La particularité du régime de Dbeibah est qu’il s’agit du « premier gouvernement unifié en Libye depuis 2014 ».
Le pays nord-africain riche en pétrole a sombré dans le chaos après le renversement et la mort de Mouammar Kadhafi lors d’un soulèvement soutenu par l’Otan en 2011, ce qui a donné lieu à de multiples forces se disputant le pouvoir.
L’approbation mercredi d’un gouvernement d’unité dirigé par Abdul Hamid Dbeibah, nommé premier ministre par intérim aux côtés d’un conseil de présidence de trois membres en février dans le cadre d’un dialogue interlibyen parrainé par l’ONU, a été saluée par les puissances mondiales et a suscité des espoirs de réconciliation.
Mais le nouvel exécutif est confronté à des défis de taille alors qu’il suit la feuille de route des Nations unies pour unifier les institutions, mettre fin à une décennie de combats marqués par l’ingérence internationale et préparer le terrain pour les élections de décembre.
Quelles sont les prochaines étapes ?
Dbeibah, un milliardaire de 61 ans originaire de la ville occidentale de Misrata, doit prêter serment lundi à Benghazi, deuxième ville de Libye et berceau de la révolution de 2011.
Fayez Al Sarraj, chef du gouvernement d’accord national sortant basé à Tripoli, a déclaré qu’il était « totalement prêt à remettre » le pouvoir.
Le GNA a également été établi à l’issue d’un processus parrainé par l’ONU en 2016, mais n’a jamais obtenu le vote de confiance du Parlement, son autorité étant contestée par une administration parallèle dans l’est.
Le gouvernement de Dbeibah devrait remplacer à la fois le GNA et le cabinet parallèle d’Abdallah Al Thani, dont le siège se trouve en Cyrénaïque dans l’est, une région clé sous le contrôle de facto des forces du commandant militaire Khalifa Haftar.
Les États et les organismes internationaux ont salué l’approbation du gouvernement d’unité, mais ont mis en garde contre toute nouvelle ingérence d’acteurs extérieurs. L’Union européenne a déclaré jeudi qu’elle pourrait sanctionner les « fauteurs de troubles » nationaux ou étrangers qui sapent les efforts de paix.
Toutefois, selon Jalel Harchaoui, membre senior du groupe non gouvernemental Global Initiative à Genève, la passation de pouvoir devrait se dérouler sans heurts.
« Les milices pro-Sarraj à Tripoli sont favorables à Dbeibah, il est donc très peu probable que Sarraj tente de rester en place, car cela est impossible sans la protection de ces milices », a-t-il déclaré à l’AFP.
Les principaux défis peuvent-ils être surmontés ?
Le gouvernement intérimaire doit maintenant s’attaquer aux nombreuses doléances des Libyens, de la montée en flèche du chômage à l’inflation paralysante, en passant par les pénuries d’argent et les services publics misérables.
M. Dbeibah s’est engagé à résoudre le problème des coupures de courant quotidiennes dans les six mois, tout en promettant de lutter contre la corruption et la pandémie de coronavirus.
Hamish Kinnear, analyste de l’institut de recherche Verisk Maplecroft, a déclaré que l’approbation du gouvernement d’union était également « une bonne nouvelle pour le secteur pétrolier libyen, qui peut bénéficier d’une stabilité politique accrue ».
Le retour des revenus pétroliers – dont le pays dépend – a été une source essentielle de conflit entre les puissances rivales de l’Est et de l’Ouest.
Mais étant donné la « coopération apparente » de Dbeibah avec Haftar et l’influent président du Parlement, Aguila Saleh, « il est probable qu’un accord sur le mécanisme de partage sera bientôt conclu », a déclaré M. Kinnear.
Le démantèlement des milices jouera probablement un rôle clé dans la consolidation de la paix, a-t-il ajouté, tout en prévenant que certaines d’entre elles « seront réticentes à abandonner leurs armes ou leur indépendance ».
Quelles sont les chances de succès à long terme ?
Ce qui distingue le gouvernement de Dbeibah, c’est qu’il s’agit du « premier gouvernement unifié en Libye depuis 2014 », a déclaré Kinnear.
Sa confirmation en tant que « gouvernement légitime de la Libye est une étape majeure dans les efforts de réunification » du pays, a-t-il ajouté, notant toutefois que ce gouvernement devra tenir compte du rôle des acteurs extérieurs.
Une autre tâche essentielle à laquelle sera confrontée la nouvelle administration sera de veiller au départ des quelque 20 000 mercenaires et combattants étrangers encore présents en Libye.
Malgré les tâches colossales qui l’attendent, le temps joue en faveur du nouveau gouvernement : Les Libyens sont épuisés par dix années de chaos et de division, et les appels à la fin du statu quo se multiplient, y compris au sein de la classe politique.
Gulf News, 13 mars 2021
Tags : Libye, gouvernement d’unité nationale,
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