Le Maroc met la pression sur la Belgique en refusant de rapatrier « la veuve noire »

La Belgique ne peut pas faire sortir la «veuve noire» Malika El Aroud du pays: pourquoi est-il si difficile d’expulser des sans-papiers?

Depuis un an maintenant, le Département de l’Immigration a détenu Malika El Aroud à son retour chez elle. L’intention est de la déporter vers son pays d’origine, le Maroc, mais cela s’avère impossible. La «veuve noire du Jihad» refuse de coopérer, elle n’a actuellement plus de passeport valide et le Maroc ne prend pas non plus de mesures pour délivrer les documents de voyage nécessaires. Le Conseil du contentieux des étrangers a maintenant décidé qu’elle devrait être libérée car elle ne peut pas être renvoyée.
Un à un, ils se mordent les dents: le retour obligatoire des personnes sans titre de séjour en cours de validité reste une question particulièrement difficile pour les secrétaires d’État successifs et les ministres de l’asile et des migrations. Ce n’est pas seulement le cas en Belgique, il en va de même dans d’autres Etats membres européens.

Ce sont généralement des noms inconnus qui doivent quitter le territoire, des personnes qui essaient d’attirer le moins d’attention possible. Mais avec Malika El Aroud, les choses sont légèrement différentes.

Qui est encore Malika El Aroud?

Malika El Aroud est un nom qui revient régulièrement en matière de terrorisme. Elle-même s’est fait connaître comme une djihadiste d’Internet: elle a glorifié le terrorisme. Mais elle a reçu le nom de «veuve noire» après la mort de son premier et de son deuxième mari.

Son premier mari a tué le chef de guerre afghan Massoud lors d’un attentat-suicide deux jours avant les attentats du 11 septembre 2001. Le mari numéro deux a été tué lors d’un raid aérien américain en Afghanistan.

En 2010, El Aroud a été condamné à huit ans de prison en Belgique. Elle a également purgé cette peine.

Pourquoi la Belgique a-t-elle essayé de l’éloigner?

El Aroud avait la double nationalité: belgo-marocaine. Mais sa nationalité belge lui a été retirée par le tribunal en 2017. Elle a toujours tenté d’obtenir un permis de séjour, mais cette demande a été rejetée. Cela signifie qu’elle doit quitter le pays.

Dans la politique de retour, les personnes qui ont perturbé l’ordre public sont la priorité absolue. Dans la pratique, l’Office des étrangers essaie de forcer tous ceux qui purgent une peine de prison et qui se trouvent illégalement sur notre territoire à rentrer.

Mettez-le dans un avion, facile non?

Cela semble simple, mais ce n’est pas le cas. Forcer quelqu’un à retourner dans un pays d’origine est souvent difficile dans la pratique. Vous avez besoin de documents valides pour voyager. Il existe des accords internationaux à ce sujet et les compagnies aériennes risquent de lourdes amendes.

S’il n’y a pas de documents de voyage valides ou si la personne refuse de les donner, le bureau de l’immigration doit les obtenir lui-même. Malika El Aroud n’avait plus de passeport valide. Et elle ne veut pas en faire la demande elle-même. Elle refuse de coopérer.

Pour le Département de l’Immigration, un tracas administratif commencera alors avec le pays d’origine. Certains pays fournissent les documents nécessaires sans trop de problèmes. Mais pas tout.

Un pays d’origine ne devrait-il pas reprendre ses ressortissants?

En principe, un pays est obligé de prendre soin de ses ressortissants. Dans ce cas, le Maroc ne refuse pas formellement non plus de fournir les documents. Cela prendra très longtemps et on ne sait pas combien de temps cela prendra.

Combien de temps pouvez-vous enfermer quelqu’un en vue de son expulsion?

En attendant le retour forcé, une personne peut être détenue sans titre de séjour valide. Mais il y a une durée maximale. El Aroud a passé 8 mois dans un centre de retour fermé.

Après cela, elle a également passé des mois dans un retour à la maison. Mais il n’y a toujours pas d’informations sur les documents de voyage et c’est pourquoi le Conseil du contentieux des étrangers a maintenant décidé de la libérer.

La veuve noire réside désormais illégalement en Belgique et pourtant il est impossible de l’éloigner. Elle est peut-être l’une des personnes les plus célèbres dans cette situation, mais il y en a beaucoup comme ça.

El Aroud peut-elle maintenant rester en Belgique?

El Aroud peut désormais aller et venir où elle le souhaite. Cela peut sembler meilleur qu’il ne l’est en réalité. Parce qu’elle n’a pas le droit de travailler et n’a pas droit à des prestations ou à d’autres droits sociaux. Faites une assistance médicale urgente si nécessaire. Elle a une fille de nationalité belge et elle va peut-être y vivre.

Si le Maroc délivre les documents de voyage nécessaires, le bureau de l’immigration peut toujours venir la chercher et la renvoyer.

Mais cette histoire prouve une fois de plus que beaucoup de langage dur est utilisé pour revenir. Peu de progrès sont réalisés dans la pratique. Les taux de retour restent faibles.

Que fera le secrétaire d’État Mahdi?

Quant à El Aroud lui-même, qui sera bientôt de nouveau libre, le secrétaire d’État à l’asile et à la migration Sammy Mahdi (CD&V) affirme que les services de police et les autorités locales seront informés.

Structurellement, le secrétaire d’Etat Mahdi souhaite travailler sur une meilleure politique de retour, notamment avec les pays du Maghreb. Il met à nouveau sur la table l’idée des pays d’origine qui ne coopèrent pas avec les sanctions de visa de retour. Il existe une législation européenne à ce sujet depuis l’année dernière, mais elle n’a pas encore été appliquée dans la pratique.

La Commission européenne, en consultation avec les États membres, peut décider qu’il est plus difficile pour les ressortissants des États membres concernés d’obtenir un visa. Par exemple, ils devront payer plus pour cela ou cela prendra plus de temps avant d’obtenir un visa. Il sera de retour à l’ordre du jour du Conseil européen du 12 mars.

« La semaine prochaine, je proposerai d’utiliser le mécanisme des faveurs de visa et des sanctions de visa pour les pays qui ne coopèrent pas bien en retour », a déclaré Mahdi. Bien qu’il espère également une « solution constructive » avec le Maroc.

Radio 1, 2 mars 2021

Tags : Maroc, veuve noire, terrorisme, Belgique, Malika El Aroud,

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