Les Algériens entament le mois de Ramadhan sur fond de tensions sociales, alors que le climat général est déjà suffisamment lesté par la persistance de la crise sanitaire (avec une prévalence très faible, Dieu merci) et la crise politique. Le premier jour n’a pas échappé à l’inévitable valse des étiquettes sur les marchés des fruits et légumes où les prix, en l’espace de quelques heures, ont connu des rebonds spectaculaires, s’agissant spécialement de certains produits qui entrent dans la recette de la légendaire chorba.
Tomates, courgettes, petits pois, haricots verts, piments, poivrons pour ne citer que ces quelques « grosses légumes » sont hors de portée de petites bourses qui sont, malheureusement, la grande majorité dans la société algérienne. En effet, pas moins de 6 millions de citoyens ont des revenus inférieurs à 30.000 dinars, un chiffre révélé par le président de la République, au lendemain de sa décision d’exonérer de l’IRG les revenus en dessous de 30.000 dinars.
Outre ces inévitables et incompréhensibles envolées des prix, que les algériens acceptent bon gré, mal gré avec beaucoup de philosophie et comme faisant partie du décorum ramadhanèsque, il y a deux grèves qui s’invitent à la « fête » D’abord, la grève de l’Education à laquelle le CNAPESTE a appelé pour les deux journées de lundi et mardi qui a connu un suivi différencié entre écoles primaires, collèges et lycée. Ce sont des revendications salariales qui sont à l’origine de cette grève qui est venue casser une trêve syndicale qui dure depuis une année dans un secteur de l’Education en butte à une fragilité sociale.
Ce sont les mêmes considérations salariales qui ont motivé la grève surprise déclenchée depuis lundi par les travailleurs d’Algérie Poste qui réclament en l’occurrence le versement de la prime d’encouragement, tout en réitérant d’autres demandes comme la révision à la hausse des primes de rendements individuelle et collective, et le réaménagement du temps de travail. Visiblement, les réponses apportées lundi soir par l’Administration d’Algérie Poste n’ont pas été satisfaisantes. Ce qui explique, à l’évidence, la fermeture des guichets devant les citoyens réduits à prendre leur mal en patience, en espérant que les choses vont rentrer dans l’ordre pour pouvoir retirer leur argent afin de faire face aux exigences gourmandes du Ramadhan.
Mais au-delà de l’anecdote, force est de considérer que ces grèves dans l’Education et Algérie Poste, sont en fait des explosions qui correspondent à un ras le bol a bas bruit qui risque de se généraliser. La baisse du pouvoir d’achat, consécutive à la dévaluation clandestine du dinar par les autorités, donne à la question salariale un relief particulier, et impose au gouvernement des réponses claires. Car les fuites en avant ce n’est pas de bonne politique, à plus forte raison dans un climat comme celui que vit actuellement le pays où les nuages s’accumulent dans le ciel.
H. Khellifi
L’Est Républicain, 14 avr 2021
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