par Boubakeur Hamidechi
Alors que la scène partisane s’était vidée de ses bateleurs de la politique qui l’avaient longtemps animée par leur harangue, seule Louisa Hanoune a décidé récemment de partir en expédition guerrière contre la pitoyable administration officielle ayant affiché une incompréhensible hostilité à son égard, la menaçant, sans coup férir, de suspendre le fameux Parti des travailleurs. Sans hésitation aucune, elle décida aussitôt de reprendre son « one woman show » afin de confondre et les militants complotistes et, surtout, la haute administration en train de donner un coup de main à cette manœuvre tout à fait contraire à la déontologie en politique.
Sans tout à fait changer de style oratoire grâce auquel elle devint très tôt une bonne cliente de la presse, l’on vient, encore une fois, la retrouver dans son rôle idéal de « sniper ». Tirant sur tout ce qui bouge, elle décida d’accuser sans nuance les arrière-pensées des bureaucrates bornés, leur reprochant des procès ad hominem aux allusions inélégantes quand il en allait de leur dignité d’abord de respecter la probité politique de ces vis-à-vis qui leur ressemblent tout en leur épargnant les magouilles des voyous. Ainsi, après avoir longtemps été perçu comme un courant d’opposition, le PT se retrouva malmené à travers des qualificatifs infamants alors qu’il n’en demandait tant à la veille des derniers mois cruciaux au cours desquels les lits de la destitution parurent dès février 2019 et la haute trahison d’une classe politique sans vergogne facilement reconnaissable au sein de l’élite de tant d’impostures.
C’était à elle que l’on dut faire appel afin de signifier au fantomatique Président la dissolution de ses prérogatives. Poussée vers le glas annonciateur du fameux minuit politique, la prétendue « pasionaria » allait s’engager par la suite dans de troublants complots. C’est dire qu’à tous points de vue, le cas Hanoune allait devenir également intéressant au regard des péripéties qu’elle eut à subir. Assimilée à une sorte d’incarnation d’une « zone neutre », elle occupa précisément la frontière « doctrinale » supposée établir la différence entre une timide opposition et une indécente courtisanerie. Loin d’être confortable, cette position à cheval lui occasionnera tant de sarcasmes, notamment quand il lui avait fallu adhérer au contrat de Sant’Egidio alors que sa notoriété et son obédience étaient, prétendument, républicaine et gauchiste. Plus tard, d’ailleurs, Louisa Hanoune accepta par opportunisme de vendre les produits du Président et qui se résumaient en la loi de la Concorde et en la ratification de la Réconciliation.
De ces moments historiques, d’ailleurs ponctués par de violentes critiques, elle héritera à son tour du peu respectable qualificatif de « gouvernement de la capitulation ». Elle en gardera surtout la peine d’être brocardée de la sorte lorsqu’il lui arrivait de se rapprocher des courants du progrès (FFS, RCD et l’ex-PAGS). À tort ou à raison, elle ne cessera pas d’être porteuse de soupçons puisqu’on lui a régulièrement imputé la réputation de modératrice de « l’esprit du système » ! Une drôle de compétence qui l’accompagnera tout au long de ses activités et qu’elle parviendra à transformer en source d’inspiration politique. Ceci expliquant cela, le PT se verra propulsé par la suite en parti majeur susceptible de fournir à lui seul des futurs lièvres à la présidence.
En effet, ne détient-elle pas à ce jour le record de la participation à la magistrature suprême avec 4 rendez-vous ! Or, même si elle eut à faire la courte échelle à Zeroual en 1995, l’on se rappelle tout de même que celui-ci ne la tenait pas en haute estime à la suite de sa compromission aux côtés de Haddam lors des contacts du Vatican. Il lui fallut attendre par conséquent la venue de Bouteflika pour qu’enfin elle bénéficie d’une meilleure visibilité politique. Depuis, aussi bien la presse officielle que la télévision n’ont pas été avares à son égard. La sympathie distillée dont elle bénéficia dans ce contexte avait, semble-t-il, commencé lorsqu’en sa qualité de candidate à la présidence, elle s’était fait remarquer en 2004 par de substantielles plaidoiries à l’avantage du « sortant ». C’est-à-dire une offre de service sans ambiguïté en réponse à la meute se liguant contre l’inénarrable « imposteur ». Le tournant de l’an 2004 était certainement celui qui promeut l’étrange « PT » en électron libre concernant les modalités de fonctionnement de l’ensemble d’une classe politique dont on savait qu’il lui manquait de véritables bases sociales d’où pouvaient surgir des contre-réponses dans les moments de crise. Cela n’avait pas échappé à Bouteflika qui préféra installer dans le confort des partis qui lui étaient acquis, une classe de fonctionnaires aux ordres, tout en convainquant la dame Hanoune de structurer habilement cet original compagnonnage. Celui au sujet duquel il y eut suffisamment de gloses, lesquelles ont fini par reconnaître à demi-mot qu’il était le produit d’une seule et même pâte.
Admettant qu’elle consultait en permanence à la fois le palais et les adresses partisanes appartenant formellement à la représentation parlementaire, la subtile Hanoune était à l’aise dans cet exercice. Celui d’anticiper à partir du moindre scandale pointant à l’horizon. En effet, de crainte de déraper, n’était-elle pas parvenue à élaborer une démarche ne pointant que l’index en direction des ministres tout en n’impliquant guère la sensible responsabilité du sommet de l’État. Sauf que cette procédure était à la fois présente mais rarement efficace. Et c’est pour cette impérative raison qu’elle décida de changer de registre pour traduire franco de port le malheur galopant en train d’investir le pays. Devenu un dérisoire chef d’État, Bouteflika risquait bel et bien de tenir le rôle de victime alors qu’il était criminellement l’unique responsable.
C’est de la sorte, justement, que la rusée Hanoune décida de répudier celui qui n’était qu’un monstre.
Le Soir d’Algérie, 10 avr 2021
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