Dix ans après la révolution, la Tunisie est à nouveau en ébullition. Parmi les manifestants, un groupe s’est fait remarquer. Il s’autoproclame de la “wrong generation”, en rupture avec la classe politique conservatrice. Un site indépendant tunisien s’est intéressé à ces jeunes manifestants.
Comme une provocation, l’expression est apparue sur des pancartes lors des manifestations des derniers jours à Tunis : “Wrong generation” [“La mauvaise génération”]. Un slogan en forme de message pour la classe politique. “La mauvaise génération contre la génération corrompue”, dénonçaient aussi d’autres pancartes.
Derrière cette appellation, se trouve un tout nouveau mouvement initié par un groupe de jeunes, rapporte le site d’information indépendant Hakaekonline. Se proclamant antifasciste et de gauche, il dit vouloir en découdre avec l’oligarchie politique en place depuis la révolution de 2011.
Alors que la classe politique s’enfonce de plus en plus dans une crise politique, les jeunes continuent à descendre dans la rue pour défier le “pouvoir” et le “système”. S’ils n’ont pas toujours de revendications claires, ils demandent depuis plusieurs jours un changement radical de la politique. Parfois violentes, les manifestations ont enregistré le décès d’un jeune participant, Haykel Rachdi, blessé par une bombe lacrymogène à Sbeïtla (gouvernorat de Kasserine).
Ce n’est pas un parti, il ne distribue d’ailleurs pas de cartes d’adhérent… Il rassemble beaucoup de jeunes, mais n’a ni porte-parole ni représentant, et ne se sent pas attiré par les plateaux de télévision pour le moment.”
Pour le site, ces jeunes prônent une rupture avec la gauche “classique” et son discours “orthodoxe”, ainsi qu’avec la société conservatrice dans laquelle ils vivent. Lors de la grande manifestation qui a eu lieu le mardi 26 janvier sur l’avenue Habib-Bourguiba, dans le centre de Tunis, un couple a tenu à s’embrasser sur la bouche devant des forces antiémeutes. Un pied de nez et un appel à la liberté face au conservatisme du président Kaïs Saïed et à la puissance des partis islamistes à l’Assemblée nationale.
Depuis la mi-janvier, manifestations et émeutes se succèdent en Tunisie, alors que le pays célèbre les dix ans de sa révolution. Le 26 janvier, une nouvelle marche d’ampleur a eu lieu devant le Parlement tunisien, pendant que les élus validaient un vaste remaniement ministériel. Alors que plusieurs personnalités du nouvel exécutif sont contestées par la rue, le président tunisien lui-même est sorti de sa réserve pour dire sa défiance face au nouveau gouvernement. Aggravant encore un peu plus la crise politique.
Malik Ben Salem
Courrier International, 30 jan 2021
Tags : Tunisie, printemps arabe, corruption, chomage,
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