Algérie : Langage des chiffres

Le nombre de nouveaux cas confirmés par jour est repassé sous la barre des 100 après l’avoir dépassée en sens inverse à trois ou quatre reprises ces derniers temps. Ce nombre quotidien est depuis plusieurs mois la plus importante information du jour. Les journaux ne s’y trompent pas qui le placent bien en évidence sur leurs unes. Les Algériens ont les yeux rivés sur lui en effet. Pour la plupart d’entre eux, ils commencent leurs journées en en prenant connaissance. On peut s’en aviser en abordant ce sujet avec la première personne venue ; celle-ci est très généralement au courant non seulement de l’évolution de l’épidémie dans le pays, mais également chez nos voisins et dans le monde.

Pour l’heure en particulier, à moins de cent, la journée commence plutôt bien, même si le reste n’est pas vraiment au beau fixe, pour monsieur et madame tout-le-monde en tout cas. A plus de cent, ce n’est déjà plus le même sentiment plutôt agréable, bien que l’on sache qu’en cette matière les oscillations sont la règle. Le compteur, notamment dans sa tendance à la baisse, reste comme en suspens autour d’une valeur significative pendant plusieurs jours, pendant lesquels il menace de passer d’un bond au palier supérieur. On a relevé qu’à la hausse, sa progression est à la fois plus régulière et plus ample. Il est rare alors qu’il revienne en arrière, encore que cela lui arrive. C’est lorsqu’il est dans un mouvement descendant qu’il tend à traîner les pieds, à se bloquer à une valeur particulière.

Il prend tout son temps avant de passer au palier inférieur, oscillant jusqu’à satiété dans l’intervalle. C’est ainsi qu’il est à cent depuis plusieurs jours déjà. Mais une fois qu’il l’aura quitté, il n’y retournera plus, sauf renouveau de la pandémie, dans ce cas pour des raisons autres que nationales. Laissés à nous-mêmes en effet, sans contact avec nos voisins européens, l’épidémie est condamnée à s’éteindre d’elle-même, et pas qu’en Algérie d’ailleurs, probablement dans tout le continent africain. Pour cela, nous n’avons pas vraiment besoin de vaccins.

Les chiffres de la pandémie n’ont jamais évolué de façon erratique en Algérie, à la hausse comme à la baisse, mais leur rythme n’est pas le même selon qu’ils sont dans l’une ou dans l’autre phase. Il n’est jamais arrivé qu’on se couche sur un chiffre pour se réveiller sur un autre, ou de nettement supérieur ou de franchement inférieur, comme cela s’observe ailleurs.

Dans un pays comme la France, le nombre des contaminations évolue le plus souvent en dents de scie. Mais pas nécessairement celui des décès, qui lui en revanche tend à se stabiliser. Partout en Occident, le nombre des contaminations n’a rien de régulier, ni dans la hausse ni dans la baisse. Il a même pu passer du jour au lendemain du simple au double, et même au triple. Et en sens inverse, du simple à la moitié et même au tiers. D’une certaine façon donc, il n’est pas fiable. Les Européens ont encore plus besoin, que nous pour les nôtres, de les tenir à l’œil.

On peut en Algérie les ignorer un ou deux jours, se reposer d’eux, sachant qu’ils ne vont ni prendre leur essor ni s’affaisser d’un coup. Un luxe que les Européens ne peuvent pas se permettre, de peur que lorsqu’ils reviennent à leur vigilance, ils se retrouvent nez à nez avec la maladie. Car en effet suivre l’évolution de la maladie, ça sert aussi à mesurer la distance qui nous en sépare encore. A moins de cent de nouveaux cas rapportés par jour, elle s’éloigne. On aurait plutôt tendance à se rassurer et à baisser sa garde, dans l’idée que de toute façon elle aurait beaucoup de chemin à parcourir avant d’arriver sur notre palier si par hasard elle renversait sa marche. C’est en général à ce moment que la tête ailleurs on ouvre sa porte et qu’elle est là, qui nous sourit. Et que sans le savoir on la laisse entrer.

Le Jour d’Algérie, 4 avr 2021

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