Il n’est pas loin le temps où, ici, en Belgique, l’annonce, sur les antennes de notre radio de service public, la RTBF, d’une analyse, d’un commentaire, du directeur de l’IRIS attirait l’attention et les oreilles des personnes intéressées par l’actualité internationale… un gage d’expertise et de pertinence
Aujourd’hui, hélas, après la découverte de votre présentation du conflit du Sahara Occidental, je crains que la donne ne change. Car votre analyse simpliste, partielle et partiale, qui s’engouffre dans la brèche ouverte par la reconnaissance trumpienne de la marocanité du Sahara Occidental, passe sous silence divers éléments, et surtout se fait complice du non- respect du droit international et du non-respect des droits des peuples.
Vous passez sous silence l’avis de la Cour de Justice Internationale de La Haye qui, en 1975, ne reconnaît pas la souveraineté du Maroc sur le Sahara Occidental.
Vous passez sous silence les arrêts de la Cour de Justice européenne qui, en 2016 et 2018, confirment que le Maroc est la puissance occupante et que le Sahara Occidental et le Maroc sont deux entités distinctes et séparées.
Vous passez sous silence que le référendum d’autodétermination, sensé être organisé par la mission des Nations Unies déployée à cet effet en 1991, la Minurso, n’a pu être organisé à ce jour, faute d’accord du Maroc qui craignait un résultat en sa défaveur.
Vous passez sous silence l’exploitation illicite des ressources naturelles du Sahara Occidental (phosphates et richesse halieutique en particulier) par la puissance occupante, le Maroc.
Vous passez sous silence la rupture du cessez-le-feu de 1991 par le Maroc en automne dernier, suite à l’intervention musclée de l’armée marocaine à l’encontre de manifestants – et surtout manifestantes – sahraouis qui bloquaient le passage de camions marocains exportant des marchandises en grande partie pillées sur leur territoire.
Mais surtout, Monsieur Boniface, vous passez sous silence des hommes et des femmes, un peuple digne, courageux, fier de sa culture, bien décidé à faire respecter ses droits, écartelé par un mur long de 2 700 km construit par le Maroc qui y a disséminé nombre de mines anti-personnelles. Un peuple bien organisé dans les campements de réfugiés dans le sud algérien, gérés en grande partie par les femmes sahraouies. Un peuple organisé de manière démocratique, avec un gouvernement, un parlement, et une multitude d’associations culturelles, de jeunes, de femmes, de défense des droits humains.
Et vous passez encore sous silence toutes les violations des droits humains dont sont victimes les Sahraouis dans les territoires occupés : disparitions, emprisonnements, violences, interdiction de s’exprimer, de se rassembler, de manifester. Et le refus des autorités marocaines de donner accès à toute mission d’observation : ONG, juristes, journalistes, avocats…
Je réécoute votre présentation du conflit du Sahara Occidental et j’entends la voix du Maroc. Qui fait fi du droit international et du droit des peuples à s’autodéterminer. Est-ce cela l’IRIS ?
Comité belge de soutien au peuple sahraoui, 26 fév 2021
Tags : Sahara Occidental, Western Sahara, Maroc, Pascal Boniface, IRIS, ‘Institut de relations internationales et stratégiques,