quatre putschistes ne seront pas seuls, d’autres généraux au rang moins prestigieux les suivront, mais sans un basculement total de la haute hiérarchie militaire et sans les soldats de l’armée de conscription.
L’indiscipline de certains chefs et de certaines troupes a abouti ce matin à Alger à placer les pouvoirs civils et militaires dans l’impossibilité d’exercer leur commandement. La situation dans le reste de l’Algérie est calme. Le gouvernement a pris cette nuit les mesures nécessaires, qui seront publiées dans le courant de la journée.
Dans la nuit du 21 au 22 avril, le 1er régiment de parachutistes du commandant de Saint-Marc, cantonné à Zeralda, fait route sur Alger et investit le Palais d’été où siègent la Délégation Générale, les bâtiments officiels, la radio et les centraux téléphoniques et télégraphiques. Le centre d’Alger est quadrillé de chicanes.
Le délégué Général du gouvernement, Jean Morin, et le ministre des Travaux publics, Robert Buron sont arrêtés ainsi que le Général Fernand Gambiez, commandant en chef des troupes en Algérie, qui tentait de regagner son PC. Le 22 au matin, l’AFP, dont les journalistes à Alger ont au petit jour été empêchés de travailler par les putschistes, annonce l’état de siège, puis, d’après un communiqué diffusé sur Radio Alger, que « l’armée a pris le pouvoir en Algérie et au Sahara ».
L’Agence relaie une déclaration du ministère de l’Information : « L’indiscipline de certains chefs et de certaines troupes a abouti ce matin à Alger à placer les pouvoirs civils et militaires dans l’impossibilité d’exercer leur commandement. La situation dans le reste de l’Algérie est calme. Le gouvernement a pris cette nuit les mesures nécessaires, qui seront publiées dans le courant de la journée ».
A Alger, le général Challe lance un appel : « L’armée s’est assurée le contrôle du territoire saharo-algérien. L’opération s’est déroulée conformément au plan prévu. Je suis à Alger avec les généraux Zeller et Jouhaud, en liaison avec le général Salan, pour tenir notre serment : garder l’Algérie. »
Le général Zeller décrète l’état de siège « sur l’étendue des 13 départements français d’Afrique » tandis que le général Pierre-Marie Bigot, commandant la 5e région, se place sous les ordres du général Challe. Dans l’après-midi, Radio-Alger annonce qu’Oran est aux mains des insurgés.
Des avions sont prêts à lancer ou à déposer des parachutistes sur divers aérodromes afin de préparer une prise de pouvoir » (…) « Dès que les sirènes retentiront, allez-y à pied ou en voiture, convaincre des soldats trompés de leur lourde erreur.
A Paris, un conseil des ministres exceptionnel proclame l’état d’urgence. Mais déjà en Algérie les premières défections apparaissent du côté de l’armée. A Mers-el-Kébir, la Marine refuse de suivre la sédition. Les généraux de Pouilly et Gouraud, commandants militaires d’Oranie et du Constantinois, repoussent l’ultimatum des putschistes. Gouraud se ralliera finalement le lendemain.
Le 23 avril à 20H00, Charles de Gaulle, en uniforme, lance sur les ondes sa célèbre condamnation du « pronunciamiento » et moque un « quarteron des généraux en retraite », « groupe d’officiers partisans, ambitieux et fanatiques ». « J’interdis à tout Français, et d’abord à tout soldat, d’exécuter aucun de leurs ordres », dit-il, déplorant d’un trois fois Hélas ! que le coup de force émane d’hommes « dont c’était le devoir, l’honneur, la raison d’être, de servir et d’obéir ». Il annonce la mise en oeuvre de l’article 16 de la Constitution qui lui donne les pleins pouvoirs.
Michel Debré, Premier ministre, intervient ensuite : « Des avions sont prêts à lancer ou à déposer des parachutistes sur divers aérodromes afin de préparer une prise de pouvoir » (…) « Dès que les sirènes retentiront, allez-y à pied ou en voiture, convaincre des soldats trompés de leur lourde erreur », demande-t-il.
Le lendemain, Challe, Salan, Jouhaud, Zeller, les colonels Godard, Argoud, Broizat et Gardes sont destitués par Paris. En Algérie, dans le bled, les appelés multiplient les actes de résistance à la sédition : brouillage des
communications, sabotage des véhicules et dépôts d’essence. Les gendarmes reprennent Alger.
Le 25 avril, les légionnaires du 1er REP se réfugient au camp de Zeralda qu’ils quitteront le 27, leur unité étant dissoute. Le gouvernement reprend la radio d’Alger. L’insurrection est terminée.
Deux des putschistes, Maurice Challe puis André Zeller, se constituent prisonniers. Edmond Jouhaud et Raoul Salan passent à la clandestinité pour prendre la tête de l’Organisation armée secrète (OAS). Challe et Zeller seront condamnés à 15 années de détention. Jouhaud et Salan, condamnés à mort par contumace, verront leur peine commuée en détention à vie en 1962 par le général de Gaulle. Ils seront tous amnistiés en 1968, six ans après l’indépendance de l’Algérie.
Geo.fr, 19 avr 2021
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