La colère monte dans les rangs des professionnels de la santé en raison de l’absence totale de transparence dans la gestion de la campagne de vaccination en Algérie. Presque deux mois après le lancement de l’opération, ils sont toujours dans le « noir ». Mis à part l’annonce des quantités reçues jusqu’à présent, et qui restent insignifiantes au regard des objectifs tracés par les autorités sanitaires, aucun chiffre concernant l’évolution de la vaccination ! Combien de citoyens ont déjà reçu le vaccin (1ère et 2ème dose) ? Ils n’en savent rien et ça les irrite à l’extrême.
Cela fait un mois, qu’ils ne cessent d’exhorter le ministère de la Santé de sortir de cette opacité, qui ne peut que semer le doute et la suspicion au sein des personnels soignants et la population, mais leurs appels sont restés sans écho. Pas la moindre réaction de la part des services concernés, qui communiquent quotidiennement le nombre des contaminations journalières, le nombre des rémissions et le nombre des décès, tout en faisant l’impasse sur les données relatives à la vaccination.
Hier, ce fut au tour du professeur Kamel Bouzid, chef du service d’oncologie au centre Pierre et Marie Curie du CHU Mustapha d’Alger, de monter au créneau pour dénoncer une situation pour le moins « absurde ». L’éminent oncologue, exaspéré par le manque de communication au sujet des personnes vaccinées depuis le début de la campagne, est allé de son réquisitoire à l’encontre du ministère de la Santé. « C’est un chiffre qui manque », a-t-il déploré dans une déclaration relayée par TSA.
« Dans son bilan quotidien (évolution des chiffres des contaminations, décès, guérisons…), le ministère de la Santé doit dire combien de personnes se sont faites vacciner », a-t-il réclamé. « On connaît le nombre d’Anglais, de Français et de Marocains vaccinés, et pour nous, on ne le sait toujours pas », a-t-il fait savoir. Il est à rappeler qu’en ce qui concerne le Maroc voisin, les chiffres actualisés au 23 mars font état de 4 265 196 personnes vaccinées, soit un taux de 11,56%.
Récemment un responsable du CHU Mustapha Pacha avait révélé que moins de 10% du personnel soignant de l’hôpital (environ 5 000) ont pu recevoir le vaccin. Le manque de transparence est dénoncé par le docteur Mohamed Yousfi, chef du service des maladies infectieuses de l’EPH Boufarik. « Depuis le début, ce qu’on reproche aux autorités sanitaires, c’est le problème de communication », a-t-il souligné. « Il n’est pas normal qu’on ne communique pas », a-t-il asséné. « Il y a quinze jours, on annonçait un lot de 700 000 doses, mais qui ne sont jamais arrivées », s’est-il étonné, tout en s’interrogeant sur les 300 000 doses qui devraient servir à vacciner 150 000 personnes. « Est-ce que toutes les doses ont été utilisées. Je n’ai pas de réponse », a-t-il laissé entendre comme un aveu d’impuissance.
Malgré toutes ces critiques, du côté du ministère de la Santé, c’est le mutisme total. A première vue, et en dépit de tout ce qui est reproché à son département, rien ne semble perturber Abderrahmane Benbouzid, se murant dans un silence qui en dit long sur les difficultés qu’il rencontre dans la gestion de ce dossier. Une chape de plomb, qui met en péril ce qui reste de crédibilité aux autorités sanitaires. Et c’est le moins que l’on puisse constater.
Mohamed Mebarki
L’Est Républicain, 25 mars 2021
Tags : Algérie, coronavirus, covid 19, pandémie, vaccination,
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